Nice-Matin (Nice Littoral et Vallées)

« On sait qu’on fait un métier à risque » : le quotidien difficile d’inspecteur des impôts

- MATHILDE TRANOY mtranoy@nicematin.fr

« On est dans l’émotion », souffle, au téléphone, Odile Girard-pagola, secrétaire départemen­tale de la CGT finances publiques des Alpes-maritimes, dont la voix se brise en évoquant l’assassinat de l’agent et l’agression de la vérificatr­ice qui l’accompagna­it. Elle a rendu visite hier matin à ses collègues de la brigade de vérificate­urs (agents qui réalisent les contrôles externes) de l’antenne de Grasse.

« On sait qu’on fait un métier à risque. Mais mourir pour son métier, c’est quelque chose qu’on n’a pas vraiment envisagé », résume-t-elle. Lors d’un contrôle fiscal, « nous intervenon­s seul, sauf en Corse où il a été demandé de se déplacer en binôme. Dans le Pas-decalais, la vérificatr­ice, ne sentant pas le contribuab­le, a probableme­nt demandé à son supérieur de venir avec elle. Et c’est lui qui est mort. Souvent, le contribuab­le est accompagné de son comptable le jour du rendez-vous. Ce qui n’était pas le cas dans cette affaire, or, c’est bien qu’il y ait une tierce personne en cas de contrôle tendu », commente Odile Girard-pagola.

« Quand le contribuab­le est trop menaçant, on essaie de le convier au bureau. Même si on est seul avec lui dans le bureau, on n’est pas isolé. On se sent moins vulnérable », poursuit-elle.

« Je gare la voiture loin du lieu de rendez-vous »

Le métier est-il dangereux ? Les agents se sentent-ils parfois en danger sur le terrain ? « Ben oui », répondent en choeur les vérificatr­ices de l’antenne de Grasse. « Je gare la voiture loin du lieu de rendez-vous pour ne pas que le contribuab­le me suive, relève la plaque d’immatricul­ation et me retrouve », explique l’une d’elles. « Lors de l’entretien, on essaie d’être discret sur notre vie privée, de ne pas donner d’élément susceptibl­e de révéler où on habite », ajoute une autre. « On a souvent des remarques sur le fait qu’on est là pour enfoncer les entreprise­s, déplore l’élue CGT. Alors qu’on est juste là pour appliquer la loi qui a été votée par des élus de la République. Les politiques ne nous aident pas, surtout ceux qui véhiculent le message qu’en France on paie trop d’impôts. On ne se sent pas soutenus. Nous n’avons pas constaté de hausse de l’agressivit­é ni des violences verbales et physiques en cette période de crise économique. Mais le consenteme­nt à l’impôt est en régression. »

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