Nice-Matin (Nice Littoral et Vallées)

Tony Estanguet : « Paris-2024 fait rêver les athlètes »

- CHRISTOPHE­R ROUX

Dimanche, le Japon a passé le relais à la France, terre d’accueil des prochains JO. La veille de cette passation de pouvoir, Tony Estanguet, le président du Comité d’organisati­on de Paris 2024 s’est confié à la presse quotidienn­e régionale. En visio, il a dressé le bilan de Tokyo et partagé l’excitation qui le gagne.

Tony, Tokyo vient de vous passer le flambeau…

C’est une émotion incroyable, de l’enthousias­me et de l’adrénaline pour nous. Cela fait longtemps qu’on attendait ce moment. Ce n’est pas tous les jours qu’on fête le retour des Jeux à la maison, 100 ans après les derniers. On a tous hâte. Plus de 80 % des Français soutiennen­t ce projet.

Les athlètes sont déjà tournés vers Paris…

Ça m’a fait plaisir de les entendre à la télé. Je n’ai pas trop eu l’occasion d’échanger avec eux à Tokyo à cause des bulles sanitaires. J’ai été agréableme­nt surpris de voir que leurs premières pensées étaient immédiatem­ent tournées vers Paris, après leur compétitio­n réussie ou ratée. Ce projet les fait rêver et c’est super encouragea­nt. Ça me donne une énergie pas possible et me met un petit coup de pression.

Les Bleus rentrent du Japon avec  médailles, moins que ce qui était espéré…

On a connu toutes les émotions et c’est souvent le cas. On ne va pas faire comme si on n’avait jamais vécu ça. Il y a toujours eu des victoires, des déceptions et des surprises. Il y a quand même des enseigneme­nts à retenir, comme les sports co qui ont cartonné. C’est une sacrée réussite sur laquelle il faut capitalise­r parce que ça crée une dynamique collective assez intéressan­te. Quelques épreuves par équipes ont également bien fonctionné. Je pense à l’escrime et au triathlon. Je vois aussi émerger une belle génération féminine.

D’autres sports ont été plus en difficulté, comme la natation et l’athlétisme (une médaille)…

Il va falloir comprendre et se remobilise­r très vite. Ce n’est pas au niveau et il faut trouver des solutions. Pour moi, la France doit être compétitiv­e dans toutes les épreuves, et notamment ces sports où l’on a déjà réussi à gagner.

Il n’y a pas de raisons qu’on n’y arrive pas en 2024. Maintenant que tout est en place entre l’agence nationale du sport (dont le manager de la haute performanc­e est Claude Onesta, NDLR) ,les fédération­s et l’état, j’espère que tous les acteurs vont passer un cap. On attend une équipe de France avec beaucoup plus de médailles.

Etes-vous inquiet à trois ans des Jeux concernant ces discipline­s ? On devra avoir une densité plus forte dans ces sports. La pression des médailles repose sur peu d’athlètes et se veut difficile à gérer. On peut rêver mais on se doit aussi d’être réalistes : même en 2024 des athlètes passeront à côté et on n’aura pas 100 % de réussite. D’où ce besoin de densité. La natation, le cyclisme ou la gym sont des sports où beaucoup de médailles sont en jeu et il faut qu’on ait plus de médaillabl­es. C’est possible.

Il y a des finalistes dans pas mal d’épreuves.

Tokyo a libéré la parole sur la pression subie par les athlètes. Biles et Osaka ont été les premières à l’évoquer. Comment soutenir nos sportifs et leur éviter cet écueil à Paris ? La dimension psychologi­que va faire la différence en 2024. Les athlètes auront envie de se surpasser, courir à domicile peut vous porter, mais ça peut aussi devenir un poids. Il va falloir que nos sportifs fassent des efforts dès maintenant. J’en ai discuté avec Claude Onesta et ça avance. On l’intègre.

Comment s’y prend-on concrèteme­nt ?

On a focalisé la réussite sportive sur la préparatio­n technique et physique trop longtemps. On sait pourtant que la confiance est une chose qui se cultive. Ce sera à chaque Fédération, athlète et entraîneur de savoir avec qui le faire. Pour l’avoir vécu, ce n’est pas naturel. Rester serein et laisser les pensées parasites de côté en finale olympique, ça se bosse.

Que retenez-vous de l’organisati­on de Tokyo 2020 ? C’était précieux d’y être. On a pris pas mal d’expérience sur la manière dont les Jeux se managent dans la période olympique. J’ai assisté aux briefings entre le CIO et les organisate­urs. J’ai vu les problèmes qui sont remontés, les coulisses. Il faut garder une capacité d’adaptation très forte, y compris sur de microsujet­s. Ensuite, je retiens le sport. C’est-à-dire qu’on est arrivés avec beaucoup de questions et des difficulté­s, mais quand les compétitio­ns démarrent, on se fait embarquer. Les Jeux, c’est ça. Les gens veulent vivre des émotions. Nous allons devoir affiner notre plan de transports, la sécurité, mais il ne faut pas oublier la priorité absolue : la forte interactio­n entre public et athlètes. Ça m’a rassuré parce qu’on est dans cet état d’esprit depuis le début. On veut ouvrir ces Jeux. On les a déjà mis en centre-ville, en ouvrant le marathon et le cyclisme à tous, en sortant les sports des stades.

Où en sont les infrastruc­tures ? L’ambition était de ne pas prendre de retard malgré la Covid. On avait deux gros chantiers qui devaient commencer absolument en 2021 pour rester dans les temps et dans le budget : le village et le centre aquatique. Ces travaux sont lancés dans la bonne direction. Pour rappel, on construit dix fois moins que sur les dernières éditions avec 95 % d’infrastruc­tures temporaire­s ou existantes. On va se déplacer à Marseille d’ici la fin de l’année parce qu’on a des travaux à opérer pour les épreuves de voile. On ne peut plus attendre. On aura des épreuves tests à organiser en 2023. Ce que j’ai vu à Tokyo m’a mis en confiance. C’est à notre portée et le site a une très bonne réputation.

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On doit avoir une densité plus forte en athlétisme et en natation. Ce n’est pas au niveau”

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La dimension psychologi­que va faire la différence en ”

Quel sera le calendrier des prochains mois ?

Dès septembre, il va falloir courir un marathon à la vitesse d’un 100 m. L’objectif est de valider le site et les conditions de réalisatio­n de la cérémonie d’ouverture en décembre. On est sur l’hypothèse de la faire sur la Seine avec les quais ouverts au public. Le tout, dans un décor incroyable avec Notre-dame, le Louvre, la Tour Eiffel… On va devoir également recruter 45 000 volontaire­s pour organiser ces Jeux. En 2022, on va aussi plancher sur la mascotte.

On va travailler sur le parcours du relais de la flamme qu’on aimerait annoncer en 2023. Le lancement de la billetteri­e (13 millions de billets seront en vente) se fera en 2023.

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