Parents

Je me sens coupable de ne pas avoir accouché naturellem­ent.”

35 ans, maman de Victoria (9 ans), Marceau (6 ans) et Côme (2 ans).

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« Pour mon troisième enfant, je rêvais de pouvoir attraper notre bébé sous les bras lors de l’accoucheme­nt pour finir de le sortir. Ça faisait partie de mon projet de naissance. Sauf que le jour J, rien ne s’est déroulé comme prévu ! Quand on m’a percé la poche des eaux à la maternité, le cordon ombilical est passé devant la tête du foetus et s’est retrouvé comprimé. Ce qu’on appelle dans le jargon médical une procidence du cordon. Résultat: le bébé n’était plus oxygéné correcteme­nt et risquait de s’étrangler. Il fallait l’extraire en urgence. En moins de 5 minutes, j’ai donc quitté la salle de travail pour descendre au bloc. On a conduit mon conjoint en salle d’attente sans rien lui dire, à part que le pronostic vital de notre enfant était engagé. Je crois qu’il n’a jamais autant prié de sa vie. Finalement, Côme a très vite été sorti. A mon grand soulagemen­t, il n’a pas eu besoin de réanimatio­n.

Mon mari a été beaucoup plus acteur que moi

Comme j’ai dû subir une révision utérine, je ne l’ai pas vu tout de suite. Je l’ai juste entendu pleurer. Ça m’a rassurée. Mais comme nous avions gardé la surprise jusqu’au bout, je ne connaissai­s pas son sexe. Aussi étonnant que cela puisse paraître, mon mari a été beaucoup plus acteur que moi. Il a été appelé dès que Côme est arrivé en salle de soins. Il a ainsi pu assister à la prise des mensuratio­ns. D’après ce qu’il m’a raconté plus tard, une auxiliaire de puéricultu­re a alors voulu donner un biberon à notre fils, mais il lui a expliqué que j’avais toujours allaité et que si, en plus du choc de la césarienne, je ne pouvais pas le faire cette fois-ci, je ne m’en remettrais pas. Du coup, elle a amené Côme en salle de réveil pour que je puisse lui donner la première tétée. Malheureus­ement, j’ai très peu de souvenirs de ce moment car j’étais encore sous l’effet de l’anesthésie. Les jours suivants, à la maternité, j’ai aussi dû “passer la main” pour les premiers soins, notamment le bain, car je ne pouvais pas me lever seule.

Par chance, ça n’a pas du tout pesé sur le lien que j’ai avec Côme, au contraire. J’ai eu tellement peur de le perdre que j’ai tout de suite été très fusionnell­e avec lui. Même si, vingt mois après, je me remets toujours difficilem­ent de cet accoucheme­nt qu’on m’a “volé”. À tel point que j’ai dû entamer une psychothér­apie. Je me sens en effet terribleme­nt coupable de ne pas avoir réussi à accoucher naturellem­ent de Côme, comme ce fut le cas pour mes premiers enfants. J’ai l’impression que mon corps m’a trahie. Beaucoup de mes proches ont du mal à le comprendre et ne cessent de me répéter: “L’essentiel, c’est que le bébé aille bien. ” Comme si, au fond, ma souffrance n’était pas légitime. »

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