Nice-Matin (Nice Littoral et Vallées)

Il séduisait des homosexuel­s à Nice pour les dépouiller sous la menace

- CHRISTOPHE CIRONE ccirone@nicematin.fr

C’est un drame en trois temps : séduction, ruse, violence. » Le procureur Thibault Rossignol plante le décor. Un « dossier assez surprenant » se présente au tribunal correction­nel de Nice, vendredi dernier. Une affaire d’agressions ciblées sur des homosexuel­s, appâtés via des sites de rencontres. À l’audience, ni victimes, ni prévenu. Mais l’enjeu est bien présent.

Devadipi Hoffer Barbosa, Capverdien de 38 ans, est resté aux États-unis, où il s’est établi. Loin de Nice, où deux hommes lui reprochent des faits d’extorsion et de vols avec violences. Ces faits remontent à fin 2016. Ils suivent un mode opératoire en tous points similaire.

Site de rencontre

La première victime a fait sa connaissan­ce via un site de rencontres. Elle donne rendez-vous chez elle à ce « Strong 1983 », son pseudo en ligne. Un rapport sexuel se noue. Soudain, changement de ton. Le visiteur sort une bombe lacrymogèn­e. Il impose à son hôte de rester sur le lit sans bouger. Il tient en outre un couteau avec une lame de 25 centimètre­s.

« Un coup de coude lui fait sauter sept dents ! »

L’agresseur fait alors « une razzia» dans l’appartemen­t, selon Me Christophe Petit, l’avocat de la partie civile. Lunettes, montre, chevalière, appareils multimédia­s... Le jeu de séduction a fait place à l’extorsion. Mais la victime se rebelle. Une lutte s’engage. La victime reçoit un « coup de coude à la bouche qui lui fait sauter sept dents ! » Elle présente aussi une trace de lacération à la cuisse.

La seconde agression suit un scénario similaire. Cette fois, le visiteur a pris pour pseudo le peu équivoque « Barbosa ». Là encore, la victime est dépouillée à son domicile, sous la double menace d’une bombe lacrymogèn­e et d’un couteau. L’enquête de police permettra d’interpelle­r Devadipi Hoffer Barbosa à son domicile, en centrevill­e. « Ça faisait un an que j’étais à Nice, expliquera-t-il en garde à vue. J’arrivais pas à me stabiliser. J’avais rencontré quelqu’un de mauvais qui m’a donné cette idée-là. » Pour autant, il conteste certaines accusation­s. Le couteau ? « Je ne l’ai pas sorti. » La blessure à la cuisse ? « Il a dû se blesser. »

« Couteau sous la gorge »

Pas de quoi rassurer le procureur. Thibault Rossignol dénonce « un mode opératoire très violent », « un certain détachemen­t des faits », et un sens manifeste de la manipulati­on. «Il met une photo très flatteuse sur les réseaux sociaux, envoie des photos de son anatomie, cherche à mettre en confiance, à tromper. » À l’arrivée, une victime dira s’être retrouvée nue, « un couteau sous la gorge ». En prime, un étudiant partira en garde à vue par sa faute : Devadipi Hoffer Barbosa avait emprunté son téléphone portable pour contacter une victime.

« Un prédateur qui prend énormément de précaution­s ? » Son avocate, Me Mathilde Dominiak, en doute fort. « Il utilise comme profil « Barbosa », utilise [aussi] son propre téléphone, donne son adresse... » À cette époque, son client était « dans une situation de perdition totale ». Depuis, «il n’a jamais fait parler de lui, s’est marié, a eu deux enfants... »

Le procureur requiert 8 mois de prison ferme. Le tribunal présidé par Christian Legay a la main plus lourde : un an de prison. Il ordonne une expertise pour la première victime, condamne le prévenu à verser 400 euros pour le préjudice matériel et 5 000 euros de provision sur le préjudice corporel. Pour bénéficier d’un aménagemen­t de peine, l’ex-agresseur devenu père de famille devra se présenter de ce côté-ci de l’atlantique.

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