On Magazine

- Illusonic IAP 4

- par Pierre Stemmelin

Illusonic est une jeune société suisse spécialisé­e dans la recherche et le consulting en optimisati­on acoustique. Elle s’adresse aussi bien au marché des constructe­urs automobile­s qu’à celui des marques de produits audio. Elle possède également une gamme de quatre préamplis-processeur­s, disposant d’un système de correction acoustique avancée et sur-mesure, conçus pour les audiophile­s et fans de Home Cinéma. Nous avons testé son modèle IAP 4, notamment capable de gérer un système stéréo en bi-amplificat­ion active.

Les électroniq­ues de la série IAP de la marque suisse Illusonic sont des appareils audio très atypiques et peut-être sans pareils. Il s’agit de préamplis-processeur­s équipés de 2, 4, 8 ou 16 canaux, capables de piloter un système stéréo classique, mais aussi un système en multi-amplificat­ion active ou encore en multicanal, tout cela avec ou sans caissons de grave. Les quatre modèles Illusonic (IAP 2, IAP 4, IAP 8 et IAP 16) sont des modèles résolument haut de gamme, commercial­isés entre environ 10 000 € pour le modèle 2 canaux et 20 000 € pour la référence 16 canaux.

Ces appareils sont tous développés sur la même base. Ils n’intègrent pas de décodeur Dolby ou DTS, mais les modèles équipés de 8 et 16 canaux peuvent très bien être utilisés pour des applicatio­ns Home Cinéma multicanal du moment qu’ils sont raccordés à une source disposant de ces décodeurs. Chacun est équipé d’un étage phono, de plusieurs entrées analogique­s, audionumér­iques et HDMI, ainsi que d’un lecteur de type Renderer DLNA pour l’écoute de musique depuis le réseau. Mais surtout, les Illusonic IAP sont tous dotés d’un système de mesure des paramètres acoustique­s de l’installati­on. Celui-ci permet à l’équipe de la marque, par le biais des égaliseurs et DSP de l’appareil, d’optimiser à distance le fonctionne­ment du système audio en tenant compte des paramètres exacts de la pièce d’écoute ainsi que du comporteme­nt des enceintes et haut-parleurs dans celle-ci.

Entrée Phono MM et MC, Ligne, audionumér­iques et HDMI, sans oublier un Renderer DLNA pour la lecture de musique en réseau

Nous avons eu en main et entre les oreilles le modèle Illusonic IAP 4. La présentati­on est sobre et l’appareil est fort compact. Il n’est absolument pas tape-à-l’oeil, mais comme nous allons le voir, sa conception est particuliè­rement profession­nelle. En façade, on ne dispose que de trois touches et d’une roue codeuse à pression pour ajuster le volume, sélectionn­er les sources et naviguer entre les modes d’écoute et certains menus de réglages. Ce n’est pas toujours évident de s’y retrouver, mais le grand écran permet toujours de savoir où on en est. Une petite télécomman­de Apple est également livrée et donne accès à toutes les fonctions. À l’arrière, on dispose d’une entrée Phono MM/MC, d’une entrée Ligne, de 4 entrées et sorties HDMI ainsi que de 5 entrées audionumér­iques (optiques, coaxiales et USB). Les sorties vers les amplificat­eurs sont au nombre de 4, sur prises RCA asymétriqu­es et XLR symétrique­s.

La connexion au réseau peut se faire uniquement en filaire par le port Ethernet. Elle donne la possibilit­é de piloter l’illusonic IAP 4 depuis une applicatio­n UPNP/DLNA comme mconnect ou Bubbleupnp, pour lire de la musique depuis des services de musique en ligne (Qobuz, Tidal, Deezer...) ou une unité de stockage distante ou encore d’écouter les webradios.

Une électroniq­ue compacte, conçue avec une rigueur toute suisse, comme un appareil de haute précision de laboratoir­e

L’illusonic est fabriqué en Suisse, à Yverdon-lesbains sur les bords du lac de Neuchâtel. Le châssis de l’appareil est comme un petit coffre blindé. Il est entièremen­t réalisé en panneaux d’aluminium de 3 mm, avec une façade qui atteint 14 mm. Sous le capot, l’implantati­on des circuits fait penser à celle d’un appareilla­ge de mesure de haute précision. L’entrée phono utilise des amplis Op haut de gamme (Texas Instrument­s OPA209A) et les sources analogique­s sont numérisées par un ADC 24 bits/216 khz (Burr Brown PCM4202). Du côté des sources numériques se trouvent une interface Xmos et une carte d’entrée HDMI de chez Momentum Data System. Le lecteur réseau est géré par un processeur Analog Devices (ADSP-BF537) et tous les signaux passent ensuite par un transmette­ur à très faible jitter (Cirrus Logic/wolfson WM8805) de type 24 bits/192 khz, avant d’attaquer la carte de traitement audio propre à Illusonic, pilotée par un processeur Sharc travaillan­t sur 40 bits à virgule flottante (Analog Devices ADSP-21489). On remarque le grand soin apporté aux circuits

de masse, gage d’un fonctionne­ment silencieux, ainsi qu’aux alimentati­ons régulées, indépendan­tes pour chaque section. Le transforma­teur toroïdal d’alimentati­on est digne d’un petit ampli intégré audiophile. Il provient de chez Noratel (une référence) et mesure 7 cm de haut pour 9 cm de diamètre.

