Nice-Matin (Nice Littoral et Vallées)

Notre avis

- MATHIEU FAURE

> D’ali Abbasi

Avec Mehdi Bajestani, Zar Amir Ebrahimi, Arash Ashtiani. Durée : 1 h 56

Genre : Thriller.

Notre avis :

Présenté en compétitio­n officielle au Festival de Cannes, le film d’ali Abbasi, Holy Spider ou Les Nuits de Mashhad, n’a pas été tourné en Iran. Compte tenu du propos – l’histoire vraie d’un tueur en série qui, en 2001, assassine seize prostituée­s dans la cité sainte de Mashhad – il semblait difficile pour Ali Abbasi, le réalisateu­r de Border et du très attendu The Last Of Us, de raconter cette histoire depuis son pays de naissance. En tournant en Jordanie, Abbasi a pourtant réussi son tour de force. Rarement le rituel d’un tueur en série avait été filmé et raconté avec autant de cruauté, de froideur, de violence, de détails et d’authentici­té. La première demi-heure, qui permet d’installer le rituel brutal du tueur-araignée – un simple maçon, religieux et ancien combattant (brillant Mehdi Bajestani) – nous plonge dans le sujet sans détour. Il y a, un peu, du Seven de David Fincher dans cette ouverture magistrale. Chaque détail est précis. Minutieux. Étudié. Le cinéma iranien, couronné en début d’année aux César avec le puissant film de Saeed Roustayi La Loi de Téhéran, confirme qu’il n’a plus peur de se regarder dans la glace pour y dépeindre une société malade, droguée, misogyne et hautement religieuse au sein de laquelle la femme est reléguée au second plan. Sur ce dernier point, Abbasi fait tout l’inverse puisqu’il fait de la Franco-iranienne Zahra Amir Ebrahimi son héroïne. Seule, déterminée, révoltée, la jeune journalist­e jouée par l’actrice de 40 ans, logiquemen­t récompensé­e par le Prix d’interpréta­tion au dernier Festival de Cannes, est le point de bascule d’une enquête qui, jusqu’à son arrivée, n’avançait pas. Après tout, qui s’intéresse au sort des femmes peu vertueuses dans une ville sainte d’une théocratie islamique du début des années 2000 ? « Ce n’est pas un film sur un tueur en série mais sur une société qui tue, et pas seulement en Iran, étayait Ali Abbasi face à la presse lors de la quinzaine cannoise. Je ne pense que pas que ce sujet soit seulement lié à la société iranienne, l’europe est également très concernée par le féminicide ».

Abbasi aborde également deux autres tabous iraniens : les fondamenta­listes et les vétérans de la guerre entre l’iran et l’irak (1980-1988), mais il pointe surtout du doigt la société iranienne dans son ensemble. Un récit osé, notamment pour Mehdi Bajestani, immense vedette en Iran, qui prend des risques considérab­les avec son rôle de serial killer

fondamenta­liste.

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