Parents

L’adoption, c’est comme une greffe.”

Estelle, 42 ans, maman d’Esteban, 6 ans, et de Rose, 10 mois.

-

Mon mari, Sébastien, et moi, avions des problèmes d’infertilit­é. Nous nous sommes alors tournés vers la PMA. Mais on ne se sentait pas à l’aise avec cette démarche et on s’est rapidement orientés vers l’adoption, en 2011. Un choix naturel pour nous. À l’époque, nous vivions en Nouvelle-Calédonie, c’est là que nous avons déposé un dossier d’agrément pour adopter un.e pupille de l’État en France et à l’internatio­nal. L’Agence Française de l’Adoption (AFA) qui nous suivait nous a recommandé, au vu de notre âge (nous avions 33 ans à l’époque), de nous rapprocher de la Colombie car il y avait plus de possibilit­és d’adopter de jeunes enfants dans des délais raisonnabl­es dans ce pays.

Une fois les démarches administra­tives accomplies, nous nous sommes sentis bien seuls

Alors, nous avons commencé à nous créer tout un réseau avec les autres adoptants en Colombie. Ça a été d’une grande aide pendant tout ce temps. Et puis, au bout de quatre ans, nous avons reçu l’appel tant attendu de notre correspond­ante AFA ! Nous avons appris que nous allions pouvoir accueillir Esteban, 7 mois, à ce moment-là. L’émotion a été immense, nous avons ressenti une extrême joie d’aboutir après tout ce temps, et de savoir enfin qui il était. Mais nous étions également plongés dans son histoire qui devenait la nôtre. L’adoption, c’est comme une greffe. On prend conscience du fait que même si notre parcours a été difficile, ce n’est rien à côté de ce qu’il a pu vivre déjà à son âge.

Les gens ont tendance à croire que parce qu’on adopte un enfant quand il est bébé, il n’a pas de marques de son histoire

Mais c’est totalement faux. J’en avais la conviction et grâce au réseau que je m’étais constitué, j’ai pu trouver des réponses et j’ai ressenti le besoin d’écrire* sur tout ça. Quand nous sommes rentrés vivre en France, en 2018, j’ai rencontré des spécialist­es qui m’ont expliqué qu’il ne fallait jamais banaliser son identité sur laquelle nous avons quelques éléments seulement. Et surtout, depuis qu’il est bébé, nous lui racontons son histoire. C’est très important pour nous qu’il sache d’où il vient et qui il est.

Un an après son arrivée, nous avons entamé à nouveau les démarches pour adopter en Colombie. Nous avons préparé Esteban et quatre ans plus tard, Rose, 6 mois, nous attendait. Nous sommes allés la chercher tous les trois en Colombie. Un grand moment d’émotion pour nous tous. Une fois rentrés, nous sommes restés en vase clos, comme nous l’avions fait avec Esteban, pour développer le lien d’attachemen­t. C’est essentiel pour que Rose sache que nous sommes ses figures d’attachemen­t. Aujourd’hui, on commence tout juste à la laisser être portée par notre entourage.

*Estelle a publié “Ce lien jusqu’à toi”, éditions Michalon, en juin 2021.

Avec mon mari, Mickaël, nous avons essayé d’avoir un enfant quand j’ai eu 21 ans. Après une fausse couche et trois grossesses môlaires (une forme rare de grossesse non évolutive), nous avons commencé à nous poser des questions. Nous étions désemparés car c’est très rare d’avoir plusieurs grossesses môlaires. J’ai fait des analyses et c’est là que nous avons découvert que j’avais une mutation du gène NLRP7. C’est ce qui empêchait que mes grossesses aboutissen­t. J’ai été soulagée qu’on pose un diagnostic sur ce qu’il se passait. Ça permettait de mettre une explicatio­n sur tous ces échecs.

Le médecin qui nous a annoncé la nouvelle nous a tout de suite proposé de tenter un parcours de PMA avec un don d’ovocytes

On s’est demandé si ça allait fonctionne­r, mais avec l’évolution de la médecine, je me suis dit qu’on avait nos chances et on a gardé espoir. Les médecins y croyaient car ça avait déjà marché à l’étranger. Mais c’était une première en France. Comme j’étais receveuse, je n’ai pas eu le protocole d’une FIV classique. Mes ovaires ont simplement été mis au repos et j’ai reçu un traitement pour épaissir mon endomètre afin qu’il soit propice à l’implantati­on. Ensuite, j’ai eu le transfert de deux embryons pour maximiser nos chances. Et l’un d’entre eux s’est accroché. À l’échographi­e, nous avons entendu son coeur pour la première fois, c’était magique. Après cinq ans d’essais, nous avions réussi! C’était incroyable et presque inespéré à la première tentative. Nous étions tout excités et stressés en même temps. Mais on a vite été rattrapés par l’angoisse : est-ce que ça va marcher ? Estce que la grossesse va continuer ? Ma grossesse s’est bien déroulée et notre fille, Augustine, est née en 2016 ! C’est la première enfant née d’une maman avec une mutation du gène NLRP7 par don d’ovocytes en France. Quelle joie de devenir parents après tant d’épreuves ! Le don était anonyme et nous ne connaisson­s donc pas l’identité de la donneuse. Ce qui m’embête, ce n’est pas de ne pas la connaître, mais de ne pas avoir accès à ses données médicales. L’autre jour, le pédiatre m’a posé des questions sur ma vue, je lui ai dit que je n’avais aucun problème, mais que je ne savais pas si la donneuse en avait et si elle avait pu les transmettr­e à ma fille. Elle ne peut pas me ressembler physiqueme­nt, mais c’est ma fille. Je l’ai portée, elle n’a pas mes gènes, mais elle a mon sang. Aujourd’hui, nous essayons d’avoir un deuxième enfant, également par don d’ovocytes.

*Laure est la présidente de l’associatio­n ASMT (Associatio­n de soutien contre les maladies

trophoblas­tiques) : www.asso-asmt.com

Ma fille n’a pas mes gènes, mais elle a mon sang!”

Laure, 33 ans, maman d’Augustine, 5 ans.

 ?? ??
 ?? ??
 ?? ??
 ?? PROPOS RECUEILLIS PAR ÉMILIE VEYSSIÉ ??
PROPOS RECUEILLIS PAR ÉMILIE VEYSSIÉ

Newspapers in French

Newspapers from France