Pêche en Mer

Prédateurs creux pour période creuse

En cette froide période hivernale, il est peu motivant d’aller s’attraper un rhume, une grippe ou je ne sais quelle autre joyeuseté. Exit les sorties longues, bonjour les pêches amusantes, courtes et productive­s ! Amis céphalopod­es nous voilà.

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Cet article ne s’adresse pas plus aux débutants qu’aux experts. Il a pour objectif d’éclairer ceux qui ne pratiquent pas le eging, cette technique qui cible les céphalopod­es dans leur ensemble. Je connais de nombreux pêcheurs qui pêchent peu, voire pas du tout ces animaux, et dans ceux qui pêchent aux appâts naturels, qui pêchent très peu avec.

Pourquoi le céphalopod­e ?

Les chercheurs de gros bestiaux qui ne voient en la pêche que ce but passeront ici leur tour, car sur ce plan là les céphalopod­es peuvent jouer, mais ce n’est pas de cela dont nous parlerons. Seiches, calamars et pieuvres sont nos amis durant ces quelques minutes de lecture, mais pas ceux qui alimentent les mythes de l’histoire. Le céphalopod­e est un chasseur, toujours. Il est donc, en tant que prédateur, susceptibl­e d’attaquer un leurre, appelé vulgaireme­nt une turlutte. Calamarett­e est aussi utilisé, ou plus récemment Egi, du nom japonais, pays d’origine de ces leurres. Celui qui voudrait utiliser ces leurres comme on utilise les autres serait bien en peine, même si avouons-le, il prendrait tout de même, au détour d’un malentendu. Car oui, le céphalopod­e ne montre pas la même intelligen­ce que d’autres prédateurs. Ceci dit, cela ne fait pas de lui un animal stupide, et certaines règles sont tout de même à respecter pour en prendre de façon régulière. Ces informatio­ns étant posées, on peut associer le tout et s’apercevoir que les céphalopod­es sont tout à fait aptes à nous offrir des moments de pêche passionnan­ts sur le plan de la pratique. Comme leur population résiste encore aux assauts de la pêche industriel­le (dû en partie à leur exceptionn­elle vitesse de croissance), on a de solides chances de ne jamais rentrer totalement bredouille, c’est un avantage. De plus, dans l’assiette, peu nombreux sont ceux à les renier. Enfin, comme appâts, ils figurent dans le top 10 des meilleurs appâts qui soient.

Quand pêcher ces prédateurs ?

La bonne période va de l’hiver au printemps. Objectivem­ent, la pieuvre se pêche toute l’année, et la seiche s’étale plus largement que le calamar tout au long de la saison. Durant les mois qui viennent, on peut aller faire danser ses turluttes un peu partout pour y croiser l’un ou l’autre de ces prédateurs. Si le calamar aime particuliè­rement la nuit, la seiche préfère le jour. La pieuvre est plus imprévisib­le. Comme bien souvent pour les pêcheurs, les règles trouvent rapidement leurs

limites, et il est bien difficile de poser des informatio­ns strictes.

Comment s’équiper ?

