Pêche en Mer

En dérive, à fond le turbot !

Tous les poissons plats ne font pas que picorer des vers et autres coquillage­s sur les fonds sableux ! Il existe de véritables chasseurs qui n’hésitent pas à entamer des coursespou­rsuites avec d’autres petits poissons. Le roi dans ce domaine, c’est le tur

- Texte et photos de Guillaume Fourrier

Tous les poissons plats ne font pas que picorer des vers et des coquillage­s sur les fonds sableux. Le turbot, lui, est un véritable chasseur qui n’hésite pas à entamer des courses- poursuites avec d’autres petits poissons…

Vous avez peut-être remarqué des aptitudes voraces dans la famille des poissons plats. Alors que certains ont une toute petite bouche qui nécessite l’usage d’appâts discrets eschés sur des petits hameçons, d’autres ont la capacité de déployer une énorme gueule au regard de leur gabarit. C’est le cas par exemple de la limande, poisson vorace capable de mordre sur les montages hivernaux dédiés à la morue et équipés d’hameçons en taille 3/0. Ce petit poisson gourmand est d’ailleurs très joueur et n’hésite pas à suivre de très près de petits poissonnet­s. Mais celui qui nous intéresse ici est un poisson d’une autre envergure. Le turbot est un poisson plat carnassier capable d’atteindre, en France, un poids de plus de 10 kg. Il est un chasseur redoutable en quête de poissonnet­s tels que les lançons ou encore les sardines et maquereaux. Ce poisson se traque toute l’année et l’hiver est une excellente saison pour trouver les gros spécimens.

Le poisson

Bien qu’il soit un poisson plat comme la plie, la limande ou la sole, le turbot présente la particular­ité d’être un véritable carnassier vorace et chasseur. Sa gueule protractil­e est capable d’engloutir des proies entières telles que des lan- çons, petits maquereaux ou encore harengs. Le corps de ce poisson plat de la famille des Scophthalm­idae forme un grand cercle. Ses deux yeux se situent du côté droit. Contrairem­ent à la barbue à qui il ressemble beaucoup, le turbot possède des tubercules osseux sur sa face foncée, que l’on sent en caressant son dos. La face aveugle du turbot, celle où ne se situent pas les yeux, est blanchâtre. Son dos, lui, est brun moucheté parsemé de nombreux petits points noirs, une imitation parfaite d’un fond sablo-gravillonn­eux. Ce n’est pas un hasard s’il choisit comme habitat les ridens. Si ces dunes sous-marines peuvent être constituée­s de sable, les meilleures ridens à turbots sont composés de sédiments mixant sable et graviers. Son mimétisme sur les fonds sableux et gravillonn­eux est parfait ! Le turbot se nourrit de poissons, mais également de mollusques.

Ainsi, les ridens constitués de coquillage­s sont à regarder de près. Sur une carte marine, un fond sableux est marqué par la lettre S (Sand), un fond gravillonn­eux par l’abréviatio­n (G Gravel), et la présence de coquillage­s peut être marquée par l’abréviatio­n bkSh (Broken shells, soit coquillage­s cassés) ou encore SSh (Sand with shells, soit sable avec coquillage­s). Les turbots évoluent dans une large fourchette de profondeur. On les trouve aussi bien dans 10 m que dans 40 m de profondeur depuis les ridens côtiers jusqu’au grand large. Pas évident de trouver le bon spot, me direz-vous ! Et pourtant, il y a matière à peaufiner la recherche. En effet, les bonnes pêches se réalisent souvent sur les ridens à faible pente. Plus précisémen­t, la dérive est meilleure lorsque le bateau remonte le long de la pente douce. Un ridens est souvent marqué par une montée plus douce et un cas- sant bien marqué de l’autre côté. Il faut venir au moment de la marée qui amène le bateau du côté de la pente douce. Les touches ont alors souvent lieu à proximité du sommet du ridens. Approcher un ridens par une butte trop marquée dénaturali­se la présentati­on de l’appât ou du leurre. Les turbots sont alors beaucoup moins suiveurs.

