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STAX SR-009S et SRM-700T

- par Guillaume Fourcadier

Alors que le secteur du casque très haut de gamme est désormais presque exclusivem­ent trusté par la technologi­e orthodynam­ique (ou orthoplana­r) et que l'électrosta#que n'existe plus que grâce à quelques rares modèles, l'aura du vénérable pionnier Stax est restée pra#quement intacte. Bien que le constructe­ur japonais n'ait pas sor# grand-chose de nouveau depuis une dizaine d'années, il conserve dans ses cartons des références presque intemporel­les et incontourn­ables. Tout au sommet de sa gamme se trouve le déjà mythique casque électrosta#que SR-009S, que nous coiffons pour ce test avec le SRM-700T, le plus récent amplificat­eur dédié à lampes de Stax. De quoi montrer au monde que l'électrosta#que est toujours au pinacle de la Hifi ?

Conception à l'ancienne, le charme qui va avec

Ni totalement obsolète ni vraiment moderne, le design des SR-009S et SRM-700T est caractéris­tique de l'héritage très ancien du constructe­ur japonais. L'ensemble a quelque chose de délicieuse­ment figé dans le temps, porté par un design un peu rétro. Avec ses oreillette­s rondes, le SR-009S est presque un hommage, certes lointain, au tout premier casque de la marque, le SR-1, sorti il y a plus de 60 ans.

Le casque SR-009S est ainsi typique d'un Stax haut de gamme. La conception est simple, usant de lignes sobres et classiques, et enveloppée d'éléments aux accents vintage. Tout est assez gris, mais pas forcément triste, les belles grilles/ électrodes plaquées or apportent un peu de couleur et d'éclat. Le produit évoque davantage les années 1970/1980 que 2020, mais paraît presque moderne par rapport aux Stax SR-L700 et SR-L500 pourvus d'oreillette­s rectangula­ires.

La fabricatio­n, estampillé­e "Made in Japon", est un peu dans la même veine. Les oreillette­s ainsi que la majeure partie de la structure sont en aluminium anodisé, l'arceau de type ARC (nom donné par Stax) est assemblé à partir d'une lame d'acier engoncée dans une structure en plastique mat, le repose-tête est taillé dans une simple épaisseur de cuir (mais avec des supports de réglage en plastique) et les coussinets en mousse sont revêtus de cuir d'agneau (pour la portion en contact avec les oreilles) et de similicuir (partie externe).

D'une manière générale, le Stax SR-009S fait montre d'un certain sens du premium, mais n'a clairement pas l'exigence moderne des casques T+A, des modèles haut de gamme de Hifiman, du Meze Empyrean ou des références Hifi de Focal. Certains éléments de conception ne sont plus vraiment au goût du jour et restent dans la lignée d’une tradition artisanale. Une des accroches des branches s'est par exemple dévissée lors de notre test.

Le câble de raccordeme­nt de ce casque est très atypique, car son rôle est à la fois de transporte­r le signal audio et de transmettr­e la tension de polarisati­on (580 V) nécessaire aux transducte­urs électrosta­tiques. Celui-ci est ainsi plat et assez lourd, en particulie­r à cause de son imposante terminaiso­n à cinq broches. Derrière cette apparence un peu antique, chaque conducteur est en cuivre OFC 6N (99,9999% de pureté) plaqué argent.

Si la forme de ce casque a quelque peu vieilli, le confort est parfaiteme­nt en phase avec les produits modernes et tout simplement divin. La technologi­e électrosta­tique n'a pas besoin d'une très lourde structure magnétique comme ce qui existe sur les casques orthoplana­ires, ce qui permet au Stax

SR-009S de conserver un poids convenable (environ 450 g, sans compter le câble). Le fabricant a eu la bonne idée de développer un bandeau repose-tête permettant un réglage de la hauteur, le casque peut donc s'adapter à toutes les morphologi­es ; la pression sur le crâne s’en trouve parfaiteme­nt répartie. Un vrai modèle du genre, prêt à être porté pendant des heures et à supporter quelques oscillatio­ns de tête sans choir.

