PERFORMA, FESTIVAL DE PERFORMANCES
01 NEW YORK
PERFORMA a été créée en 2004. Cette biennale new-yorkaise dédiée à la performance et aux arts de la scène est née d’un constat, celui de l’historienne de l’art, critique et conservatrice Roselee Goldberg. Celle-ci s’est aperçue que le New York qu’elle avait connu à la fin des années 70 n’existait plus, que la créativité qui animait des quartiers tels que Soho ou l’east Village s’était lentement mais sûrement évanouie. Plutôt que de déménager à Shanghai ou à Londres comme bien d’autres créateurs new-yorkais, elle a choisi de rester. Elle a alors lancé Performa, bien décidée à cultiver les idées et à reconstruire cet esprit. “Une nécessité absolue”, se souvient-elle.
Auteure d’un ouvrage qui fait référence en la matière, La Performance, du futurisme à nos jours (1), Roselee Goldberg trouvait aussi que la performance méritait une place plus importante dans l’histoire de l’art : “J’ai toujours pensé que ce médium était considéré comme ‘off’ alors qu’il est tout à fait central. À mon avis, on ignorait la substance même de l’histoire de l’art du XXE siècle, c’est pourquoi j’ai écrit ce livre en 1979. Et puis je me suis dit qu’il était temps que le public s’y intéresse, à grande échelle, et avec un programme d’ampleur qui captive les gens, pour qu’ils en redemandent.”
Performa 17 se déploiera cet automne dans toute la ville. Selon les organisateurs, “le thème historique de la biennale, ‘100 degrees above Dada’ est inspiré par l’exposition de Pierre Restany en 1961 intitulée ‘40 degrés au-dessus de Dada’”. Ce critique d’art du nouveau réalisme français voulait réexaminer le mouvement dada au-delà de ses origines nihilistes, mais aussi reconsidérer son langage et sa poésie dans un contexte moderne.”
Avec sa petite équipe, Roselee Goldberg recherche des projets pour chaque biennale et déniche des performers tout autour de la planète. Si quelques artistes occidentaux tels Kelly Nipper (États-unis) ou Tarik Kiswanson (France/suède) seront présents pour cette édition 2017, la grande majorité est originaire du continent africain, comme Zanele Muholi et Tracey Rose (Afrique du Sud) ou Wangechi Mutu (Kenya).
Back in the early aughts, Goldberg noticed that the New York she discovered in the late 70s was no longer there, that the sense of creativity and community which once ran rampant in neighborhoods like Soho and the East Village was slowly fading away. But rather than decamp to Shanghai or London, as many of the creatives in the city were doing, Goldberg insisted on staying put and starting Performa, in 2004, as a place to promote performance art, cultivate ideas and build a sense of community. “I thought it was an absolute necessity,” she explains. The author of the seminal tome Performance Art: From Futurism to the Present “always felt performance was treated as a side show, whereas performance is actually really central to the history of art. The history, the real serious meat of the history of 20th century art was, I thought, left out, so I wrote that book in 1979. Then I felt it was time to make the subject really public, on a big scale, to do it on a platform that would grab people and get them excited.”
Performa 17 takes place this November all across New York City under the banner 100 Degrees Above Dada, inspired by Pierre Restany’s 1961 exhibition 40 degrés au-dessus de Dada. Goldberg and her team scour the planet for each edition’s programming, and while Performa 17 includes a handful of Western artists – including Kelly Nipper (US) and Tarik Kiswanson (France/sweden) – the vast majority of this year’s selection comes from Africa, among them Zanele Muholi and Tracey Rose (both South Africans) and the Kenyan Wangechi Mutu.
New York GLOBAL PERFORMANCE
WITH HER FESTIVAL PERFORMA, ROSELEE GOLDBERG PUTS PERFORMANCE BACK AT THE HEART OF ARTISTIC PRACTICE, PICKING UP WHERE 1970S NEW YORK LEFT OFF. AMONG THIS YEAR’S GUESTS IS PARIS-BASED MULTIMEDIA ARTIST TARIK KISWANSON.
CI-CONTRE PHOTOGRAPHE SUD-AFRICAINE, L’ACTIVISTE ZANELE MUHOLI EST CONNUE POUR SA SÉRIE DE PORTRAITS FACES AND FACES. ELLE PROPOSERA LORS DE PERFORMA 17 UNE PERFORMANCE INTÉRACTIVE INSPIRÉE DE L’ÉNERGIE DE NEW YORK.
