J’ai dû apprendre à coiffer les cheveux de ma fille.
Frédérique, 46 ans, mère de Fleur, 13 ans.
J’habite à Londres depuis plus de vingt ans, et Fleur y est née. Elle est métisse de par son père qui est anglais et écossais, avec des origines caribéennes, de Sainte Lucie. Alors j’ai dû apprendre à coiffer les cheveux naturels de ma petite fille. Pas évident! Au début, je testais des produits pour les nourrir et les démêler, produits qui n’étaient pas toujours très adaptés. J’ai demandé des conseils auprès de mes amies noires, je me suis aussi renseignée auprès des magasins spécialisés de mon quartier pour savoir quels produits utiliser sur ces cheveux. Et j’avoue, j’ai dû aussi improviser, comme beaucoup de parents. Aujourd’hui, elle a ses habitudes, ses produits et elle se coiffe toute seule.
On vit dans un quartier de Londres où il y a un grand brassage de cultures et de religions
L’école de Fleur est hyper mixte, autant socialement que culturellement. Les meilleures amies de ma fille sont nippo-écossaises, caribéennes et anglaises. Elles mangent les unes chez les autres, découvrent les spécialités de chacune. Je n’ai jamais ressenti ici de racisme à l’égard de ma fille. C’est peut-être dû à la mixité de la ville, de mon quartier ou à l’effort qui est fait, aussi à l’école. Chaque année, à l’occasion du “Black History Month”, les élèves apprennent, dès le primaire, l’esclavage, les oeuvres et les vies d’auteurs noirs, des chansons. Cette année, c’est l’empire britannique et la colonisation anglaise au programme, un sujet qui révolte ma fille !
Avec le mouvement “Black Lives Matter”, Fleur a été assez secouée par l’actualité
Elle a fait des dessins pour soutenir le mouvement, elle se sent concernée. On en parle beaucoup à la maison, avec mon compagnon aussi, très engagé sur ces questions-là.
C’est à l’occasion de nos allers-retours en France que j’ai été témoin de réflexions racistes à l’égard de ma fille, mais ça a été, heureusement, assez anecdotique. Plus récemment, Fleur a été choquée de voir dans une maison familiale une grande statue d’un groom noir, en mode serviteur, avec des gants blancs. Elle m’a demandé si c’était normal d’avoir ça chez soi. Non, pas vraiment et ça m’a toujours mise hors de moi. On m’a expliqué que ce n’était pas forcément malveillant ou raciste, que ce type de déco avait pu être à la mode. C’est un argument que je n’ai jamais trouvé très convaincant, mais je n’ai pas encore osé aborder le sujet frontalement. Fleur osera peut-être plus tard… »