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Antoine Griezmann.

Bien avant la victoire de l’équipe de France au Mondial, Antoine Griezmann était déjà le footballeu­r préféré des Français. Décisif lors de la finale à Moscou, le joueur charismati­que surnommé “Grizou” a donné une nouvelle preuve éclatante du talent qu’il

- Propos recueillis par Philip Utz, portraits Joseph Degbadjo

“De vous à moi, je préfère que l’on m’appelle ‘Grizi’, un raccourci de Griezmann. ‘Grizou’, ça vient des coéquipier­s de l’équipe de France. Je ne sais pas trop pourquoi on m’a surnommé comme ça. Il faudrait demander à Giroud !”

NUMÉRO : Vous êtes tellement choupinou Antoine Griezmann ! Vous devez vous faire dragouille­r à tous les coins de rue !

ANTOINE GRIEZMANN : [ Rires.] Merci ! Ça ne risque pas car je suis quelqu’un de casanier. Je sors seulement pour les entraîneme­nts et les matchs. Il m’arrive de faire un resto de temps en temps à Madrid, mais c’est toujours en compagnie de ma famille et de mes amis.

D’ailleurs vous est- il possible de mettre un pied dehors sans vous faire assaillir par des hordes de groupies glapissant­es ?

Comme je le disais juste avant, je sors peu, je préfère passer mon temps libre à la maison avec ma femme à préparer un asado ou bien à me balader avec ma fille dans le parc qui est à côté de chez nous. Quand je sors de chez moi pour aller boire un verre avec les coéquipier­s ou dîner avec mes parents, les gens sont respectueu­x. On m’encourage, on me félicite sans me demander systématiq­uement un selfie. C’est toujours bienveilla­nt.

Vous arrive- t- il de vous faire séduire par des hommes, ou s’agit- il majoritair­ement de suppor trices de la gent féminine ?

Ça ne m’est jamais arrivé ! Je suis avec Erika, ma femme, depuis sept ans. Je suis un homme heureux et comblé !

Les statistiqu­es montrent qu’à Paris environ un homme sur dix est homosexuel. Comment expliquer alors que, dans le foot de haut niveau, aucun homosexuel ne figure au palmarès ?

L’homosexual­ité dans le foot est un sujet encore tabou. Personnell­ement je ne vois pas de problème à af firmer son orientatio­n sexuelle. Si un jour un de mes coéquipier­s me disait qu’il est gay, ça ne me choquerait pas et je serais là pour le soutenir dans ce milieu qui peut être par fois macho. Le mois dernier, j’ai par ticipé à un documentai­re qui passera sur les chaînes de France Télévision­s : Footballeu­r et homo, et j’espère sincèremen­t que ce sujet fera bouger les choses !

Pourquoi pensez- vous que vous êtes le spor tif préféré des 7-14 ans en France, selon le Journal de Mickey ?

Ça me fait toujours plaisir de savoir que les enfants m’apprécient. Je pense qu’ils aiment le fait que je sois encore un grand gamin, je joue aux jeux vidéo, j’invente de nouvelles célébratio­ns, je par tage mes délires sur les réseaux sociaux. J’essaye de rester proche de mes suppor teurs et c’est peut- être ça qui leur plaît chez moi.

D’où vous vient votre petit nom, “Grizou” ?

De vous à moi, je préfère que l’on m’appelle “Grizi”, un raccourci de Griezmann. “Grizou”, ça vient des coéquipier­s de l’équipe de France, je ne sais pas trop pourquoi on m’a surnommé comme ça. Il faudrait demander à Giroud !

Comment les footballeu­rs font- ils pour protéger leurs parties intimes lors des matchs ? Por tent- ils une coque comme les danseurs étoiles de l’Opéra de Paris ?

À ma connaissan­ce, on ne porte pas de coque. Mais par fois on devrait ! [ Rires.] On se protège du mieux qu’on peut quand il y a un coup

“Aujourd’hui, tout ce que l’on dit ou fait est

relayé partout, et parfois pas d’un oeil bienveilla­nt. Un seul mot peut être repris et

dénaturer l’ensemble de tes propos. En ce qui me concerne, j’essaye toujours d’être sincère et de dire ce que je pense…

ça ne plaît pas toujours.”

franc et on prie pour que le tireur ne vise pas en dessous de la ceinture.

Ces coques existent- elles en plusieurs tailles, ou s’agit- il de coques à taille unique ?

Il faudrait regarder sur Internet. Sans doute. Malheureus­ement je ne peux pas vous conseiller !

Quel est le pire bobo que vous vous soyez fait sur le terrain ?

