Nice-Matin (Nice Littoral et Vallées)

Élection de Mitterrand : ils se souviennen­t

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« À l’époque j’étais l’attaché parlementa­ire d’un tout jeune député UDF du Var qui se nommait François Léotard », rappelle Rudy Salles. « Nous avions été très impliqués dans la campagne de Giscard », poursuit-il.

« Plus qu’une alternance, une révolution »

L’ex-élu niçois – aujourd’hui avocat et toujours président délégué de l’office de tourisme – évoque « les opérations commandos » pour faire réélire le président sortant.

« Nous avions constitué un petit groupe d’actions qui rassemblai­t des députés fraîchemen­t élus comme Léotard, Madelin, etc. Nous nous étions illustrés en allant distribuer des tracts devant les ateliers d’entretien de la SNCF à Nîmes, une ville très communiste à l’époque. À l’époque, c’était culotté. »

Autant que d’investir l’hôtel du Vieux-morvan à Château-chinon pour y organiser une réunion publique. « Mitterrand y était chez lui. C’est généraleme­nt là qu’il attendait que tombent les résultats. Ce coup d’éclat nous avait valu une couverture médiatique incroyable ! Mais cela n’a pas suffi. » Rudy Salles en convient. Le soir de l’annonce des résultats, il était à Paris. « Rue de Marignan, au QG de Giscard. » Il se souvient du «choc».

« On s’est réveillé ce  mai  avec une incroyable gueule de bois. Il régnait dans les rues de Paris une ambiance très particuliè­re. Comme un sentiment de lutte sociale. C’était plus qu’une alternance, c’était une révolution », assure l’ancien député niçois qui rappelle le contexte de l’époque : « C’était le temps où le communisme muselait toute l’europe de l’est, le temps du goulag… »

Alors voir arriver, en France, quatre ministres communiste­s au gouverneme­nt « ce fut un très grand choc pour l’opinion publique, répète-t-il, du moins pour les gens de droite et du centre ».

À Paris, mais paradoxale­ment peut-être moins dans la capitale azuréenne.

« Contrairem­ent à ce que l’on peut croire, Nice était tenue par une droite plutôt modérée. Jean Médecin était radical et Jacques était centriste jusqu’à ce qu’il rallie le RPR en réaction à une indélicate­sse que lui avait faite Giscard. »

Surtout, « le vent du boulet communiste » était passé tout près, avant Mitterrand.

« En , Charles Caressa avait bien failli prendre la mairie. Jacques Médecin n’avait été élu qu’à un petit millier de voix prés. Les Niçois avaient alors tellement été surpris qu’ils avaient fait en sorte de ne pas s’y faire reprendre aux élections suivantes.

En , Médecin l’avait finalement emporté dès le premier tour. »

« On a vu arriver les barbus… »

Il n’empêche qu’au moment de la présidenti­elle, il y avait un fort ressentime­nt populaire. « Les gens avaient en quelque sorte envie de renverser la table… Au risque de renverser les institutio­ns. On se demandait sincèremen­t, si la Ve République allait résister à ce nouveau président qui avait tout de même écrit un bouquin qualifiant ce régime de Coup d’état permanent. D’autant que lors des législativ­es qui ont suivi, il s’est passé un peu ce qu’on a vécu en . On a vu arriver à l’assemblée Nationale tout un tas de députés issus de la société civile et qui n’avaient jamais fait de politique avant. On les a appelés les barbus, parce qu’un certain nombre d’entre eux l’étaient vraiment. Ils avaient surtout le couteau entre les dents et aucune considérat­ion pour leurs prédécesse­urs. Ni même pour le personnel de l’assemblée, d’ailleurs. Ils traitaient les fonctionna­ires comme s’ils étaient leurs opposants politiques. » « Depuis, la roue a tourné », conclut Rudy Salles.

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Rudy Salles.
(Photo F.bouton) L’ancien député centriste se souvient. Rudy Salles.

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