Il se déguise en fille

À la maison, avec une robe et des chaussures à talons, il se prend pour une fille. Un jeu qui permet souvent de mieux affirmer sa vraie identité…

Alban, 7 ans, prend plaisir à se déguiser en fille. Il laisse sa soeur aînée lui faire des couettes, enfile des costumes de princesse et les chaussures à talons de sa mère. « C’est de plus en plus fréquent de voir des garçons se déguiser en fille, sans que l’on sache vraiment pourquoi. Peut-être parce que la société le tolère davantage. Les garçons ont peut-être aussi le sentiment qu’être une fille donne plus de pouvoir, qu’elles ont le droit de faire plus de choses. Elles ont, par exemple, une plus grande liberté vestimentaire. Cette impression peut être renforcée si leur mère s’occupe davantage d’eux, travaille, si l’enfant à une maîtresse et une directrice dans son école », analyse le Dr Stéphane Clerget, pédopsychiatre*. Le garçon peut alors prendre pour modèle ces figures d’autorité.

Expérimenter ce que l’on n’est pas

Pour l’enfant, il s’agit aussi de tester un genre différent de celui qui lui a été attribué à la naissance. En se déguisant en fille, il construit son identité réelle pour savoir ce qu’il veut et ne veut pas être. Et ce jeu l’aide à s’affirmer en tant que garçon.

« Vers 3 ans, l’enfant prend conscience de son genre. C’est rassurant et frustrant à la fois de savoir qu’on n’est pas quelqu’un d’autre. Là, il cherche à se projeter dans un autre univers, à contourner les contraintes réelles du quotidien. Ça ne veut pas dire qu’il veut être une fille, mais qu’il veut être dans la peau d’une fille », explique le pédopsychiatre. Ainsi, selon lui, ce n’est pas plus sain ou malsain que de se déguiser en pirate, surtout si ça reste dans un cadre ludique. En jouant ainsi, l’enfant laisse simplement libre cours à son imaginaire.

Et si c’est plus qu’un jeu ?

En revanche, s’il exprime très souvent le besoin de se déguiser en fille, notamment en dehors d’un temps de jeu, mieux vaut chercher à savoir pourquoi. Souffre-t-il d’être dans la peau d’un garçon ? A-t-il l’impression de pouvoir faire moins de choses que les filles ? On peut lui expliquer qu’être un garçon l’autorise à jouer à ce qu’il veut, y compris à la poupée. On lui montre ce qu’il y a de bien à être un garçon et on le soutient dans ses rêves : oui, un garçon peut être danseur étoile ou sage-femme. Et puis, « Ce n’est pas parce qu’il se déguise en fille qu’il ne sera pas viril. C’est quelque chose en plus, pas en moins », conclut le Dr Stéphane Clerget. On dédramatise donc cet amusement passager. (*) Auteur de “Nos enfants aussi ont un sexe” (éd. Robert Laffont).

Pourquoi ne pas se déguiser en fille… c’est comme se déguiser en pirate ! L’enfant laisse simplement libre cours à son imaginaire.