Vincent, 32 ans, papa de Noah, 6 mois.
Je ne milite pas pour soutenir des causes féministes, je ne descends pas dans la rue pour appuyer ces mouvements qui visent à rendre la société plus égalitaire entre les hommes et les femmes, mais de par mon comportement à la maison, j’essaye de faire changer les choses. C’est certainement un peu naïf. J’ai toujours été très investi dans les tâches ménagères. Avant la naissance de mon fils, j’appréciais de faire le ménage parce que ça me vidait la tête et parce que j’aime habiter dans une maison propre. Aujourd’hui, étant papa depuis six mois, ça me paraît tellement normal de m’occuper de mon bébé et de gérer les tâches du quotidien que j’ai l’impression que c’est un non-sujet.
Est-ce que je suis un père féministe?
Est-ce que c’est juste une étiquette qu’on met aux pères qui s’investissent un peu dans la parentalité? Ça me paraît tellement naturel! J’ai déjà entendu ma mère dire que je suis un papa poule parce que je prends l’initiative de changer les couches de mon fils, mais il n’y a rien d’étonnant à cela. La chose qui serait la plus choquante pour moi, ce serait de dire que comme je suis un homme, je ne m’occupe pas du change. Je pense que c’est une question d’éducation. Lors d’une soirée entre amis, un jeune papa me disait qu’il était très content que sa compagne ait décidé d’allaiter car, comme ça, il était peinard la nuit. J’ai été scandalisé. Pourquoi l’alimentation du bébé ou les réveils nocturnes devraient forcément être du ressort de la maman? Si on est un peu flemmard, il ne faut pas faire d’enfant. Ma compagne a décidé de ne pas allaiter et, dans un sens, j’en ai été très content, car je pouvais m’investir dans cette mission et partager ce moment, si spécial, avec mon fils.
Pendant la grossesse, j’ai été frustré de ne pas avoir ce lien viscéral avec notre enfant. Après la naissance, j’ai reçu une décharge de responsabilités et j’étais très heureux de pouvoir, enfin, jouer mon rôle de père. Le premier mois, on a vécu dans une bulle et j’ai essayé de faire en sorte que notre quotidien soit le plus doux possible. J’enchaînais les lessives, le ménage et les courses. Lorsque j’ai repris le travail, j’ai beaucoup culpabilisé. J’aurais préféré être à la maison avec eux. D’ailleurs, on devrait avoir la possibilité de rester avec le bébé la première année. Il se passe tellement de choses. Ça rendrait service aux entreprises, car on n’irait pas travailler crevé et stressé. Du coup, lorsque Noah avait 1 mois, quand je rentrais, je m’occupais de tout pour que ma compagne puisse souffler. Pareil pour les nuits, j’avais à coeur de me lever lorsque le petit pleurait pour qu’elle se repose le plus possible. Il était très important pour moi qu’elle prenne du temps pour elle. J’avoue que c’était même un plaisir pour moi de me dire que j’allais gérer les réveils et les biberons nocturnes. Je me sentais investi et utile. Dire que des pères sont coincés dans des injonctions sexistes que leur impose la société est un faux débat.
On s’enferme dans ce qui nous convient
Ce n’est pas difficile de se sortir de la masculinité toxique ou des préjugés sexistes que l’on projette sur les pères. Si tu as envie de t’occuper de ton enfant, tu peux. Un homme peut prendre ses responsabilités de père et inverser la situation. Je pense que l’on s’enferme dans ce qui nous convient. Il y a de la pression sur les hommes et les femmes dans notre société, c’est certain, mais il ne faut pas que ça devienne une excuse. Il y a certes des schémas de parentalité qui tendent à se reproduire, mais nous restons maîtres de notre vie et de notre destin. »