Nice-Matin (Nice Littoral et Vallées)

La cible Bertrand

- de DENIS JEAMBAR Journalist­e et écrivain edito@nicematin.fr

Un assaut politique, aussi évident soit-il, peut en cacher un autre. En apparence, les grandes manoeuvres présidenti­elles déclenchée­s par Emmanuel Macron ont toutes pour but de faire barrage à Marine Le Pen et au Rassemblem­ent national (RN). La tentative avortée d’en Marche pour faire liste commune aux régionales derrière Renaud Muselier en Paca et la décision d’envoyer le décapant garde des Sceaux, Eric Dupond-moretti, sur le front électoral dans le Pas-de-calais et les Hauts-de-france en sont la preuve. Feu sur le RN, tel est le langage officiel. On peut le comprendre car les sondages montrent, pour l’heure, que le pays risque de connaître en  un remake de la présidenti­elle de , un nouveau face-à-face Macronle Pen, néanmoins plus incertain. Dans la manoeuvre, les Marcheurs espèrent aussi se renforcer sur leur droite aux dépens des Républicai­ns. Mais ce n’est pas tout ! Le chef de l’état sait bien qu’il n’est pas tout à fait à l’abri d’une mauvaise surprise au premier tour. Certes, les enquêtes d’opinion lui accordent aujourd’hui  à  % des intentions de vote et près de dix points d’avance sur Xavier Bertrand, président des Hauts-de-france, officielle­ment candidat à sa réélection mais aussi à l’élection présidenti­elle. L’écart est significat­if. Est-il suffisant pour avril prochain ? À l’évidence, Emmanuel Macron ne le pense pas. D’abord, parce que la crise sanitaire crée un réflexe de soutien au pouvoir en place qui peut être friable. Ensuite, parce que Xavier Bertrand a réussi ses premiers pas de candidat. Malgré une image plutôt sociale, il est entré en campagne très à droite, faisant de la sécurité son premier cheval de bataille. Manière d’envoyer un message fort aux électeurs LR tentés par le RN ou l’ayant déjà choisi. Ainsi agissait François Mitterrand. Avant de recentrer ses campagnes, il les abordait toujours par des propos très à gauche. Nul doute qu’après avoir essayé de cristallis­er l’électorat de droite le plus radical, Xavier Bertrand reviendra vers le centre. Enfin, il a une autre corde à son arc : il a choisi d’être le porte-parole de la France hors Paris et de défendre une République des territoire­s. Au jacobinism­e macronien, il oppose un girondisme bertrandie­n.

Le chef de l’état l’a compris et a vite réagi en accordant une interview au Figaro sur la sécurité, en annonçant de nombreux déplacemen­ts en province à partir du mois de juin, en envoyant le bretteur Eric Dupond-moretti démolir en fait Bertrand sur ses terres du Nord. Emmanuel Macron veut tuer dans l’oeuf son offensive présidenti­elle car il sait compter : si Xavier Bertrand lui grignote cinq points dans les  prochains mois, il peut se retrouver en grand danger.

« Malgré une image plutôt sociale, il est entré en campagne très à droite, faisant de la sécurité son premier cheval de bataille »

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