LES VOITURES D’OCTANE
FERRARI 400 GT 1979
Ferrari 400GT, Buick Roadmaster & Range Rover P38
DANS LE PRÉCÉDENT NUMÉRO, nous analysions le marché par le prisme du véhicule de grand tourisme, faisant les éloges de moteurs solides, de fiabilité, de tenue de route exceptionnelle, le tout associé à des lignes souvent très inspirées, voire exotiques.
Le dire sur papier, c’est un bon début, le démontrer par l’action c’est mieux.
Invité au mariage d’une amie allemande au Schlosshotel Kronberg, à côté de Francfort, je me devais de m’y rendre avec un minimum de panache.
Étant donné que le séjour était court et que le meilleur moyen de s’y rendre est l’autobahn (non limitée en bien des endroits), le choix fut vite dicté par la capacité du véhicule à rouler vite dans d’agréables conditions.
Achetée en 1999 avec 30 000 km au compteur, la 400 GT en affiche aujourd’hui le double, ce qui équivaut à une moyenne annuelle d’environ
2 000 km, ce qui est à mon sens idéal pour ce type de véhicule.
En effet, un moteur de douze cylindres à quatre arbres, gréé de six carburateurs horizontaux double corps, a besoin de rouler de manière régulière faute de quoi il commence à se gripper et se dérégler.
Je fais donc en sorte de la sortir de manière régulière sur des distances moyennes permettant de la faire rouler sans pour autant lui ajouter des kilomètres inutiles. Une fois par an elle a droit à un “vol intercontinental” permettant de réellement vérifier ses aptitudes et ses capacités de voyage au long cours, et surtout de se faire plaisir.
La première fois, ce fut pour rejoindre la Galerie des Damiers de Christophe Pund à Cassel, vers 2008. Depuis elle a rejoint à deux reprises les Journées d’automne à Fère-entardenois, à Bruxelles pour un rallye du Rolls-royce Driver’s Club (!) et quelques autres destinations tout aussi agréables.
Une petite vérification visuelle du moteur, la pression des pneus, un remplissage des 120 litres d’octane 98 et quelques bagages sur le siège arrière (tout ce qui séjourne
dans le coffre empeste rapidement l’essence, une maladie de ce modèle) plus loin, et me voilà bien confortablement calé à 180 km/h sur une autoroute allemande, dans un bruit de turbine aussi exquis qu’au premier jour. Jusqu’à ce que le trafic s’en mêle. L’allemagne, malgré ses autoroutes parfois très permissives, permet finalement assez peu d’aller explorer les limites de sa voiture, à l’ouest en tous les cas, des travaux avec trafic réduit sur une seule bande ayant jalonné tout mon parcours… J’ai des souvenirs bien plus véloces aux alentours de Dresde, de Berlin ou encore d’erfurt.
Malgré ces inconvénients, la 400, bien entretenue, ne chauffe absolument pas et ne souffre pas non plus de vapor lock ou d’autres désagréments du genre. J’aurais toutefois dû vérifier l’allumage, de petits ratés faisant lentement leur apparition… Arrivé au château, c’est une quinzaine de sublimes véhicules anciens qui m’accueille, un rallye partant de Bâle pour rallier San Sebastian faisant étape ici. Je croise une Bentley d’avant-guerre, des Alvis, une 300 SL Roadster ou encore une très belle Aston Martin DB2 à la teinte Almond Green.
J’ai le temps de préparer mon itinéraire du retour durant les deux jours du mariage et décide de prendre de jolies routes tout en gardant la possibilité de récupérer l’autoroute au besoin
(un lendemain de fête n’étant pas forcément la journée de voyage idéale). Je quitte le Schlosshotel Kronberg vers 13 heures et me dirige tranquillement vers les forêts environnantes en passant par Taunusstein. Assez vite, je remarque que la voiture ne marche pas comme elle le devrait. Elle n’est pas franche à l’accélération et ne délivre pas sa puissance habituelle. Malheureusement ce n’est pas par ce dimanche pluvieux que je vais pouvoir y remédier, il faut rentrer. Je cherche donc à rejoindre l’autoroute, non sans tomber nez à nez avec une Futuro House de Matti Suuronen et quelques châteaux médiévaux bien cachés. Ce n’est qu’après une heure de jardinage due à l’incapacité de Google Maps à se connecter que je récupère l’autobahn. Daft Punk qui résonne encore dans mes oreilles y est certainement aussi pour quelque chose. Plus qu’une envie, renter. Malheureusement, les ralentissements, qui à l’aller étaient supportables, sont ici d’interminables bouchons sous des trombes d’eau. La voiture a de plus en plus de mal avec son ralenti, il devient évident qu’elle a besoin d’un sérieux réglage d’allumage. L’impression d’être aux commandes d’une capricieuse voiture de compétition se fait de plus en plus ressentir. Tomber en panne dans de telles conditions ne me réjouit pas plus que ça. La route finit par se dégager en même temps que la pluie et me permet de quitter ce maelstrom, et, par la même occasion, d’atteindre des vitesses auxquelles ce souci d’allumage n’a plus d’importance. Pour résumer, au-dessus de 180 km/h tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes. Comme à chaque fois, la 400 GT a démontré sa fiabilité et sa capacité à se fondre dans un environnement automobile de plus en plus hostile. Il va falloir maintenant lui prodiguer les soins et réglages nécessaires afin de maintenir ce fonctionnement si agréable dans le temps.
UNE FOIS PAR AN LA 400 GT A DROIT À UN “VOL INTERCONTINENTAL” PERMETTANT DE VÉRIFIER SES APTITUDES DE VOYAGE AU LONG COURS