Nice-Matin (Nice Littoral et Vallées)
Européennes : les grandes ambitions des petites listes
Trente-sept listes sont en lice pour le scrutin du 9 juin. La plupart d’entre elles ne franchiront pas le seuil de 5 % qui permet d’obtenir des élus au Parlement de Strasbourg. Mais peu leur importe !
Le nombre de candidats en lice pour les Européennes est inversement proportionnel à l’intérêt manifesté par les électeurs français : trente-sept listes, trois de plus qu’en 2019, ont été validées samedi par le ministère de l’intérieur. Record battu. Cette inflation s’explique par des conditions d’éligibilité relativement peu contraignantes. Nul besoin, comme pour la Présidentielle, de recueillir 500 parrainages d’élus issus d’au moins trente départements ou collectivités d’outre-mer différents. Il suffit de trouver 81 quidams prêts à s’engager sous la même bannière. À côté des « grands » partis, qui se disputent les places au Parlement de Strasbourg, cohabitent ainsi des formations plus confidentielles… et de parfaits inconnus.
Promises à des scores faméliques, mais…
La plupart des postulants savent que le seuil des 5 % des suffrages exprimés, nécessaire pour transformer un colistier en eurodéputé, est hors de portée. Dépasser les 3 % requis pour obtenir le remboursement des frais de campagne est un objectif à peine plus crédible.
Sans moyens financiers (lire cidessous), ni quasiment aucun accès aux médias, ces « petites » formations semblent promises à des scores faméliques. En 2019, douze d’entre elles avaient récolté moins de 10 000 bulletins. La moitié des 34 listes en compétition avaient glané moins de 50 000 voix chacune. Au total, 21 listes étaient restées sous la barre des 1 %. Pour autant, leur présence n’est pas neutre. Il y a cinq ans, les 28 listes qui n’avaient pas atteint les 5 % avaient séduit près d’un votant sur cinq (19,78 %). Les voix grappillées ici ou là, de l’extrême gauche à l’extrême droite, peuvent impacter les « grands » partis.
Faire entendre leur différence
L’objectif principal revendiqué par ces candidats de l’ombre est de faire entendre leur différence. « Nous utilisons ces élections comme une chambre d’échos, confiait Nathalie Arthaud, porte-parole de Lutte ouvrière, lors de son passage à Nice mercredi dernier. C’est l’occasion de rencontrer nos militants, de les mobiliser pour les luttes à venir. Mais Strasbourg… Franchement, qu’est-ce que nous aurions à y faire ? »
Cette tendance semble se renforcer cette année, avec plusieurs listes focalisées sur une cause unique : pour les animaux, les droits des enfants, le fédéralisme européen, la ruralité ou l’espéranto. Cette catégorie englobe aussi bien François Asselineau, chantre du « Frexit » en lice pour la troisième fois, que Nagib Azergui, leader de Free Palestine.
La plus insolite
Le cru 2024 propose également une papardelle de listes aux intitulés mystérieux, portées par des chefs de partis obscurs, des responsables associatifs ou des « membres de la société civile ». Citons pour l’exemple « Nous le peuple » de Georges Kuzmanovic, ou « Pour une autre Europe » de Jean-marc Fortané. La palme de l’intitulé le plus insolite revient à un certain Édouard Husson : « Non ! Prenons-nous en mains ».
On se souvient qu’en 2019, trois listes issues du mouvement des Gilets jaunes avaient séduit 1,2 % des électeurs. Rien de tel cette année. Mais les complotistes, eux, auront leur porte-parole : le chanteur Francis Lalanne, avec son parti L’union de la Résistance, promeut la liste « France libre ».
Libre, peut-être, de couper le son lorsqu’il passe à la radio ?