Parents

“Pour moi, ce bébé était un inconnu sorti de nulle part.”

- PROPOS RECUEILLIS PAR ÉLODIE CHERMANN

« C’était le 15 mai 2015. La soirée la plus rapide de toute ma vie ! Alors que je dînais en famille à 60 km de la maison, j’ai ressenti comme une secousse dans mon ventre. Vu que j’arrivais à la fin de mon 7e mois, je ne me suis pas inquiétée, pensant que mon bébé s’était retourné… Jusqu’au moment où j’ai vu du sang couler par jets entre mes jambes. Mon conjoint m’a aussitôt conduite aux urgences les plus proches. Les médecins ont découvert que j’avais une languette praevia, c’est-à-dire un bout de placenta qui s’était décollé et obstruait mon col de l’utérus. Par précaution, ils ont décidé de me garder le week-end, et de me faire une injection de corticoïde­s pour accélérer la maturation des poumons du bébé, au cas où je devrais accoucher dans les 48heures. J’ai également reçu une perfusion censée arrêter les contractio­ns et les saignement­s. Mais après plus d’une heure d’examen, le produit ne faisait toujours pas effet et je me vidais littéralem­ent de mon sang. On m’a alors transférée en salle d’accoucheme­nt. Après trois heures d’attente, j’ai commencé à éprouver des contractio­ns et une forte envie de vomir. En même temps, j’entendais le coeur de mon bébé ralentir au monitoring. Les sagesfemme­s m’ont expliqué que mon bébé et moi étions en danger et qu’on allait donc devoir m’accoucher au plus vite. J’ai fondu en larmes.

Je n’osais pas le toucher

En principe, une grossesse devait durer neuf mois. Ce n’était donc pas possible que mon fils arrive maintenant. C’était trop tôt. Je ne me sentais pas prête à devenir maman. Quand on m’a emmenée au bloc, j’étais en pleine crise d’angoisse. Sentir l’anesthésia­nt monter dans mes veines a presque été un soulagemen­t. Mais quand je me suis réveillée deux heures plus tard, j’étais perdue. Mon conjoint a eu beau m’expliquer que Liam était né, j’étais persuadée qu’il était encore dans mon ventre. Pour m’aider à réaliser, il m’a montré une photo qu’il avait prise sur son portable quelques secondes avant le transfert de Liam en soins intensifs.

Il m’a fallu attendre plus de huit heures pour rencontrer mon fils “en vrai”. Avec son 1,770 kg et ses 41 cm, il semblait tellement petit dans sa couveuse que je refusais d’admettre que c’était mon enfant. D’autant qu’avec le tas de fils et la sonde qui lui cachaient le visage, il m’était impossible de déceler le moindre trait de ressemblan­ce. Quand on l’a mis sur moi en peau à peau, je me suis donc sentie très mal à l’aise. Pour moi, ce bébé était un inconnu sorti de nulle part. Je n’osais pas le toucher. Pendant toute son hospitalis­ation, qui a duré un mois et demi, je me suis forcée à m’occuper de lui, mais j’avais l’impression de jouer un rôle. C’est d’ailleurs sans doute pour ça que je n’ai jamais eu de montée de lait… Je ne me suis vraiment sentie maman qu’à sa sortie de l’hôpital. Là, c’était vraiment une évidence. »

« Ce n’était pas possible que mon fils arrive maintenant. C’était trop tôt. Je ne me sentais pas prête à devenir maman. »

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France