TARIK KISWANSON “IL SERA QUESTION DANS CES TEXTES RÉCITÉS D’IMMIGRATION, DE SEXUALITÉ, DE PREMIER AMOUR, DE HAINE, DE PARDON. MON TRAVAIL EST CONSTRUIT COMME UN TISSAGE SONORE, UN FIL. J’AI PENSÉ LA PERFORMANCE COMME UN RITUEL.”
TARIK KISWANSON, justement, vit à Paris, mais son univers culturel ressemble à un patchwork. Ses parents, palestiniens, se sont exilés en Jordanie après avoir dû quitter Jérusalem. Son père, souffleur de verre, a ensuite émigré dans le sud de la Suède, attiré par le savoir-faire et la réputation du pays dans cette dicipline. C’est là qu’est né et a grandi Tarik, jusqu’à ce que la famille déménage en Angleterre quand il avait 15 ans. Puis il s’est inscrit à Paris en master à l’école nationale supérieure des beaux-arts, dont il a suivi l’enseignement tout en travaillant chez Balenciaga. “Finalement, ayant vécu dans cinq pays, j’ai toujours baigné dans un environnement hybride”, a-t-il confié lors d’une visite de son atelier, dans le 20e arrondissement de la capitale.
Cet automne, Tarik Kiswanson fait ses débuts sur la scène artistique américaine à l’occasion de Performa 17, avec une performance chorale. Pour la décrire, il évoque la cacophonie de voix et de sons que l’on entend en pénétrant dans le réfectoire d’une école à l’heure du déjeuner. Son oeuvre, composée de deux éléments – un décor constitué de plaques polies de métal et une performance mettant en scène vingt-cinq garçons de 11 ans – s’apparente plus à un chaos organisé. Le décor fait écho aux oeuvres précédentes de l’artiste qui a l’habitude de travailler le métal en grand format tel des lames de miroir. Les vingt-cinq performeurs, quant à eux, réciteront au sein de ce décor une partition personnelle, entre poésie et sons lacinants. “Il sera question dans ces textes récités d’immigration, de sexualité, de premier amour, de haine, de pardon, explique l’artiste. Des mots seront communs à tous les textes. À des moments très précis, ils seront déclamés en même temps par tous les participants. La performance suit une mécanique très précise.” L’artiste nous montre les écouteurs métalliques qui joueront le rôle de métronomes dans l’oreille des enfants. “Mon travail est construit comme un tissage sonore, un fil. J’ai pensé la performance comme un rituel.”
CI-CONTRE VUE DE L’INSTALLATION ONGOING REFLECTION – YOU, ME, SO MANY (2017), DE TARIK KISWANSON. COLLÈGE DES BERNARDINS, PARIS.
Tarik Kiswanson lives in Paris, but his cultural background is a multinational patchwork. His parents are Palestinian, but moved to Sweden when his glassblower father, attracted by the country’s rich glass-manufacturing heritage, decided to seek work there. Born and brought up in Sweden, Kiswanson left at the age of 15 when his family moved to the UK, before heading to Paris as a young adult to take a masters at the famed École nationale supérieure des Beaux-arts, which he attended while working simultaneously at Balenciaga.
This autumn, Kiswanson makes his American début at Performa 17 with a choral performance. When describing it, he talks of the cacophony of sounds and voices you hear in a school canteen at lunchtime. Consisting of two components – an elaborate scenography of polishedmetal strips and 25 11-year-old boys – the performance is something of an organized chaos.
Kiswanson showed us the metallic earpieces that will act as metronomes for the boys during the performance, since each of them will have a specific text or series of noises to recite or utter. “They’ll be wearing these little silver pieces in their ears that tell them where they should be in the piece,” he explained. “My work is constructed like a sonic weave, a thread. There are 25 boys speaking about 25 different subjects – immigration, sexuality, love, hate, pardon – and within these 25 different subjects, there are 25 words, and these 25 words appear at the exact same time in all of the texts, so even if there are 25 different discussions, the word will always appear somewhere.”
Kiswanson likens the construction of the piece to Arabic ritual music. “It’s constructed like a ritual, like a new ritual for a new world, performed by boys.”
(1) Éditions Thames & Hudson, 2001. Performa 17, du 1er au 19 novembre, New York.
“MY WORK IS CONSTRUCTED LIKE A SONIC WEAVE, A THREAD. THERE ARE 25 BOYS SPEAKING ABOUT 25 DIFFERENT SUBJECTS: IMMIGRATION, SEXUALITY, LOVE, HATE, PARDON. IT’S CONSTRUCTED LIKE A RITUAL, LIKE A NEW RITUAL FOR A NEW WORLD, PERFORMED BY BOYS.”