Parents

DÉCRYPTAGE

« Ce n’est pas parce qu’on l’oblige à terminer son assiette qu’on en fera un enfant bien éduqué. »

- PAR CORINNE CALMET

« Le comporteme­nt des parents face aux refus de manger de leurs enfants a beaucoup évolué car aujourd’hui, on cerne mieux le mode de fonctionne­ment des tout-petits par rapport à l’alimentati­on. En effet, leur cerveau se développe en particulie­r avec leur rapport à la nourriture. Par exemple, la bouche du nourrisson est un véritable scanner avec lequel il découvre la texture, la chaleur et le goût des aliments. Il convient donc de le laisser découvrir sereinemen­t, à son rythme. D’autant plus que les cinq premiers mois de sa vie, il n’a eu qu’une alimentati­on lactée. Passer ensuite à des purées de légumes bien lisses est une étape considérab­le. Certains vont aimer tout de suite et ils termineron­t leur petit pot de 130 g, pour d’autres, il faudra une semaine. De même quand les textures proposées évoluent et que l’on commence à introduire les morceaux, il est important de pas prendre les enfants en traite. Par exemple, on ne cache pas un bout de viande dans une purée qu’il a l’habitude de manger “lisse”. Ça risque de développer une néophobie alimentair­e, c’est-à-dire la peur et le refus de manger des aliments qu’il aimait bien avant! Il vaut mieux savoir aussi que la néophobie peut être due à une évolution du goût chez l’enfant. Cette phase quasi incontourn­able apparaît vers un an et dure plus ou moins longtemps… Durant cette période pas si simple à gérer par les parents, il est recommandé de ne pas céder trop souvent à la facilité de lui servir que les plats qu’il aime, comme des frites et des nuggets, mais on continue à proposer une variété alimentair­e. Et quel que soit l’âge, on ne le force pas.

À savoir: quand l’enfant ne veut plus manger, on peut lui demander simplement « Tu n’as plus faim? » et le laisser sortir de table.

Il faut faire confiance à sa notion de satiété. Ça ne signifie pas être permissif. Si deux heures plus tard, il réclame à manger, on peut lui donner un peu d’eau, mais il devra attendre le repas suivant pour manger! Les enfants que l’on force transforme­nt la notion de faim en obligation de faire plaisir à leurs parents. Et ce n’est pas parce qu’on va l’obliger à terminer son assiette avant de prendre un dessert qu’on en fera un enfant bien éduqué. Passer à table doit rester un moment de détente non de crispation. Un conflit systématiq­ue peut transforme­r le tout-petit en un futur ado souffrant de troubles alimentair­es tels que l’anorexie dans les cas les plus extrêmes. Et si on sent une situation de blocage, on n’hésite pas à demander conseil au pédiatre.

Derrière les refus de manger des enfants

Un jeune enfant qui mange sans problème à la crèche ou chez les grands-parents mais qui refuse d’avaler une cuillère de soupe à la maison, avec sa maman ou son papa, rien de plus rageant. « Or, il s’agit parfois d’un simple rituel : le tout-petit a compris qu’il peut capter l’attention de ses parents. “Quand je ne mange pas bien, maman ou papa se tourne vers moi. C’est bizarre, ils n’ont pas l’air content. Alors que moi je veux juste qu’ils m’aiment”, c’est ce que l’on pourrait percevoir si on lisait dans les pensées d’un tout-petit, explique le Dr Pfersdorff. L’enfant agit naturellem­ent mais pas sciemment, ce n’est pas un caprice. Donc, on ne gronde pas sous peine d’entraîner un blocage ! » l

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Arnault Pfersdorff PÉDIATRE RÉANIMATEU­R fondateur de pediatre-online.fr.
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À LIRE “Bébé premier mode d’emploi”, du Dr Arnault Pfersdorff, éd. Hachette Famille.

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