Nice-Matin (Nice Littoral et Vallées)
Grève chez Totalenergies : face à la pénurie, l’état met la pression
Élisabeth Borne puis Emmanuel Macron ont appelé hier directions et syndicats des groupes pétroliers à sortir de la crise qui provoque depuis plusieurs jours de graves problèmes d’approvisionnement.
Pas de panique », a lancé hier en fin d’après-midi Emmanuel Macron, à propos des grèves dans des groupes pétroliers qui provoquent depuis quelques jours de graves problèmes d’approvisionnement en carburants. « Je sais l’inquiétude qu’il y a chez beaucoup de nos compatriotes. Je veux ici vraiment avoir un message d’appel au calme , a déclaré le Président à l’issue d’un sommet européen informel à Prague. J’appelle aussi chacune et chacun à la responsabilité. (...) Toutes les revendications salariales sont légitimes, mais il ne faut pas qu’elles empêchent les uns et les autres de vivre et de pouvoir circuler ».
« J’appelle vraiment à la responsabilité les directions et les représentants des salariés de ces entreprises pour que ces négociations salariales (puisque c’est de ça qu’il s’agit) aboutissent et ne pénalisent pas les Français », avait déclaré un peu plus tôt la première ministre Élisabeth Borne. De nombreux ministres ont également tenté de raisonner les acteurs du conflit et notamment Totalenergies. « J’appelle les entreprises concernées, qui, pour la plupart, ont quand même de bons résultats, à considérer aussi les demandes d’augmentation de salaire », a ainsi déclaré Olivia Grégoire, ministre déléguée aux Petites et moyennes entreprises, sur Franceinfo, sans citer nommément Totalenergies et ses 10,6 milliards de dollars de bénéfice au premier semestre. Le PDG Patrick Pouyanné ne s’est pas exprimé publiquement sur la grève, mais dans une vidéo interne au groupe mardi, il a reconnu : « Les résultats de la Compagnie sont exceptionnels en 2022 et nous ne vous oublierons pas ». « Tous les collaborateurs, tous nos collègues recevront leur juste récompense sur leur fiche de paie avant la fin de l’année », a promis Patrick Pouyanné, leur assurant qu’ils étaient « prioritaires dans le partage de la prospérité ». Alors que la CGT réclame 10 % d’augmentation sur 2022 (7 % pour l’inflation, 3 % pour « le partage de la richesse »), la direction rappelle depuis le début qu’elle a octroyé des mesures salariales représentant une augmentation moyenne de 3,5 % en 2022, et renvoie à une séance de négociations prévue le 15 novembre... pour les salaires de 2023.
15 % des stations-services concernées par un manque d’un ou plusieurs carburants
Aux dernières nouvelles, elle semblait inflexible sur ce calendrier et réticente à revenir dans l’immédiat à la table des négociations.
La plus grande raffinerie de Totalenergies, près du Havre (Seine-maritime), est à l’arrêt. D’autres sites du groupe sont en grève. Et les deux raffineries françaises de son concurrent américain Esso-exxonmobil sont aussi à l’arrêt, dans les deux cas à l’appel de la CGT, afin d’obtenir une hausse des salaires. Les camions-citernes seront exceptionnellement autorisés à circuler demain pour livrer les stations, a annoncé le ministre délégué aux Transports, Clément Beaune. Chez le pétrolier français, outre sa raffinerie de Normandie, les grévistes étaient massivement mobilisés au dépôt de carburants de Flandres, près de Dunkerque (Nord), à la « bio-raffinerie » de La Mède (Bouches-du-rhône) et au dépôt de carburants de Grandpuits (Seine-et-marne) notamment, pour limiter au maximum la sortie de produits pétroliers, selon la CGT. Les blocages des grévistes entraînent une baisse des livraisons de carburant, les stations-services sont donc plus souvent en rupture de stocks d’essence ou de diesel. Totalenergies gère près du tiers des stations françaises. Actuellement, 15 % des stations-services sont concernées par un manque d’un ou plusieurs carburants, selon un chiffre cité par plusieurs ministres. Afin d’apaiser la situation, le gouvernement a activé l’utilisation des stocks stratégiques de l’état, dans les régions les plus affectées.