Elle a peur de faire caca
Elle ne veut plus aller à la selle et se crée des maux de ventre. Une angoisse banale qu’il faut désamorcer au plus vite.
Mellie, 30 mois, est constipée : elle a une peur bleue d’aller à la selle. Du coup, elle se retient. Sa maman a consulté sa pédiatre, car elle souffre de maux de ventre. Après auscultation, le problème n’est pas physiologique. Mellie souffre d’un blocage psychologique que connaissent de nombreux enfants lorsqu’ils expérimentent la propreté : elle est stressée à l’idée d’expulser de la matière de son corps. Elle vit ce moment comme une perte.
Le contrôle de son corps
Cette phobie, connue sous le nom d’apopathophobie, a commencé le jour où Mellie a explosé en sanglots lorsqu’elle a vu ses excréments partir dans la cuvette des toilettes. Elle a refusé qu’on tire la chasse d’eau et fasse disparaître sa crotte. Un comportement normal selon Stephan Valentin, docteur en psychologie, spécialisé dans la petite enfance : « À cet âge-là, beaucoup d’enfants veulent être dans le contrôle. C’est pour ça d’ailleurs qu’ils tiennent tête à leurs parents, car ils sont en pleine phase d’opposition. Mellie veut être dans le contrôle de son corps. Pour elle, ses excréments lui appartiennent. Lorsqu’elle fait ses besoins, elle a l’impression de se séparer d’une partie d’ellemême et ça la déstabilise ». Une inquiétude que Stephan Valentin explique par le fait que « les jeunes enfants n’ont pas intégré “la permanence de l’objet”. « Ce que Mellie ne voit plus, n’existe plus pour elle, ça l’angoisse. Du coup, elle ne comprend pas pourquoi on détruit ce qui lui appartient. L’enfant se met à la place de l’objet et a peur de finir, lui aussi, dans le néant. »
On dédramatise
Pour désamorcer cette peur, « Tout d’abord, on ne met pas de pression autour de la propreté, insiste Stephan Valentin. On sait que l’enfant est dans une phase d’opposition. Par conséquent, plus on l’oblige à faire quelque chose, plus il peut se braquer.
Si on dédramatise la situation, l’opposition de l’enfant perd de l’intérêt et il accepte mieux les choses. Pareil, on évite de le gronder s’il fait caca dans sa couche, car il n’a pas encore le total contrôle de ses sphincters. » Pour lui faire accepter cette solution d’hygiène, il faut lui offrir la possibilité de maîtriser son environnement et lui donner envie de s’autonomiser. « Sa maman peut lui montrer qu’elle va aussi aux toilettes, car les enfants sont dans le mimétisme, propose-t-il. Mellie peut aussi tirer la chasse d’eau, ce qui la valorisera ». Stephan Valentin insiste sur le fait que chaque situation conflictuelle se désamorce souvent grâce à la communication : « Mellie doit comprendre les avantages d’agir comme une grande. On peut lui expliquer les bénéfices qu’il y a à ne plus porter de couches, comme un meilleur confort. » Plus les parents stressent, plus les enfants se bloquent. La meilleure thérapie pour Mellie serait que sa maman lâche prise et n’accorde plus d’importance au passage au pot. Cependant, si la constipation persiste et devient très inconfortable, elle devra retourner voir sa pédiatre. Mellie se verra certainement prescrire un laxatif qui l’aidera à expulser un potentiel bouchon de selles. Ce dernier pourrait la gêner à faire ses besoins, même dans sa couche.●