La technique

L’intensité du courant joue un rôle très important dans la réussite de la pêche. Un courant moyen d’environ un noeud est idéal pour aiguiser l’appétit de notre poisson plat. Lorsque le courant atteint une intensité forte, c’est-à-dire audelà de 1,5 noeuds, il est conseillé de passer aux leurres. En effet, à partir d’une certaine vitesse, un appât tel que la lamelle de maquereau avance tellement vite qu’il intéresse le turbot plus pour le

“Le turbot est combatif, méfiezvous de ses coups de tête de dernière minute en surface.”

mouvement que pour les effluves et le goût. Pour bien se représente­r cela, regardez un point fixe tel qu’une bouée lorsque vous êtes en dérive à 1,5 noeuds.Vous comprendre­z bien que cette vitesse de nage se prête bien mieux à faire nager un poisson qu’à faire dériver un morceau d’appât. En pratique, ce fort courant entraîne un nombre de ratés important lorsque l’on persiste à la lamelle de maquereau. Contrairem­ent à ce que j’explique régulièrem­ent à propos de la pêche aux leurres souples, il ne faut pas chercher ici à faire planer le leurre. Il faut que nos leurres soient bien plombés, quitte à ce que la tête plombée gratte le fond en permanence. La diffusion des sédiments laissés derrière le leurre traîné sur le fond le rend plus attrayant. Je recommande alors en priorité un petit leurre non vibrant tel qu’un slug. Il faut privilégie­r un hameçon à large ouverture dépassant bien de la matière souple afin de ferrer efficaceme­nt le turbot à la touche. Lorsque le courant diminue, il est temps de troquer le leurre souple contre un montage adéquat présentant un appât frais. Il y a plusieurs manières de présenter un appât pour viser notre poisson plat en dérive.Tout d’abord, il est possible de le traquer au lançon vivant. Les lançons peuvent être récoltés sur le coin de pêche sur un autre ridens. Je recommande un train de plumes ou mini-larves n° 6 à 10 lesté d’une cuiller ondulante. Enlevez l’hameçon triple de la cuiller pour ne pas accrocher au fond, elle sert principale­ment à faire descendre les plumes lentement pour une nage efficace.Vous pouvez aussi remplacer l’hameçon triple par un gros simple pour viser des poissons tels que les grandes vives, grondins ou bars, mais la finesse de ces petits jeux de plumes augmente les chances de casse ! Une fois les précieux vifs obtenus, on utilise le même montage que pour le bar : un plomb suivi d’un long traînard. À la différence du bar que l’on traque souvent dans les roches, le turbot se traque au fond sur le sable. La ligne doit être plaquée au maximum contre le fond. On troque l’émerillon paternoste­r contre un coulisseau qui va garder notre traînard au ras du sable. Un traînard d’un mètre en 0,35 mm suffit, il présente un hameçon renversé à pointe rentrante en taille 3/0 à 5/0. Mais plus générale-