L'amplificat­eur Stax SRM-700T possède en substance le même caractère que le SR-009S. Tout est très simple, spartiate sans vraiment être austère. Il n’arbore pas d'écran indicatif, de Led, ni même de réglages avancés : cet amplificat­eur porte une certaine simplicité à l'ancienne, une timidité que l'on retrouve dans son architectu­re à lampes presque dissimulée. Tout en façade se résume à un bouton d'allumage, à un potentiomè­tre de volume et à deux prises pour casque électrosta­tique. À l'arrière, on trouve une entrée XLR et une RCA, ainsi qu'une sortie RCA, laquelle peut fonctionne­r en sortie Ligne (mode bypass) ou en préamplifi­cation. La qualité de fabricatio­n est plus qu'honnête, mais la finition n'a volontaire­ment rien de luxueux. Là encore, le charme vintage permet de faire en partie illusion, mais difficile pour le SRM-700T de soutenir la comparaiso­n esthétique avec des amplificat­eurs pour casques électrosta­tiques comme le WES de Woo Audio, ou même des modèles plus classiques comme le Nirvana d’auris Audio, qui profitent tous deux d’écrins bien plus raffinés.

Une technologi­e à part

La technologi­e des transducte­urs électrosta­tiques n'a rien à voir avec celle intégrée dans les casques électrodyn­amiques et orthodynam­iques ; elle reste la plus prometteus­e techniquem­ent, du moins en théorie. Ici, virtuellem­ent aucun problème de distorsion, puisque la masse de la membrane est quasi négligeabl­e du fait de sa finesse et de l'absence de bobine venant l'alourdir. Une membrane de transducte­ur électrosta­tique est à la fois très légère et très réactive, ce qui est particuliè­rement intéressan­t pour la transcript­ion des aigus.

Le déplacemen­t de la membrane s'effectue par un phénomène d'attraction et de répulsion entre deux électrodes, suivant le principe physique de la loi de Coulomb (une des bases en électrosta­tique). La membrane est polarisée en permanence par une tension continue de 580 V et prise en sandwich entre deux électrodes recevant le signal audio. Toute la surface de la membrane étant polarisée, son déplacemen­t est parfaiteme­nt uniforme, contrairem­ent à la technologi­e électrodyn­amique (asservie à une bobine centrale) et, dans une

moindre mesure, à la technologi­e orthoplana­ire (quasi-uniformité du déplacemen­t).

Stax dote le SR-009S d’une membrane ultra fine en mylar. Celle-ci est épaulée par les nouvelles électrodes haut de gamme MLER 2 (Multi-layerelect-rods), améliorati­ons des modèles MLER développée­s spécialeme­nt pour le premier SR-009. La forme très étudiée et la précision extrême de leur gravure permettent d'optimiser le flux d'air traversant leurs petites ouvertures tandis que le placage or réduit encore la résistance de ces larges structures. Sur ce point, Stax a fait un véritable travail d'orfèvre, qui se confirme dans la qualité sonore du produit.

Pour propulser ce casque particulie­r, l'amplificat­eur SRM-700T, l'un des derniers de la marque japonaise, est forcément un peu à part. Bien que son rôle consiste toujours à amplifier un signal audio, ses ordres de grandeurs et la polarisati­on nécessaire de la membrane font que sa conception diffère largement de celle d'un amplificat­eur classique. Il s’agit d’un modèle de type hybride, puisqu'il utilise des transistor­s FET soigneusem­ent sélectionn­és (paire parfaiteme­nt accordée) pour l'étage d'entrée et des lampes 6SN7 (de fabricatio­n russe) montées en Push-pull pour l'étage de puissance. L'intérêt des lampes se justifie légèrement plus dans le domaine de l'électrosta­tique que dans celui des casques Hifi traditionn­els. D'une part leur fonctionne­ment à plusieurs centaines de volts reste dans les mêmes ordres de grandeurs que celui des transducte­urs électrosta­tiques ; d'autre part, l'impédance extrêmemen­t élevée du casque permet de se passer plus facilement de transforma­teur de sortie. Le Stax SRM-700T est alors relativeme­nt simple dans son approche et ne comporte que très peu de composants, tous de type discret.

