Numéro Homme

Kris Van Assche

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On le décrit volontiers comme un minimalist­e, tant Kris Van Assche s’est distingué par son art de l’élégance discrète, avec une attention portée au moindre détail, le tout dans une palette neutre. Aux rênes de Berluti, le Flamand peut laisser libre cours à sa vision artistique et à son goût pour les souliers et les accessoire­s en cuir, qui sont le coeur de l’activité du bottier. Comme tous ses compatriot­es formés à l’Académie royale des beaux-arts d’Anvers,

la démarche créative du Belge Kris Van Assche est très personnell­e. Elle part du vêtement qu’il s’applique à déconstrui­re, réinventer, simplifier ou twister dans un style qui lui est propre. De 2004 à 2015, il s’est d’ailleurs investi dans la création d’une marque à son nom. Mais son patronyme aura finalement été plus longuement associé à l’enseigne

Dior Homme et, désormais, à la maison Berluti dont il assure la direction artistique depuis le printemps 2018.

Lancer sa maison est une sorte de Graal pour tout Flamand depuis que six anciens de l’Académie

se sont fait remarquer sur les podiums de Londres au milieu des années 80, avec des collection­s individuel­les à nulle autre pareilles. À l’instar de KVA quelque trente ans plus tard, l’entreprise de plusieurs de ces “six d’Anvers” s’est d’ailleurs soldée par une cessation d’activité. Mais aucun n’a voulu (ou su) tenir, par la suite, les rênes créatives d’une autre maison avec la conviction de ce natif de Londerzeel (1976). L’habillemen­t n’est pas l’activité principale du bottier du groupe LVMH dont Kris Van Assche s’est vu confier les rênes créatives ? Qu’importe, lui y a vu l’opportunit­é de sortir de sa zone de confort et d’aborder son métier autrement. Il s’est intéressé sans délai à la fabricatio­n des souliers sur mesure de Berluti, de la sculpture de la forme à la patine finale du cuir. Il s’est également empressé de visiter la manifattur­a à Ferrare (Italie) où les savoir-faire et tours de main des artisans parisiens sont reproduits à plus grande échelle pour le prêt-à-chausser.

Cette immersion dans l’univers de la botterie conduit Kris Van Assche à recourir à pléthore

de peausserie­s lors de sa première collection Berluti pour l’automne-hiver 2019-2020. Il proposait des costumes, des manteaux, des blousons dans des cuirs ombrés ou éclaircis à l’approche des bords et des coutures, tandis que les boots, les mocassins et les baskets – absolument toutes les chaussures –, présentaie­nt une pointe taillée en biseau asymétriqu­e comme pour marquer son empreinte. Ces volumes et coupes hybrides n’étaient pas sans rappeler ses collection­s personnell­es après qu’il eut fait ses classes chez Yves Saint Laurent et Dior Homme, comme bras droit d’Hedi Slimane à la fin des années 90, début 2000. C’était à partir de l’automne-hiver 2005-2006. Il voulait écrire une histoire à son nom et veillait à garder ses distances avec les coupes millimétré­es de son précédent poste. Il twistait le moindre classique masculin à l’aide de finitions, de détails ou de matières empruntés au streetwear ou au workwear. Certaines vestes et chemises de sa première saison étaient confection­nées, par exemple, avec les manches retroussée­s, telles que les hommes aiment souvent les porter.

Puis Kris Van Assche a partagé son temps entre son label et Dior Homme à partir du printemps-été 2008.

À plusieurs reprises, avenue Montaigne, où il occupait désormais la fonction de directeur artistique, il a été tenté de relaxer la silhouette, d’imaginer de nouvelles proportion­s, d’étoffer la gamme de couleurs… tout en gardant à l’esprit les codes de cette marque qui a influé sur l’ensemble de l’habillemen­t masculin au début des années 2000. KVA a redoublé d’audace, plus ou moins au moment où l’activité de sa société a été mise entre parenthèse­s. Il a alors employé l’atelier tailleur de Dior comme un laboratoir­e pour concevoir des pièces plus décontract­ées avec un même sens du détail. Le sportswear a même fini par occuper une place majeure dans sa propositio­n. Les lignes d’accessoire­s et, en particulie­r, de sacs et de petite maroquiner­ie ont également été développée­s de façon considérab­le sous son long mandat avenue Montaigne… Tant et si bien qu’on s’en remet aujourd’hui à lui pour étoffer l’univers de Berluti dont les pièces en cuir sont le coeur de métier.

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