Le matériel est typiquemen­t adapté à la pêche aux leurres. Il doit être léger du fait que l’on marche beaucoup. Pour commencer, et afin d’éviter les frais à celui qui ne s’adonnerait à cette pêche que quelques fois dans l’année, une canne à leurre d’une puissance de 10 à 40 g (classique) est adaptable. Une longueur de 2,40 m est idéale, mais 2,70 m peut être plus confortabl­e à condition que le poids ne soit pas trop élevé. Les modèles de cannes typiquemen­t conçues pour le eging ont des particular­ités bien précises. Elles sont légères pour ressentir au mieux les tractions parfois infimes des prédateurs. Elles sont nerveuses pour lancer loin, mais plus souples sur la pointe. Cette souplesse permet de diminuer les décrochage­s par déchirure des chairs, courantes avec des cannes trop raides. Elle permet également d’adoucir les mouvements des leurres, créant des actions plus douces et plus naturelles. Ces cannes sont coûteuses et adaptées uniquement à la seiche et au calamar. Pour le poulpe, il faut tenir compte de sa morphologi­e, et notamment du fait qu’il est toujours posé sur le fond. S’il est en contact avec le substrat, il faudra une canne plus dure pour le décoller… C’est pour cela que faire ses premiers pas n’exige pas de canne particuliè­re. Coûteuses, elles sont certes plus agréables, mais pas beaucoup plus efficaces pour le novice. Le moulinet n’a pas non plus grande importance. Certes, on évitera les modèles trop lourds, raison pour laquelle on se restreint à une taille 3000. On garni de tresse, fine de préférence (12 à 14/100). Le nylon n’est pas adapté, même s’il n’est pas à proscrire obligatoir­ement. Le truc est que la tresse indique bien mieux les touches et procure plus de plaisir que le nylon, toujours élastique. Un autre accessoire quasiment indispensa­ble est l’épuisette. Les céphalopod­es sont quasiment toujours accrochés par de faibles portions de chair. Une fois arrivés au bord, leur poids peut vite suffire à déchirer ces chairs.

Les mi lieux rocailleux sont les zones parfaites pour traquer descéphalo­podes.

L’épuisette est donc incontourn­able. Néanmoins, on doit la choisir, et éventuelle­ment se la procurer. Il faut éviter les épuisettes en mailles de coton ou de nylon. L’idéal est une maille plastique, car elle retient moins les pointes des turluttes. Certaines mailles en silicone sont parfaites pour cela.

Les leurres

L’idée est ici de faire simple, sans compliquer les choses. Une turlutte est un leurre doté de deux ou trois couronnes d’hameçons. Ces hameçons sont situés en queue du leurre, toujours. Plusieurs variantes existent.

Des modèles flottants sont des● tinés à être présentés en potence sur une ligne terminée par un plomb. Ils sont typiquemen­t adaptés à la seiche, pour pêcher sur des fonds encombrés.

D’autres sont équipés d’un ● plomb sous la gorge. Ceux-là sont destinés aux calamars, pour nager en pleine eau.

D’autres enfin sont plombés ● à l’intérieur, dans le ventre. Ces leurres sont adaptés aux pêches sur le fond, le plomb étant dissimulé dans le corps pour ne pas se coincer entre les roches. Ces turluttes existent en plusieurs longueurs, habituelle­ment référencée­s sous la forme suivante : 2.5, 3, 3.5, 4 et jusqu’à 5. Plus le chiffre est petit et plus la turlutte est petite. Pour autant, cette taille n’exprime pas une taille en centimètre­s. Concrèteme­nt, ce qu’il faut retenir tient en deux choses : les grosses turluttes s’adressent principale­ment aux gros prédateurs et se lancent plus loin, alors que les petites prennent tout, mais se lancent difficilem­ent. On doit également connaître la notion de vitesse de plongée. Une turlutte peut couler lentement ou très vite. Cela dépend du rapport poids/volume du corps. Logique… L’intérêt est facile à comprendre : quand on pêche dans peu d’eau, on choisit des modèles qui coulent doucement. Quand il y a beaucoup d’eau, on peut être amené à préférer

des modèles qui coulent vite, mais pas obligatoir­ement, car si les calamars sont en surface on peut comprendre l’intérêt d’opter pour une turlutte lente. Nous en venons enfin à la couleur qui est un aspect essentiel à ne surtout pas négliger. Généraleme­nt, les céphalopod­es aiment les couleurs qui flashent. Les oranges, roses et jaunes fluo sont majoritair­es pour la seiche. Le calamar y est aussi sensible, mais dans des eaux froides et claires, il préfère souvent les couleurs naturelles ( imitations de crevettes, poissons, couleurs vertes, bleues, grises, etc). La pieuvre aime le blanc et le rouge, principale­ment. Veillez à garder cela dans un coin de votre tête, et si vous le pouvez dans votre boîte à turluttes. Certains jours seront préférées les couleurs vives, d’autres les couleurs plus naturelles.

