Nice-Matin (Nice Littoral et Vallées)

Conseils pour réussir ses investisse­ments

Face à l’offre de produits d’épargne, les Français sont plutôt fourmis que cigales. Encore plus en ce contexte de taux bas et d’incertitud­es liées à la Covid. Conseils

- KARINE WENGER kwenger@nicematin.fr

Les ménages français sont les champions de l’épargne. Au premier trimestre 2020, ils ont économisé 19,7 % de leurs revenus (source Eurostat, lissage sur 4 trimestres, Banque de France). Un pourcentag­e qui, Covid oblige, est passé à 27,4 % le trimestre suivant. De vrais petits écureuils... Cette épargne est aussi très peu diversifié­e et largement investie dans l’immobilier. Autre caractéris­tique hexagonale : 54 % de nos compatriot­es refusent tout risque pour leur épargne, selon le baromètre de l’Autorité des marchés financiers (AMF). Pourquoi une telle frilosité envers les produits financiers ? « C’est un sujet qui relève de la psychologi­e de l’investisse­ur », explique Daniel Haguet, professeur de finance à l’Edhec Business School de Nice, intervenu dernièreme­nt lors des Rendez-vous de l’épargne, une manifestat­ion nationale qui vise à sensibilis­er les Français au rôle de l’épargne dans le financemen­t de l’économie ainsi qu’aux arnaques financière­s. Une thématique de recherche très sérieuse qui a valu à trois économiste­s relevant de la finance comporteme­ntale le prix Nobel de l’économie.

Incertitud­e positive ou négative

Ceci étant, « Accoler le terme “risque” à l’expression “placement financier” fait peur » , estime l’enseignant qui lui préfère celui d’incertitud­e. Et d’expliquer que la majorité des décisions de la vie courante est teintée d’incertitud­e. « En anglais, le mot “risque” se traduit par “chance” qui veut dire probabilit­é, qu’elle soit positive ou négative. Il faut sortir de cette ambiance anxiogène qui saisit les Français dès qu’on leur parle de placements financiers. Je préfère dire d’un contrat en assurance vie qu’il

L’épargne a un rôle important à jouer dans le financemen­t de l’économie.

est garanti en capital car c’est un fait plutôt d’affirmer qu’il est non risqué. » On ne réagit pas non plus de la même manière selon que l’on est dans une incertitud­e positive ou négative. Le client dont l’action a perdu 2 % aura plus de douleur que de plaisir en apprenant que le cours a

Daniel Haguet, professeur de finance Edhec

augmenté de 2 %. Ce qui fait dire à Daniel Haguet qu’« à variation égale, la douleur de la perte est plus forte que le plaisir d’un gain. C’est l’asymétrie de la version risque. L’individu est averse à la perte : il aura tendance à persister dans l’incertitud­e en gardant le titre qui a perdu de l’argent. » Sa logique est d’espérer que l’action remonte. (Photo Anne Nygård on Unsplash) « Alors que le bon réflexe aurait pu être de la vendre pour couper court aux pertes. »

Éducation financière

Risque-incertitud­e : cette question de sémantique mise à part, seuls 20 % des Français considèren­t avoir une connaissan­ce élevée sur les questions financière­s. C’est peu, trop peu. « Depuis le début de l’année, nous sommes devenus incollable­s sur les virus, vaccins et anticorps, alors pourquoi pas en finance ? Acquérir une éducation financière via la lecture, Internet... permet de faire des choix éclairés et d’éviter des erreurs. D’autant que dans la vie courante, il nous arrive régulièrem­ent de devoir calculer le coût d’un crédit ou celui d’un intérêt sur un placement... On pense à tort que la Bourse, c’est comme jouer au casino. Elle ressemble davantage aux paris hippiques ; on ne mise pas sur un cheval par hasard mais on a étudié auparavant sa cote. C’est la même chose pour les placements en Bourse, il y a des fondamenta­ux à maîtriser. »

Profilage

Avant de foncer tête baissée dans un PEA ou une assurance vie, il faut savoir pourquoi on épargne. Est-ce du court terme pour financer les besoins du quotidien ou pour préparer sa retraite ? « La partie diagnostic initial est très importante et la déterminat­ion du profil de l’individu (plus ou moins averse au risque, placement long ou pas, propriétai­re, locataire, charge de famille…) influence le type de placement. » Autant de points abordés par les profession­nels du secteur qui ont l’obligation de faire remplir un questionna­ire très précis à un client avant de lui recommande­r un quelconque support financier. Ce dernier pourra ensuite signer un mandat permettant au banquier, courtier en assurances… de prendre les décisions et faire des arbitrages à sa place.

Conseils

Sachant cela, où investir ? Et Daniel Haguet de conseiller « la plus grande diversific­ation des supports. C’est la règle de base. Il faut aussi laisser le temps au temps. » Comprendre par là ne pas ouvrir un PEA (plan d’épargne en actions) pour six mois uniquement. Le professeur de finance préconise « le contrat d’assurance vie qui comporte des fonds en euros, de l’immobilier et des actions. C’est le système le plus souple (lire ci-contre). »

On récapitule

Puisque les Français sont assez averses à la perte, récapitulo­ns ce qui est un placement risqué ou de bon père de famille. Sont risquées les actions cotées et non cotées, les OPCVM, les obligation­s et les unités de compte en assurance vie. Ne sont pas risquées les liquidités, les livrets bancaires, les comptes à terme, l’épargne logement, les fonds en euros en assurance vie. Avis aux cigales, fourmis et autres écureuils...

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