Réglementation et pêche au bar : chronique de la mort annoncée d’un fol espoir
Les 12 et 13 décembre dernier, après d’intenses discussions entre les 28 États membres et la Commission européenne dit- on, le Conseil des ministres européens de la pêche a finalement arrêté ce que seront les Totaux Admissibles de Capture ( TAC) et quotas
Ace sujet, en ne perdant pas de vue que la réglementation de la pêche du bar, aussi importante soit-elle à nos yeux, ne représente seulement qu’un chapitre parmi d’autres dans l’ensemble des dispositions légales adoptées, voici ce qui devrait donc avoir force de loi du 1er janvier au 31 décembre 2017.
Au-dessus du 48eme parallèle
(En gros, au-dessus d’Audierne) Au niveau professionnel, les chalutiers de fond n’auraient désormais droit qu’à 3% de prises “accidentelles” par jour, dans la limite de 400 kg par mois, ceci afin de tenir compte des captures inévitables de certains engins de pêche et d’éviter les rejets en mer. Les fileyeurs qui pratiquent une pêche artisanale bénéficieraient, eux, d’un plafond mensuel de capture de 250 kg. Quant aux ligneurs, ils conserveraient le quota annuel de 10 tonnes et pourraient pratiquer leur activité toute l’année en respectant cependant deux mois de fermeture, février et mars. Pour les récréatifs, ce serait la reconduction pure et simple de la réglementation 2016 : interdiction de prélèvement du bar durant le premier semestre, de janvier à juin (no-kill obligatoire) et 1 bar par jour et par pêcheur le deuxième semestre, de juillet à décembre 2017.
En-dessous du 48eme parallèle
Dans le Golfe de Gascogne où les stocks de bars resteraient suffisants, les ministres européens ont retoqué la Commission européenne en obtenant le retrait total des
propositions qu’elle avançait. Toutes les techniques de pêche du bar resteraient donc autorisées, à l’hameçon comme aux filets. Il s’est dit un moment que la taille minimale de capture du bar pour les pros pourrait passer de 36 cm à 38 cm, mais de ça, on en entend plus parler. Enfin, la France se serait engagée quant à elle à y limiter la pêche à 2,400 tonnes pour l’année. Concernant les récréatifs, le quota de prise serait maintenant établi à 5 bars par jour par personne. Vous constaterez dans l’énoncé de toutes ces mesures l’emploi du conditionnel car, à l’heure où j’écris ces lignes – le 9 janvier – aucun décret n’est encore officiel. Le Conseil des ministres européens de la pêche n’a donc pas suivi la Commission européenne qui avait émis des propositions courageuses et audacieuses. À savoir, notamment dans la zone nord, une pêche du bar seulement autorisée à l’hameçon en excluant donc toutes les autres techniques ; une pêche ouverte toute l’année avec une période d’interdiction de prélèvement de deux mois (février/ mars) pour tous, pêcheurs pros comme récréatifs ; une pêche récréative avec un quota de 10 poissons par jour et par pêcheur. Cela dit, est-ce une surprise ? Oui, car quasiment aucune proposition émise par la Commission européenne, hormis une toute petite avancée concernant les chaluts, n’a été retenue par les politiques et c’est bien la première fois que cela arrive. Et non, si l’on s’en réfère à la rencontre d’Alain Vidalies, Secrétaire d’État en charge de la Mer et de la Pêche, avec Jean Kiffer, président de la FNPPSF et membre de l’EAA, qui le recevait sur son stand au récent Nautic de Paris. À la demande de Jean Kiffer de « bien vouloir soutenir les propositions émises en faveur de la pêche de loisir, sans porter atteinte à toute autre, afin de soulager les contraintes qui lui avaient été imposées en 2016 », le Secrétaire d’État (qui représentera la France lors du Conseil des ministres européens de la pêche quelques jours plus tard, NDLR) lui répondit : « Il faut réfléchir aux meilleures modalités à partir d’un stock fragile et c’est tout le problème… Moi, cela ne me gêne pas, mais il ne faut pas que la position de la commission soit de dire la pêche de loisir, d’accord, et le reste… C’est ce qu’ils viennent de faire ! » Et d’ajouter quelques instants après : « Sur le moratoire, nous allons faire les choses comme l’année dernière ». Dès lors, tout en restant optimiste, il était clair que sauf extraordinaire accord de dernière minute entre Commission et Ministres, la messe était dite. Une fois encore et malgré les arguments apportés par les acteurs de la pêche de loisir (EAA et EFTTA), nos dirigeants européens ont choisi le concret. Que valent en effet les mots “amateurs”, “récréatifs”, “loisir” face à “professionnels”, “productivité”, “travail” ? À l’évidence pas grand-chose et cela peut aisément se comprendre. Pourtant… L’importance économique de la pêche de loisir avec les emplois qui s’y rapportent dans tous les secteurs, et ils sont nombreux, est certainement égale, voire peut-être même supérieure à la filière pêche professionnelle – une branche professionnelle qui n’est évidemment nullement question de remettre en cause tant elle est primordiale dans notre société. Ce choix fait par Bruxelles pour 2017 devrait donc amener le monde de la pêche de loisir à revoir sérieusement ses fondamentaux s’il veut être, dans le futur, à la fois audible et écouté. Cela ne pourra se faire que par la création d’une grande Fédération forte de la totalité des pêcheurs pratiquants en mer et d’un véritable audit chiffré et détaillé, montrant sans contestation possible l’impact économique que génère la pêche de loisir.