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Art diary : chronique d’un reporter infiltré.

- Par Nicolas Trembley, photo Jessica Craig- Martin

À la fin du mois d’avril, la saison des foires recommence avec Milan, boostée cette année par la révélation de la pièce maî tresse de la Fondation Prada, la Tour, toujours par Rem Koolhaas. Vient ensuite Cologne, qui est l’une des plus anciennes, très allemande donc de bonne qualité, suivie de Bruxelles, qui fêtait ses 50 ans, en petite forme. La présentati­on du futur Centre Pompidou dans les historique­s bâtiments Citroën-Yser a toutefois suscité un certain engouement. Mais il faudra attendre 2022 pour que le projet – mené par le groupe d’architecte­s no Aarchitect­en, EM2N et Sergison Bates architects conseillés par la curatrice Anne Pontégnie – soit finalisé.

Le point d’orgue de la manifestat­ion belge fut sans doute le dîner donné en l’honneur de l’exposition de Sherrie Levine chez le galeriste Xavier Hufkens. Il avait lieu au musée Wier tz, ancien atelier de ce peintre du XIXe, fermé au public depuis des années. Très fier, le galeriste présentait le chien de sa maman, le seul qui ait pu pénétrer le bâtiment depuis celui de Magritte il y a plus de cinquante ans.

Le salon artmonte- carlo, une succursale de celui d’artgenève, ne doit pas être confondu avec Ar t Monaco dont les galeries sont inconnues. Cette année, il réunissait une trentaine de curateurs internatio­naux pour une sorte de speed dating particuliè­rement efficace. En même temps se déroulait le salon de design Nomad Monaco, dans l’ancienne villa de Karl Lagerfeld, qui domine le Beach Club et dont la façade d’inspiratio­n pompéienne ressemble aux magasins de bricolage américains Home Depot. Il faut dire que l’architectu­re des bâtiments contempora­ins de Monaco est particuliè­rement insipide. Ce qui n’est pas le cas de la villa d’Eileen Gray, désormais ouver te au public, ni de la villa Santo Sospir, à Saint- Jean- CapFerrat, entièremen­t décorée par Jean Cocteau, qui y séjourna avec son amant et une armée de dealers.

À Grasse, Mme Silvia Fiorucci- Roman recevait, elle, dans sa bastide pour inaugurer une résidence pour ar tistes au Moulin des

Ribes, dont chaque appar tement a été conçu par un designer dif férent.

Pour ( peut- être) la première fois, la foire Frieze de New York n’a pas ouvert sous les pluies diluvienne­s qui avaient l’habitude de transforme­r l’aire d’arrivée des limousines en immense gadoue. Au contraire, cette année, les tentes de la foire étaient métamorpho­sées en sauna. De bonne qualité après des revers et des critiques, l’événement a néanmoins dû faire face à la concurrenc­e du TEFAF qui s’est installé sur Park Avenue dans l’ancien Armory et où il y avait l’air conditionn­é. Fascinant de voir comme tout le monde admire désormais, de façon inconditio­nnelle et avec l’ardeur habituelle­ment réservée à l’avant- garde, tout ce qui est historique. Ceux qui étaient blasés des impression­nistes et ne juraient que par l’art minimal se mettent à adorer des modernes.

Profitant de l’oppor tunité de la foire et de la présence de nombreux donateurs sur place, le Swiss Institute – et son directeur Simon Castets – présentait son bâtiment rénové par l’architecte Annabelle Selldorf avec un dîner concocté par la star gastronomi­que de New York, Daniel Humm d’Eleven Madison Park, considéré tout simplement comme le meilleur restaurant du monde. Il est suisse.

À New York, cette semaine- là, le think thank allemand DLD – pour Digital, Life et Design – pêchait lui aussi dans l’ar t, et mandatait le curateur suisse Hans Ulrich Obrist, qui fêtait ses 50 ans. Le 2 mai, il donnait deux conférence­s sur les muses du futur, avec Elizabeth Diller et Max Hollein, le nouveau directeur du Metropolit­an, qui préparait son premier Met Ball. En fin de journée, Obrist donnait sa troisième conférence avec Tino Sehgal et Alex Poots, le nouveau directeur du futur Shed, un gigantesqu­e centre d’ar t situé au coeur de Manhattan dont la structure, réalisée par Diller Scofidio + Renfro, est rétractabl­e. Quelques jours plus tard, les grandes ventes de mai commençaie­nt, et le Met Ball se terminait avec l’ouver ture de l’exposition sur les parures de l’Église catholique. Amen !

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