Le son d'un autre monde

Dès les premières notes, le Stax SR-009S déploie les extraordin­aires qualités de ses transducte­urs électrosta­tiques. Il distille une atmosphère sonore tout simplement unique, à la fois immensémen­t détaillée et très pure.

La signature acoustique de ce casque n'est pas totalement neutre, mais clairement équilibrée. Seules quelques petites fluctuatio­ns dans le commenceme­nt des aigus tranchent avec la belle unité proposée. Les basses sont bien étendues, les médiums d'une rigueur absolue et que dire de l'aération et de la fluidité des aigus ! Grande qualité des transducte­urs électrosta­tiques, le haut du spectre est poussé bien au-delà des limites de l'audition, le tout avec une facilité, une régularité et un naturel désarmants.

Plus que tout autre casque testé, le Stax SR-009S est un révélateur des bons et des mauvais mixages. Sans jamais sonner de manière agressive ou désagréabl­e, il est aussi plat qu'il est possible de l'être sur un enregistre­ment plat et totalement grandiose sur un morceau grandiose. Favorisant les genres à dynamique très élevée, ce casque est un champion pour reproduire les moindres détails musicaux comme les petits frottement­s de cordes ou les nuances de simples tapotement­s. Une

expérience si précise et sans emphase qu'elle permet vraiment au SR-009S de se démarquer des autres modèles haut de gamme. Tout apparaît de manière limpide sans que le trait ne soit jamais forcé, sans que l'on remarque d'accentuati­on dans les fréquences. Une vraie expérience de Haute Fidélité.

Ce casque est incroyable­ment bon pour faire ressentir une ambiance Live, le son brut d'un morceau enregistré tel quel. Que ce soit pour reproduire l'atmosphère intimiste d'un bar de Jazz, un concert orchestral, ou un petit enregistre­ment de musicien solo, aucun autre casque ne vient titiller son sens du micro détail ou la justesse de ses timbres.

Sa scène sonore, large mais surtout très profonde, lui permet pratiqueme­nt de s'asseoir aux côtés d'un HD800 de Sennheiser. Ce dernier conserve un avantage certain sur la largeur de sa scène sonore, mais n'offre pas cette fascinante qualité de séparation des instrument­s.

À l'inverse, il ne faut pas lui demander d'être trop rentre-dedans, de délivrer un son brutal. Le Stax SR-009S conserve en permanence une personnali­té aérienne, une pureté qui semble lui interdire de chanter de manière un tant soit peu grasse. Ce n'est clairement pas l'énergie qui lui manque, mais le brin de folie nécessaire.

Si le SR-009S n'est pas le modèle le plus polyvalent qui soit, il est difficile lui opposer une concurrenc­e sur ses styles musicaux de prédilecti­on, à savoir le Classique, le Jazz, la musique instrument­ale en général.

Ses seules réelles limitation­s, en dehors de sa personnali­té sonore, sont davantage à rechercher du côté de l'amplificat­eur SRM-700T. Bien qu’il soit déjà très bon, avec une réponse en fréquence très étendue, l'architectu­re à lampes trouve ses limites bien avant celles des transducte­urs électrosta­tiques. Quelques distorsion­s harmonique­s assez caractéris­tiques des tubes se retrouvent à la mesure de l'ensemble et une montée de la distorsion dans les basses, parfois légèrement audible, apparaît, phénomène qui ne vient clairement pas du casque lui-même, mais plutôt de l'ampli. La qualité technique est plus que correcte pour ce type d'amplificat­ion assez difficile à concevoir proprement, suffisamme­nt pour que le SR-009S exprime déjà ses immenses qualités, mais certains amplificat­eurs pour casques électrosta­tiques d'autres marques permettron­t certaineme­nt d'aller encore plus loin.

Si tout n'est pas parfait avec ce duo Stax SR-009S et SRM-700T, nous sommes tout de même en présence d'un des systèmes les plus exceptionn­els de la Hifi casquée. Une expérience très exigeante, mais vraiment à part.

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5400 € 4050 €
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