Nice-Matin (Nice Littoral et Vallées)
« LE SENS C’EST LA BASE DE TOUT »
Bientôt de retour au cinéma, avec notamment Alors on danse de Michèle Laroque, Thierry Lhermitte était à Valberg pour une lecture dans le cadre du Festival des mots.
Longue silhouette déliée et lunettes légèrement fumées protégeant son regard bleu lagon, Thierry Lhermitte respire toujours l’élégance, à soixantehuit ans passés. Tout juste arrivé de l’aéroport de Nice, il fait halte au siège de notre journal avant de reprendre la route en direction de Valberg, où il s’apprête à faire une lecture le soir même.
Un village que le comédien, dont le dada est surtout l’équitation et qui ne raffole pas particulièrement du ski (contrairement aux Bronzés !), n’a pas encore eu le loisir de découvrir.
Une première donc, tout comme l’exercice consistant à faire une lecture à voix haute en public : « Je n’ai jamais joué en plein air, je ne sais pas ce que cela va donner ! Là, en l’occurrence, il s’agira d’un texte que j’ai déjà joué en 2019 à Paris, un mois en 2020, puis à l’occasion d’une tournée qui a été interrompue très rapidement à cause de la Covid. Un texte adapté d’un livre de Simon Wiesenthal, un chasseur de nazis. C’est lui qui a fait le centre de documentation sur leurs crimes à Vienne, en Autriche. Il a écrit ce livre, qui relate un événement qu’il a vécu pendant sa déportation. Et qui l’a interrogé pendant toute sa vie, car il est lié à la notion de pardon. »
Pardonner l’impardonnable
En juin 1942, à Lemberg, Simon Wiesenthal avait refusé son pardon à un jeune SS à l’agonie qui le lui demandait.
Depuis, obsédé par cette histoire,
il n’a eu de cesse de s’interroger : a-t-il eu raison ou bien tort ? Après son récit, douze personnalités morales qu’il a interpellées (parmi lesquelles Jacques Duquesne, Xavier Emmanuelli, Alfred Grosser, Edgar Morin, Matthieu Ricard, Simone Veil) se sont efforcées d’y répondre. Devait-il pardonner l’impardonnable ?
Une problématique passionnante, qui a immédiatement captivé l’acteur : « J’avais lu ce texte par intérêt personnel. Steve Suissa, le metteur en scène, l’avait lu aussi et je l’avais fait lire au producteur Jean-marc Dumontet qui l’a fait adapter. Ce qui est au coeur de ces écrits, c’est le pardon : qui, quand, comment, pourquoi, dans quelles circonstances, sous quelles conditions ? Avec ou sans le repentir du coupable ? Avec ou sans la justice ? »
Et de poursuivre : « Moi je ne suis pas sûr pour ce qui me concerne. Matthieu Ricard a dit : ‘‘Le pardon est indispensable à la vie en société, car il permet d’arrêter le cycle de la haine’’.
D’autres rétorquent : ‘‘Mais il y en a que cela arrange bien d’être pardonnés, comme ça ils peuvent recommencer !’’ C’est un thème très vaste et très profond, que j’ai envie de continuer à explorer avec le public. »
Pour Thierry Lhermitte, participer à un Festival des mots, cela renvoie aussi à l’idée que les mots sont sa base de travail. « Pour moi, dans le jeu, le sens est essentiel. C’est ce qui amène l’émotion, c’est que j’ai appris avec ma professeure Tsilla Chelton, et il n’y a rien d’autre qui dirige mon interprétation. Le sens. C’est la base de tout. »
Son appétence immodérée pour les mots et pour le théâtre lui est venue grâce à la troupe du Splendid : « Je m’intéressais surtout aux mathématiques, jusqu’à ce que je les rencontre ! »
Il faut faire confiance à la Science
Fortement engagé auprès de la Fondation pour la recherche médicale, le comédien fait cette piqûre de rappel : « Il faut faire confiance à la Science, la Science ce ne sont pas des discussions sur Facebook, mais du travail pied à pied. Les Français ont été très généreux pendant la Covid : s’agissant des recherches financées par la Fondation pour la recherche médicale, au lieu des deux-trois millions attendus, six millions ont été récoltés. Sur la quarantaine de projets en cours, dix-huit ont déjà eu des résultats significatifs. C’est grâce à la science qu’on s’en sortira, pas à des idioties qu’on lit à droite à gauche. Brandir par exemple telle ou telle étude, c’est méconnaître la nécessité qu’elle soit vérifiée et confirmée par d’autres. »
Côté cinéma, il est toujours à l’affiche de Mystères à Saint-tropez de Nicolas Benamou. On le découvrira bientôt dans A nos âges de Robin Sykes aux côtés de Patrick
Timsit, dans le film de et avec Michèle Laroque Alors on
danse, à nouveau avec Patrick Timsit, dans Hommes au bord de la crise de nerfs d’audrey Dana, et
enfin dans Joyeuse retraite ! 2, une fois de plus avec Michèle Laroque!
Vous l’aurez compris, le sémillant Thierry Lhermitte n’est pas près de prendre sa retraite. Mais il affiche clairement la volonté de continuer longtemps à nous divertir, pour notre plus grand plaisir, tout en faisant passer certains messages au passage !
« Les Français ont été très généreux avec la Fondation pour la recherche médicale »