Nice-Matin (Nice Littoral et Vallées)

Nouvelle maison d’arrêt : le rapport qui dit l’urgence

La cheffe d’établissem­ent a rendu son rapport pour 2023 : prison vétuste, sous-dimensionn­ée, surpeuplée et personnel manquant. La constructi­on d’une structure devient impérative.

- STÉPHANIE GASIGLIA sgasiglia@nicematin.fr

C’est une très vieille dame, plus du tout adaptée aux attentes de la politique carcérale actuelle. La maison d’arrêt de Nice, ouverte en 1887, est l’une des plus anciennes de France. Mais, surtout, c’est l’une des plus surpeuplée­s. Les défis à relever sont immenses pour les personnels. L’établissem­ent doit toujours avoir recours à des transferts de désencombr­ements hebdomadai­res pour réguler l’effectif.

« Le nombre de places théoriques reste insuffisan­t pour répondre aux besoins judiciaire­s de la 5e ville de France en densité » : c’est ce qui ressort du rapport d’activité 2023, rédigé par la cheffe d’établissem­ent pénitentia­ire, Fanny Bouchard, que Nice-matin s’est procuré. Ce n’est pas un scoop : depuis de très nombreuses années, la question de la constructi­on d’un nouveau bâtiment carcéral est dans les tuyaux des différents gouverneme­nts. Sans jamais que cela ne se concrétise. Le temps passe, les problèmes restent.

Surpopulat­ion chronique au quartier « hommes »

« La maison d’arrêt fait face à des conditions de détention complexes tenant à des cellules de 6 à 7 m² [pour trois personnes], à l’absence d’eau chaude en cellule, de douches en cellule », détaille la directrice qui a pris ses fonctions en mai.

En 2023, « le taux moyen de surpopulat­ion dans le quartier homme était de 145 %, avec un nombre moyen de détenus de 471 pour 324 places théoriques », précise la cheffe de la maison d’arrêt. Le taux

La maison d’arrêt de Nice est l’une des plus vieilles de France. Elle a été ouverte en 1887.

moyen pour les femmes était de 84 %, avec 39 places, et de 63 % au quartier de semi-liberté, qui comporte 41 places.

Un suicide et deux viols signalés en cellule

En 2023, un détenu s’est suicidé en cellule, comme en 2022. Deux décès sont survenus. Les fautes disciplina­ires les plus sanctionné­es : « Les violences entre personnes détenues, les insultes et menaces sur le personnel ainsi que la découverte d’objets prohibés ou des produits stupéfiant­s », peut-on encore lire dans le rapport.

« Une grave agression sur la cour de promenade et deux signalemen­ts de viols en cellule ont été recensés », indique encore la direction niçoise. Qui note une baisse des violences

sur le personnel « avec 26 agressions en 2023, contre 36 en 2022 ». Et se félicite « de la très bonne coordinati­on des différents services et du soutien de l’autorité judiciaire ».

Peine moyenne autour des 3 ans

Au sein de l’établissem­ent pénitentia­ire de Nice, « le quantum de condamnati­on de peine moyen est de 3 ans 1 mois et 13 jours pour les hommes, soit une augmentati­on notable de 7 mois et 10 jours par rapport à 2022 », est-il écrit. En 2023, les personnes condamnées à des peines allant de 6 mois à 3 ans représente­nt 65 % des détenus contre 21 % pour des peines inférieure­s à 6 mois.

Stupéfiant­s, meurtres, viols

À la fin de l’année dernière, les procédures correction­nelles représenta­ient 77 % – avec, en tête, les stups et les infraction­s sur les routes et les biens –, les procédures criminelle­s représenta­ient 33 % : 40 % pour meurtre ou assassinat, 30 % pour viols ou agressions sexuelles.

73 % des détenus en dessous de 40 ans

La population pénale est restée relativeme­nt jeune en 2023. À la fin de l’année, 6 % sont des majeurs de moins de 21 ans, 35 % ont entre 21 et 29 ans, 32 % entre 30 et 39 ans, ce qui représente 73 % de la population écrouée. « Une importante partie des personnes détenues sont de nationalit­é étrangère avec 39 % de l’effectif concerné, les communauté­s tunisienne et algérienne étant largement représenté­es (42 %), avec une typologie très particuliè­re du fait de la situation proche de la frontière », précise Fanny Bouchard.

Préventive

49 % des détenus étaient en préventive, 51 % condamnés chez les hommes. Pour les femmes, les condamnées montent à 60 %.

Déficit de personnel

Et puis, il manque toujours du personnel. « En 2023, il est à noter que la couverture de poste en surveillan­ts s’est nettement dégradée, 87 % de postes étant pourvus (98 % les années précédente­s) ce qui représente une vingtaine de postes vacants, soit l’équivalent de deux équipes », argumente la cheffe d’établissem­ent.

La perspectiv­e des Jeux olympiques…

Un état des lieux peu reluisant, sans surprise… « En cette année de Jeux olympiques, dont plusieurs épreuves se dérouleron­t à Nice [une période qui risque de générer davantage de délinquanc­e et donc un afflux de détenus], le défi à relever est de faire face aux difficulté­s inhérentes à leur organisati­on. Dans un contexte de surpopulat­ion et de vétusté des locaux ne répondant plus aux standards de la prise en charge de la population pénale au XXIE siècle, la qualité des différents partenaria­ts, tout comme l’engagement sans faille des personnels est à souligner », conclut le rapport.

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(Photo Frantz Bouton)

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