Lors d’un match avec l’équipe de France, après un duel à la tête, un adversaire est retombé sur mon pied. Les crampons sont très fins, j’ai tout senti. J’ai fini le match tant bien que mal, mais à la sortie j’avais un trou sur le dessus du pied. Je devais être arrêté trois semaines mais au bout de sept jours l’appel du ballon était trop for t et je suis retourné m’entraîner.

Quelles répercussi­ons ce genre d’incident peut- il avoir sur la carrière d’un footballeu­r ?

À mon niveau, ça allait, c’était l’histoire de quelques jours, mais quand il s’agit d’une fracture ou d’une déchirure, là, ça peut traîner, et si le joueur reprend trop tôt, sa blessure peut être mal soignée et il peut se faire mal à nouveau, et plus gravement encore, et ça peut mettre fin à sa carrière. C’est super impor tant d’avoir une bonne hygiène de vie, de prendre soin de soi et de s’écouter.

Vos jolies gambettes sont- elles assurées pour 100 millions d’euros, un peu comme le derrière de J- Lo ?

Dans le milieu, on a plutôt intérêt à assurer nos jambes, c’est notre outil de travail. Mais en ce qui me concerne, pas à ce montant !

Quelle est la date de péremption pour un footballeu­r ?

Ça dépend du profil des joueurs. Il n’y a pas vraiment d’âge, je crois que la moyenne, c’est 33 ans, mais il y a des joueurs qui se sentent encore en forme et qui continuent après ça, d’autres qui mettent fin à leur carrière à 30 ans. Ça dépend aussi des oppor tunités qui s’offrent à nous, des envies personnell­es et profession­nelles de chacun. Ça reste un choix très individuel je trouve.

Les gardiens de but ont- ils une espérance de vie – sur le plan profession­nel – plus longue que les attaquants ?

Oui et non. Un gardien ne court pas 30 bornes sur le terrain pendant les matchs, mais ça reste un spor tif de haut niveau à qui on va demander beaucoup de travail en amont pendant les entraîneme­nts.

Pourquoi les footballeu­rs sont- ils champions de la langue de bois en interview ?

Aujourd’hui, tout ce que l’on dit ou fait est relayé partout, et parfois pas d’un oeil bienveilla­nt. Un seul mot peut être repris et dénaturer l’ensemble de tes propos. En ce qui me concerne, j’essaye toujours d’être sincère et de dire ce que je pense… ça ne plaî t pas toujours.

Suivez- vous tous un média training pour vous apprendre à mieux déjouer les questions per fides des journalist­es ?

Non, je n’ai jamais pris de cours de média training. Mon français est parfois approximat­if car je pense en espagnol ( les gens ne comprennen­t pas qu’en étant de nationalit­é française

“Les deux défaites que nous avons connues

en finale de la Ligue des champions et de l’Euro ont été des coups durs. J’ai fait des cauchemars et j’ai bien mis six mois

à m’en remettre.”

je n’arrive pas à m’exprimer mieux que ça dans ma langue maternelle). À force de faire des interviews, j’ai appris à peser mes mots et à prendre mon temps pour répondre. Pour le reste, je ne suis pas une machine, et je préfère garder ce côté spontané.

Comment répondriez- vous, par exemple, à ce genre de question : si vous deviez passer deux semaines coincé dans les vestiaires avec un autre joueur, préférerie­z- vous les passer avec Neymar, Ronaldo ou Mbappé ?

[ Rires.] Je préférerai­s être coincé avec Derrick Rose et D’Angelo Russell [ basketteur­s célèbres de la NBA] pour parler basket.

Pour vous por ter chance, avez- vous des rites particulie­rs avant d’entrer sur le terrain ?

On me pose souvent la question, mais non, je n’ai pas de rite. Autour de moi, certains prient, d’autres s’habillent dans un ordre spécial, moi, pour me vider la tête, j’écoute un peu de musique avant que le coach fasse son briefing, et après je suis concentré sur mon match.

Les joueurs se par fument- ils avant de jouer ?

À l’Atlético, non, je n’ai jamais vu un de mes coéquipier­s se par fumer. Par contre, j’en connais d’autres en équipe de France qui aiment sentir bon avant d’entrer sur le terrain. Petit plaisir personnel. [ Rires.]

Les attaquants sont- ils obligés de se raser intégralem­ent le corps – à l’aide d’un rasoir Gillette – pour être plus aérodynami­ques sur le terrain ?

Non ! Ça c’est si tu aimes les poils ou pas. C’est un choix personnel. Par contre, tu es content quand tu as rasé tes jambes et que l’on te strappe, c’est beaucoup moins douloureux quand tu retires la bande.

La victoire lors de la Coupe du monde était- elle le plus beau jour de votre vie ?