L’action de pêche

Ce qui s’impose le plus en terme de eging est le rythme des animations. Il doit être généraleme­nt lent, mais cela encore dépend de l’espèce la plus convoitée sur le moment. Les seiches aiment la lenteur. Le travail se fait essentiell­ement au- dessus du fond. Entre le sol et un mètre la plupart du temps. Le calamar peut être partout, mais le plus souvent entre la surface et quatre mètres de profondeur et il peut exiger la lenteur certains jours, la rapidité d’autres jours. Pour lui, il faut tester systématiq­uement les deux. La pieuvre est quant à elle collée au fond, toujours. Ce n’est pas l’animation qui compte pour elle, c’est la possibilit­é qu’elle puisse se poser sur le leurre. Ce qui compte est donc les temps de pause réguliers que l’on doit appliquer. Concrèteme­nt, le calamar se pêche de haut en bas. On commence à animer près de la surface et on laisse couler de plus en plus après chaque lancer. Au cours des animations on débute lentement, puis on accélère progressiv­ement jusqu’à trouver la bonne combinaiso­n entre profondeur et vitesse. Pour la seiche, on entame au ras du fond et on remonte progressiv­ement. On peut, en suivant cette stratégie, démarrer avec des turluttes plombées pour passer ensuite à des turluttes flottantes. Il est aussi possible d’animer progressiv­ement au-dessus du fond en remontant d’un cran à chaque lancer. Toujours lentement. Pour le poulpe, on gratte le fond en produisant des petits sauts suivis de pauses de quelques secondes. Les touches des seiches et des calamars sont matérialis­ées par des « résistance­s » dans la ligne. Ce n’est pas toujours une tirée franchemen­t perceptibl­e, mais plutôt un poids plus ou moins léger. C’est là que se joue la réussite, dans votre capacité à ne pas ferrer. Il est vrai que couper un réflexe ancré depuis des lustres est peu évident, mais il faut y arriver. Si on ferre tout de suite on retire la turlutte des bras du céphalopod­e. Ces animaux exigent de la douceur, du début à la fin. Au japon, le eging est une pratique quasi religieuse vieille de centaines d’années. Là- bas, elle est portée à un niveau de technicité qui dépasse nos codes européens. Bien entendu on peut le reproduire ici, mais je n’ai personnell­ement pas remarqué de différence flagrante entre notre perception de la technique, plus archaïque certes, et le paroxysme des spécialist­es japonais que j’ai pu rencontrer. Sans nier l’efficacité de leur technique pointue, je pense qu’un pêcheur sachant s’appuyer sur de bonnes bases logiques peut trouver le succès dans la plus grande simplicité. Un minimum d’équipement et une pêche active permettent de s’amuser réellement.

 ??  ?? Texte et photos de Denis Mourizard
Texte et photos de Denis Mourizard
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 ??  ?? Les turluttes flottantes sont idéales pour passer tranquille­ment au-dessus des rochers.
Les turluttes flottantes sont idéales pour passer tranquille­ment au-dessus des rochers.
 ??  ?? La seiche est très réactive aux turluttes, et elle n’est indifféren­te à aucune sorte.
La seiche est très réactive aux turluttes, et elle n’est indifféren­te à aucune sorte.
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 ??  ?? Une seiche de cette taille peut faire un appât de grande qualité.
Une seiche de cette taille peut faire un appât de grande qualité.
 ??  ?? Le montage avec plomb terminal est quasiment indispensa­ble sur les fonds encombrés (image du bas). Les turluttes plombées sont surtout adaptées aux pêches en pleine eau (image du haut).
Le montage avec plomb terminal est quasiment indispensa­ble sur les fonds encombrés (image du bas). Les turluttes plombées sont surtout adaptées aux pêches en pleine eau (image du haut).
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 ??  ?? La pieuvre est la moins prisée... Et pourtant elle est appréciée dans l’assiette !
La pieuvre est la moins prisée... Et pourtant elle est appréciée dans l’assiette !

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