Nice-Matin (Nice Littoral et Vallées)
Nouvelle maison d’arrêt : le rapport qui dit l’urgence
La cheffe d’établissement a rendu son rapport pour 2023 : prison vétuste, sous-dimensionnée, surpeuplée et personnel manquant. La construction d’une structure devient impérative.
C’est une très vieille dame, plus du tout adaptée aux attentes de la politique carcérale actuelle. La maison d’arrêt de Nice, ouverte en 1887, est l’une des plus anciennes de France. Mais, surtout, c’est l’une des plus surpeuplées. Les défis à relever sont immenses pour les personnels. L’établissement doit toujours avoir recours à des transferts de désencombrements hebdomadaires pour réguler l’effectif.
« Le nombre de places théoriques reste insuffisant pour répondre aux besoins judiciaires de la 5e ville de France en densité » : c’est ce qui ressort du rapport d’activité 2023, rédigé par la cheffe d’établissement pénitentiaire, Fanny Bouchard, que Nice-matin s’est procuré. Ce n’est pas un scoop : depuis de très nombreuses années, la question de la construction d’un nouveau bâtiment carcéral est dans les tuyaux des différents gouvernements. Sans jamais que cela ne se concrétise. Le temps passe, les problèmes restent.
Surpopulation chronique au quartier « hommes »
« La maison d’arrêt fait face à des conditions de détention complexes tenant à des cellules de 6 à 7 m² [pour trois personnes], à l’absence d’eau chaude en cellule, de douches en cellule », détaille la directrice qui a pris ses fonctions en mai.
En 2023, « le taux moyen de surpopulation dans le quartier homme était de 145 %, avec un nombre moyen de détenus de 471 pour 324 places théoriques », précise la cheffe de la maison d’arrêt. Le taux
La maison d’arrêt de Nice est l’une des plus vieilles de France. Elle a été ouverte en 1887.
moyen pour les femmes était de 84 %, avec 39 places, et de 63 % au quartier de semi-liberté, qui comporte 41 places.
Un suicide et deux viols signalés en cellule
En 2023, un détenu s’est suicidé en cellule, comme en 2022. Deux décès sont survenus. Les fautes disciplinaires les plus sanctionnées : « Les violences entre personnes détenues, les insultes et menaces sur le personnel ainsi que la découverte d’objets prohibés ou des produits stupéfiants », peut-on encore lire dans le rapport.
« Une grave agression sur la cour de promenade et deux signalements de viols en cellule ont été recensés », indique encore la direction niçoise. Qui note une baisse des violences
sur le personnel « avec 26 agressions en 2023, contre 36 en 2022 ». Et se félicite « de la très bonne coordination des différents services et du soutien de l’autorité judiciaire ».
Peine moyenne autour des 3 ans
Au sein de l’établissement pénitentiaire de Nice, « le quantum de condamnation de peine moyen est de 3 ans 1 mois et 13 jours pour les hommes, soit une augmentation notable de 7 mois et 10 jours par rapport à 2022 », est-il écrit. En 2023, les personnes condamnées à des peines allant de 6 mois à 3 ans représentent 65 % des détenus contre 21 % pour des peines inférieures à 6 mois.
Stupéfiants, meurtres, viols
À la fin de l’année dernière, les procédures correctionnelles représentaient 77 % – avec, en tête, les stups et les infractions sur les routes et les biens –, les procédures criminelles représentaient 33 % : 40 % pour meurtre ou assassinat, 30 % pour viols ou agressions sexuelles.
73 % des détenus en dessous de 40 ans
La population pénale est restée relativement jeune en 2023. À la fin de l’année, 6 % sont des majeurs de moins de 21 ans, 35 % ont entre 21 et 29 ans, 32 % entre 30 et 39 ans, ce qui représente 73 % de la population écrouée. « Une importante partie des personnes détenues sont de nationalité étrangère avec 39 % de l’effectif concerné, les communautés tunisienne et algérienne étant largement représentées (42 %), avec une typologie très particulière du fait de la situation proche de la frontière », précise Fanny Bouchard.
Préventive
49 % des détenus étaient en préventive, 51 % condamnés chez les hommes. Pour les femmes, les condamnées montent à 60 %.
Déficit de personnel
Et puis, il manque toujours du personnel. « En 2023, il est à noter que la couverture de poste en surveillants s’est nettement dégradée, 87 % de postes étant pourvus (98 % les années précédentes) ce qui représente une vingtaine de postes vacants, soit l’équivalent de deux équipes », argumente la cheffe d’établissement.
La perspective des Jeux olympiques…
Un état des lieux peu reluisant, sans surprise… « En cette année de Jeux olympiques, dont plusieurs épreuves se dérouleront à Nice [une période qui risque de générer davantage de délinquance et donc un afflux de détenus], le défi à relever est de faire face aux difficultés inhérentes à leur organisation. Dans un contexte de surpopulation et de vétusté des locaux ne répondant plus aux standards de la prise en charge de la population pénale au XXIE siècle, la qualité des différents partenariats, tout comme l’engagement sans faille des personnels est à souligner », conclut le rapport.