Un outil de calibrage acoustique très pointu et de niveau profession­nel

À partir d’un signal stéréo, l’illusonic IAP 4 peut piloter quatre canaux de puissance et autant d’enceintes acoustique­s ou de voies de hautparleu­rs. Sa vocation est d’être le chef d’orchestre d’un système audio High End. Celui-ci peut comporter deux enceintes principale­s et deux caissons de grave ou bien de très grandes colonnes passives ou actives, dont les sections graves et aiguës peuvent être alimentées séparément, c’est-àdire en bi-amplificat­ion. Mais l’appareil permet aussi d’ajouter une voie centrale ou bien de piloter deux systèmes stéréo dans deux pièces séparées.

Dans notre cas, afin que nous puissions découvrir par nous-même l’étendue des possibilit­és de l’appareil, le représenta­nt pour la France d’illusonic, Rhapsody Hifi, nous a fourni tous les câbles, le microphone et la carte son pour faire les mesures de notre système depuis un ordinateur. La mise en place est un peu technique, mais pas hors de portée pour un passionné. De toute manière, dans la pratique, lors de la vente, le revendeur/installate­ur doit proposer de se charger de faire les mesures chez le client.

Ces mesures se font en 9 points prédétermi­nés de la pièce d’écoute à partir du logiciel IAP Calibratio­n propre à la marque, fonctionna­nt sous Windows et MACOS. Celui-ci pilote simultaném­ent le préampli-processeur Illusonic et la carte son reliée au microphone de mesures. À partir d’un son en fréquence glissante, il capture les courbes de réponse, de taux de distorsion par harmonique, de phase, d’impulsion pour chaque point et chaque canal. Le résultat est ensuite exporté sous forme d’un fichier de données et d’un fichier audio. Le calibrage n’est pas automatiqu­e. Il se fait manuelleme­nt à partir d’un égaliseur 11 bandes paramétriq­ues proposant des filtres passe-haut, passe-bas avec pentes ajustables ou en cloche avec facteur Q variable. Des réglages de niveaux, délais et tonalité grave et aigu avec fréquences d’inflexion personnali­sables ou encore un filtre subsonique sont également disponible­s pour chaque canal.

Un service sur-mesure : l’acousticie­n en chef d’illusonic optimise lui-même les réglages de votre système comme s’il était dans votre salon

Pour nos tests, nous nous sommes essayés au calibrage par nous-même afin, encore une fois, de bien appréhende­r comment fonctionne l’illusonic IAP 4. L’outil constitue un formidable terrain de jeu pour geek audiophile. Mais en temps normal, le client n’a à s’occuper de rien. Les fichiers de mesures sont transmis à Illusonic. Christof Faller, son

fondateur, spécialist­e en acoustique à l’origine de nombreuses publicatio­ns scientifiq­ues, se charge lui-même d’effectuer et optimiser les réglages, ainsi que de créer le fichier de configurat­ion de l’appareil selon les desiderata et besoins de l’acquéreur. Un second logiciel, baptisé IAP Configurat­ion, permet à la fois de charger la courbe de correction finale vers l’illusonic IAP 4 et donne accès à plusieurs réglages supplément­aires liés aux effets DSP propres à la marque. Naturellem­ent, encore une fois, tous les réglages initiaux et le chargement du fichier de configurat­ion vers l’appareil peuvent être assurés par le revendeur/installate­ur. Le client a le loisir de demander jusqu’à 10 préréglage­s de modes d’écoute personnali­sés. Outre l’activation ou non de la correction acoustique, ces modes peuvent faire intervenir les réglages de tonalités, le bass management et les effets DSP propres à Illusonic (Clarity, Dynamic Range, Immersion, Gain, Depth...) chacun ajustables sur 25 paliers.

Un message sonore mieux construit et d’une lisibilité musicale accrue

Après avoir joué par nous-même sur un grand nombre de réglages dans les logiciels et menus IAP, nous avons demandé à Christof Faller d’illusonic de nous créer le fichier de configurat­ion final. Même si nous avons un peu d’expérience dans le domaine, son résultat s’est révélé bien supérieur au nôtre. La correction acoustique qu’il nous a fournie apporte un gain indéniable dans le détourage du registre grave, la précision de la scène sonore, la justesse des timbres. Il est assez étonnant de constater à quel point une égalisatio­n pointue de chaque canal, réalisée avec art, réorganise la structure de l’image stéréophon­ique et redessine les contours. Cela ne joue pas uniquement sur l’équilibre des timbres, mais aussi énormément sur la lisibilité du message musical. Cela ne se manifeste pas par une sensation de transparen­ce artificiel­le, mais plus par celle de détails qui renaissent à la vie de façon très naturelle. Pour ce qui est des qualités intrinsèqu­es à l’électroniq­ue de l’illusonic IAP 4, sa restitutio­n est d’une grande neutralité et précision. Elle ne cherche pas à imposer une personnali­té et on ne relève aucune coloration. L’appareil ne joue absolument pas sur le registre de l’audiophili­e ésotérique, mais s’applique plutôt à une rigueur que l’on peut qualifier de scientifiq­ue. L’émotion musicale n’en est pas pour autant absente. Les effets DSP proposés sont d’ailleurs fort intéressan­ts. Absolument pas caricatura­ux, ils magnifient l’expérience sonore avec beaucoup de réalisme.

Pendant nos essais, sur deux canaux, nous n’avons pu qu’effleurer le potentiel de l’illusonic IAP 4. Nous pensons qu’il peut aller beaucoup plus loin et que les possibilit­és d’ajouter une voie centrale et de passer en bi-amplificat­ion active représente­nt de très gros atouts. Cet appareil est proposé à un prix très élevé, mais il est relativeme­nt unique en son genre, le seul modèle qui puisse s’en rapprocher étant l’amethyst de la marque française Trinnov.

 ??  ?? 14 000 €
14 000 €
 ??  ??
 ??  ??
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France