Le plus beau jour de ma vie, c’était la naissance de ma fille Mia en 2016. Je suis un papa complèteme­nt gaga et je me souviendra­i toujours de l’état de stress et d’excitation dans lequel j’étais quelques minutes avant qu’elle vienne au monde.

Est- il facile pour vous de décrocher lorsque vous rentrez à la maison le soir, où vous réveillez- vous en pleine nuit, en sueur, après des cauchemars d’expulsions de terrain ou de penaltys loupés ?

J’arrive à décrocher grâce à ma famille. On ne parle jamais de foot à la maison, Mia me permet aussi de penser à autre chose. Elle est pleine d’énergie et me fait faire tout et n’impor te quoi. Les seuls coups durs que j’ai connus où même ma famille ne suf fisait plus, c’étaient mes deux défaites en finale de la Ligue des champions et de l’Euro. Là, j’ai bien mis six mois à m’en remettre, et j’ai fait des cauchemars.

En tant que spor tif de haut niveau, avezvous le droit de boire, de fumer et de vous mettre des races comme le commun des mortels, ou bien toute consommati­on de substances, surtout illicites, est- elle formelleme­nt proscrite ?

Je ne me lâche que lorsque je suis en vacances. Je profite d’un bon vin avec un asado, d’une bière autour de la piscine. Le reste de l’année, je fais attention.

“J’aime de plus en plus la mode. Je renouvelle ma garde-robe tous les trois mois

avec quelques pièces fortes. Mais ça doit rester un jeu, je n’aime pas me prendre

au sérieux.”

Êtes- vous un passionné de mode ?

J’aime de plus en plus la mode, les belles pièces de Saint Laurent ou de Louis Vuitton. Je renouvelle ma garde- robe tous les trois mois avec quelques pièces fortes. Mais ça doit rester un jeu, je n’aime pas me prendre au sérieux.

Passez- vous votre temps au premier rang des défilés, à courir les boutiques et à squatter le yacht de Valentino à Capri tout l’été ?

Je n’ai malheureus­ement pas le temps pour les défilés. On s’entraîne tous les jours, j’ai les sollicitat­ions des sponsors, et comme je vis à l’étranger, c’est toujours compliqué de venir à Paris. J’en profiterai quand je serai à la retraite !

Vous arrive- t- il par fois d’opter pour des tenues seyantes, voire moulantes, pour mettre en valeur votre physique d’adonis ?

Non, je préfère me sentir à l’aise dans mes vêtements. J’ai le bas du corps développé, je ne peux pas por ter des pantalons trop serrés, et puis ce n’est pas mon truc.

Selon vous, est- il acceptable pour un homme de por ter le shor t cour t et la chaussette montante en dehors des terrains de foot ?

Tous les goûts sont dans la nature ! [ Rires.] Moi, je porte souvent ça quand je suis à la maison. Pour sor tir, je ne sais pas, chacun fait comme il veut, rien ne me choque.

Vous habillez- vous vous- même, ou – telle Beyoncé – votre personal stylist vient- il vous draper de soieries à votre réveil ?

Je travaille avec un styliste qui me dégotte quelques pièces rares, pour le reste, j’essaye de me débrouille­r seul.

Que faites- vous de tout l’argent que vous gagnez ? Vos murs sont- ils tapissés de Renoir, de Cézanne et de Magritte ?

Je le mets en grande par tie de côté. La carrière d’un footballeu­r est cour te et je dois assurer mes arrières et ceux de ma femme et de mes enfants. Il m’arrive par fois de me faire plaisir avec un petit voyage aller- retour de quarante- huit heures aux États-Unis pour aller voir un match de basket, mais j’essaye du mieux que je peux de ne pas jeter l’argent par les fenêtres.

Pourquoi avez- vous choisi de soutenir l’associatio­n Un Rien C’est Tout ?

Il y a un an et demi, Cécile Duf fau m’a proposé d’être le parrain de son associatio­n et j’ai tout de suite accepté, car j’ai aimé l’approche qu’elle avait de son projet. Je suis très sensible au fait d’appor ter mon soutien à dif férentes causes qui en ont besoin, et aussi, de pouvoir aider chaque associatio­n du début à la fin, avec un budget et une mission bien précise à chaque fois. Le donneur sait où va son argent, à quoi il a servi, et quand la mission est terminée, on aide une autre asso. Un Rien C’est Tout prend de plus en plus d’ampleur et j’en suis très fier !

Avez- vous vu le film d’animation de Disney,

La Reine des neiges ?

Non, jamais. J’ai eu de la chance, Mia était trop petite quand il y a eu le phénomène

Reine des neiges. En revanche je vous rassure, j’ai des chansons aussi entêtantes que

Libérée, délivrée. Baby Shark ( avec la choré), c’est sa chanson du moment, elle passe une bonne dizaine de fois tous les jours à la maison.

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