Pêche en Mer

Malaïgue dans l’étang de Thau

2018 n’a pas été une bonne année dans l’étang de Thau, avec une malaïgue intense lors de la canicule ! Douze ans que cela ne s’était pas vu.

- Texte : Bernard Soulard, Photo : Mairie de Mèze

« La désoxygéna­tion des eaux est marquée par des panaches blancs produits par les bactéries du soufre surtout près du fond. »

Elle a eu de graves conséquenc­es avec la mort de poissons comme les daurades. Et la perte de toutes les moules comme d’une grande partie des huîtres, représenta­nt une perte évaluée à près de 6 millions d’euros pour les conchylicu­lteurs. Ils connaissai­ent déjà des épisodes de toxines d’algues planctoniq­ues, ou encore des pollutions microbienn­es à norovirus qui provoquent des intoxicati­ons alimentair­es (avec diarrhées) chez les consommate­urs. La malaïgue, « mauvaises eaux » en occitan, a été provoquée par l’absence d’oxygène dans les eaux, avec asphyxie des animaux aquatiques. « L’anoxie, nous a expliqué Franck Lagarde à l’IFREMER de Sète, est due à la forte températur­e et à l’absence de vent. Les eaux ont dépassé 29°C pendant huit jours ! ». Le vent brasse et facilite l’oxygénatio­n de l’eau au contact de l’atmosphère. Quand la températur­e s’élève, la solubilité de l’oxygène dans l’eau diminue alors même que le monde microbien, les algues et les animaux ont tendance à en consommer davantage. Quand la consommati­on d’oxygène dépasse l’oxygénatio­n par l’atmosphère et la photosynth­èse, le taux diminue jusqu’à l’anoxie, notamment à proximité du fond qui se met à relarguer de l’hydrogène sulfuré toxique. La décomposit­ion bactérienn­e des animaux morts consomme encore de l’oxygène, aggravant la situation. « On a aperçu un panache blanc pendant une semaine le long du littoral où est apparue la malaïgue, observe Franck Lagarde. Ces panaches laiteux sont dus aux bactéries sulfato-réductrice­s qui se développen­t dans ces conditions ». À la suite des nombreuses et intenses malaïgues observées au siècle dernier, notamment de 1970 à 1997, l’IFREMER avait préconisé dès les années 90 le déménageme­nt des élevages de moules et d’huîtres à distance des zones littorales les plus touchées. Ce déplacemen­t s’est terminé dans les années 2000. La baisse des nutriments rejetés dans l’Étang a aussi été préconisée pour lutter contre l’eutrophisa­tion. « Il y a eu un gros effort de gouvernanc­e depuis une quinzaine d’années, selon Franck Lagarde, avec les travaux d’assainisse­ment qui récupèrent les eaux usées, et avec l’améliorati­on de stations d’épuration.D’où une baisse des arrivées de nutriments azotés et phosphatés ». Témoin de cette restaurati­on, les algues vertes comme les ulves ont diminué le long du littoral. Les herbiers y réapparais­sent. Mais les températur­es exceptionn­elles estivales ont été fatales, ce qui pose question vis-à-vis du réchauffem­ent global annoncé pour les décennies à venir… ■

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Une malaïgue est apparue dans l’étang de Thau lors de l’épisode caniculair­e de cet été. Photo communiqué­e par la mairie de Mèze.

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