Nice-Matin (Nice Littoral et Vallées)
« Logements, commerces, hôtels » : le triptyque vital
Jean-françois Dieterich, élu pour la première fois en 2014, gère Saint-jeancap-ferrat, village de pêcheurs devenu presqu’île des milliardaires qui ne veut pas perdre son âme.
Son arrière-grand-père maternel était conseiller municipal de Saint-jean. Son grandpère, maire de 1977 à 1983. Du côté de sa famille paternelle, alsacienne, il y a eu sept ou huit générations de maires. « Peut-être qu’il y a un peu d’atavisme », sourit Jean-françois Dieterich réélu en 2020 pour son deuxième mandat. Élu sans étiquette, il se tient loin des querelles qui secouent les Alpes-maritimes. « Je fais de l’intérêt général, pas de la politique. Pour gérer une commune, il ne faut pas faire de politique. » Négocier au lieu de s’engager dans de longues batailles judiciaires, discuter pour avancer. Il livre sa vision du rôle de premier magistrat et détaille ses projets pour le village.
Vous êtes le maire d’une des communes où le m2 est le plus cher de France, comment garder des Saint-jeannois et l’âme du village ?
C’est là où doivent intervenir les politiques pour maintenir cet habitat sur place. Sur le mandat précédent, j’ai transformé un certain nombre de bâtiments communaux qui étaient en désaffection totale en appartements à la location pour actifs. J’en ai livré 25 sur la première mandature. On en livre une dizaine sur la seconde. Nous avons aussi 118 logements sociaux. L’idée, c’est de loger les Saint-jeannoises et les Saintjeannois, de permettre la scolarisation des enfants et de faire travailler le commerce du village. Ce qui est fondamental : il n'y a pas de village s’il n’y a pas de commerce. Et il n’y a pas de village s’il n'y a pas d’hôtels. C’est le triptyque qu’il faut absolument développer.
Comment faites-vous ?
J’ai mis en place, en 2014, un droit de préemption commercial pour maintenir les commerces de détail et de première nécessité. Après le départ des exploitants, une vente était en cours et cette boucherie allait se transformer en bureaux. J’ai agi, j’ai acheté, j’ai mis un gérant et au bout de deux ans, la commune lui a revendu le fonds.
Vous évoquez l’importance de l’hôtellerie. Ou en est le chantier de la Voile d’or ?
Il n’a toujours pas commencé. Cet hôtel a été vendu en 2019 à un groupe russe, un permis a été accordé en mai 2021 pour sa rénovation complète. Mais le conflit a tout mis à l’arrêt. Les propriétaires cherchent des financements. Compte tenu de leur nationalité, c’est aujourd’hui compliqué. Je ne sais pas comment ça va évoluer. Il faut souhaiter que la diplomatie reprenne ses droits et que ce conflit s’arrête.
Il y a aussi un problème lié à l’évacuation des gravats… Ce n’est plus un problème.
L’évacuation devait se faire par voie maritime. Il semble que la préfecture ait mis son veto pour préserver les posidonies.
Il y a aussi le risque lié aux coups de mer. L’évacuation se fera par voie terrestre tout en préservant les tonnages. Une solution a été plus ou moins finalisée.
C’est un gros chantier. Une telle noria de camions ne risque-telle pas d’entraîner des nuisances ?
Inévitablement. Mais cet hôtel n’avait pas été rénové depuis 1964. C’est un équipement essentiel au coeur même du village. Il y avait le besoin de réaliser des travaux pour répondre aux attentes de la clientèle. Dans le même esprit, nous avons modifié le plan local d’urbanisme pour que les huit hôtels de la commune restent des hôtels. J’y tiens.
Comment s’est passée cette saison estivale particulière ? Étonnamment bien. Très bien même. Les taux de remplissage de l’hôtellerie/restauration étaient de 82 à 95 % de juin à septembre. Même au mois de mai les chiffres étaient plus que bons. Notamment grâce à une forte fréquentation des Français après deux ans de privation de liberté à cause du Covid. On note aussi un retour des Américains.
Quid des Russes et des Ukrainiens ? La cohabitation est-elle compliquée ?
Nous n’avons pas de problème. Évidemment les Russes sont moins présents et il y a beaucoup d’ukrainiens. Tout cela cohabite et s’intègre.
‘‘ Il faut que le conflit s’arrête”