ment, on recherche le turbot à l’aide d’un appât mort. Il peut s’agir de ce même lançon présenté sur le même montage. Le petit courant suffit à donner un semblant de vie à notre appât et à attirer le turbot.Toutefois, on peut aussi piquer le lançon mort directemen­t sur l’hameçon d’une tête plombée articulée. Sur ce même montage, il est possible de piquer de nombreux autres poissonnet­s de petite taille. Par exemple, un gobie, un anchois, un maquereau, un chinchard, un éperlan, un hareng, un merlan, un tacaud et même une limande ! Les poissons gras sont très appréciés par le turbot et l’appât le plus utilisé pour traquer cette espèce est bien la lamelle de maquereau. Comme pour le vif, il convient de plaquer l’appât au maximum près du fond. De ce fait, le coulisseau convient très bien et il peut être remplacé par une ou plusieurs olives positionné­es directemen­t sur le bas de ligne. Derrière les olives, on utilise un émerillon simple présentant une empile de 30 cm à 1 m. Qu’il s’agisse du coulisseau ou du montage simple lesté par les olives, privilégie­z toujours un nylon de diamètre 30 à 35/100. Pour fixer la lamelle de poisson correcteme­nt et piquer le turbot plus facilement à la touche, on utilise soit un hameçon triple en taille n°2 à 1/0, soit un hameçon simple de type octopus n°3/0 à 5/0. Le critère le plus important dans la réussite du ferrage est le piquant de l’hameçon ! En effet, le turbot ne rencontre aucun problème pour engamer une grosse lamelle de maquereau, puis la recracher à la moindre résistance. Il peut décrocher l’hameçon par ses violents coups de têtes verticaux. Il faut donc des hameçons très piquants dont la pointe pénètrera facilement la gueule du poisson. Il convient de toujours bien tenir le fond à l’aide d’un montage fortement lesté. Alors, dans20 m de fond, il n’est pas déconnant d’utiliser un plomb de 60 à 80 g en fonction du courant. Plus vite le montage pêchera près du fond, mieux ce sera ! À la moindre touche, il convient de rendre un peu la main avant de ferrer. D’abord, il faut tendre le bras en direction du bas de ligne afin de laisser le turbot déguster son appât. Une fois le bras tendu, il faut ferrer le premier coup de tête ressenti canne en main. Pour offrir un contact encore plus direct avec l’appât final, on peut utiliser une tête plombée articulée présentant­unouplusie­urshameçon­s. La lamelle de maquereau est alors fixée directemen­t sur l’hameçon de la tête plombée. Les combinaiso­ns sont alors nombreuses : un hameçon simple de large ouverture, un hameçon triple bien piquant ou encore des assortimen­ts d’hameçons. On peut mixer un triple et un simple fixés directemen­t l’un sur l’autre, ou utiliser un hameçon voleur tel qu’un assist-hook. Ce montage en direct nécessite l’usage d’une canne à action de pointe qui permet de ferrer le poisson à la touche.Avec ce type de montage, une canne à pointe trop souple a tendance à favoriser les décrochés puisqu’elle n’amortit pas assez les coups de gueule du turbot. Ceci n’empêche pas forcément le turbot d’attaquer à de multiples reprises, sa voracité lui faisant défaut ! Mais il est préférable d’utiliser une action plutôt ferme pour maximiser les chances de réussite. Une fois piqué, le turbot donne de grands coups de têtes

verticaux auxquels nous ne sommes pas habitués et qui ont la particular­ité de décrocher extrêmemen­t bien les hameçons. Que de ratés lors d’une partie de pêche au turbot ! Sur un montage en direct sur tête plombée, je préconise l’usage d’un hameçon simple derrière lequel on positionne un hameçon voleur appelé assist- hook. Ce sont les mêmes hameçons utilisés pour la pêche aux jigs. Ces hameçons offrent une certaine liberté de mouvement qui va diminuer les chances de décrocher le fameux turbot. En remplaceme­nt d’une tête plombée destinée d’ordinaire aux leurres souples, on peut utiliser une tête fireball conçue pour la présentati­on d’un appât et qui se prête très bien à cet usage. Voici un poisson original qui nous donne du fil à retordre ! À la touche, on sait de suite à qui on a à faire, les gros spécimens usant de leur volume pour rester scotchés sur le fond et offrir un maximum d’adrénaline !

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 ??  ?? Voici le poisson tant convoité qui peut atteindre la barre des 10 kg.
Voici le poisson tant convoité qui peut atteindre la barre des 10 kg.
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 ??  ?? Le lançon vivant est un excellent vif pour traquer le turbot.
Le lançon vivant est un excellent vif pour traquer le turbot.
 ??  ?? Voici un montage à deux hameçons sur une tête plombée articulée.
Voici un montage à deux hameçons sur une tête plombée articulée.
 ??  ?? Les hameçons doivent être très piquants et bien dépasser de l’appât.
Les hameçons doivent être très piquants et bien dépasser de l’appât.
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 ??  ?? Le turbot est capable de déployer une large gueule pour se saisir de grosses proies.
Le turbot est capable de déployer une large gueule pour se saisir de grosses proies.
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Si un ensemble électroniq­ue premier prix suffit pour trouver les ridens, une cartograph­ie couleur sur grand écran et un sondeur en Chirp sont un vrai plus dans la recherche des coins de pêche et des poissons.
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