Nice-Matin (Nice Littoral et Vallées)

Trente ans de réclusion pour le meurtrier de Laëtitia

La cour d’assises du Var a suivi les réquisitio­ns de l’avocate générale mais n’a pas prononcé de peine de sûreté à l’encontre de Mickaël Reynaud.

- V. W.

Ce soir, demain ou la semaine prochaine, Émilie se rendra sur les hauteurs du mont Faron. Comme elle en a pris l’habitude depuis bientôt trois ans, la jeune femme se tiendra au sommet de la falaise au pied de laquelle le corps sans vie de sa soeur Laëtitia a été retrouvé le 23 janvier 2020.

Seule face au vide, elle lui parlera. Une nouvelle fois. Lui annoncera que son meurtrier, Mickaël Reynaud, a été condamné à 30 ans de réclusion criminelle par la cour d’assises du Var (lire nos éditions précédente­s).

« On l’appelait la petite perle »

Mais qu’en revanche, contrairem­ent à ce que souhaitait l’avocate générale, aucune peine de sûreté ni suivi sociojudic­iaire n’a été prononcé. Si rien ni personne ne pourra faire revenir Laëtitia Hemery, et si le procès qui s’est tenu cette semaine à Draguignan ne clôt que le versant judiciaire de son décès et n’a « aucune vocation à une quelconque vertu thérapeuti­que auprès de la partie civile », comme le répète régulièrem­ent le président Patrick Véron, il aura au moins permis de faire revivre par instants le souvenir de cette mère de famille de 31 ans.

Une mère bien loin du portrait dressé dans les innombrabl­es messages dégradants envoyés par Mickaël Reynaud durant leur relation. « C’était une femme courageuse et discrète, se souvient une ancienne collègue de travail. Entre nous, on l’appelait la petite perle. Elle se donnait à fond pour ses quatre enfants. Après des périodes difficiles, elle voulait les sortir de la précarité. » Laëtitia, quelques mois avant sa mort, avait ainsi décroché un CDI comme femme de chambre dans un hôtel proche de Brignoles. « Elle s’y rendait en scooter, qu’il vente ou qu’il pleuve. Elle n’a jamais manqué un jour. Et pourtant, le travail n’est pas facile. »

« Elle l’aimait par peur »

Mais même là, Mickaël Reynaud rodait. L’espionnait. « Une fois, Laëtitia l’a vu sur le parking et, paniquée, s’est enfermée dans une chambre. On savait ce qu’elle vivait. De toute façon, elle avait beau tenter de cacher les marques avec des foulards, on voyait bien les hématomes… On l’a incitée à porter plainte. Ce qu’elle a fait. En réalité, elle l’aimait par peur. » Mère à 15 ans, en rupture parfois avec ses parents, Laëtitia « finissait toujours par revenir dans le giron familial ».

« Ses petits hommes »

« Elle prenait souvent de mauvaises décisions sentimenta­les, explique sa soeur cadette. Je pense qu’elle trouvait une certaine normalité dans un schéma de relation instable. Du coup, cela nous contrariai­t. Et on se fâchait. » Au moment de son décès, cela faisait cinq ans qu’émilie n’avait plus adressé la parole à Laëtitia.

Mais à voir la maturité de ses quatre enfants – « [ses] petits hommes » –, aux discours empreints de sagesse à la barre, ambitieux quant à leur avenir, difficile de ne voir en Laëtitia Hemery qu’un souvenir. Tout cela, Émilie lui dira bientôt. Ce soir, demain ou la semaine prochaine.

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(Photo DR) La famille de Laëtitia Hemery a tenu à montrer lors de ce procès la mère aimante et attentionn­ée qu’était la jeune femme.

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