Les hameçons, on fait le point !
Il y a dans ce monde de la pêche et des pêcheurs, un accessoire qui pique fort : l’hameçon. Pour mettre un peu de piment dans sa technique, faire le point sur leur utilisation pourrait bien allumer le feu de la réussite !
Un hameçon est à la fois ce qu’il y a de plus basique, et ce qu’il y a de plus important pour le pêcheur. On a effectivement aucun mal à comprendre que sans hameçon, il ne peut y avoir de poisson pendu au bout de la ligne. Si vous êtes comme moi, il est fort probable que vous avez jeté votre dévolu sur un hameçon plutôt que sur tous les autres. Je peux imaginer que l’hameçon que vous avez choisi a reçu l’intégralité de vos faveurs, et qu’aucun argumentaire ne saurait vous faire changer d’avis. Ce à quoi je répond que c’est bien entendu votre droit le plus absolu. Néanmoins, ne pouvant m’appuyer que sur ma propre expérience, je me dois d’écrire ici que cette attitude m’a jadis porté préjudice. Un hameçon semble bien anodin au premier coup d’oeil. Cet accessoire ne pèse rien, et du moment qu’il dispose d’une pointe bien acérée, on a vite fait de penser qu’il remplira son rôle. On en oublie ainsi tous les poissons perdus, ceux que l’on a sentis dans la canne, et surtout les autres… L’hameçon ne se contente pas de se cacher dans l’appât, il cache aussi bien son jeu. Ici est l’objectif de cet article : parcourir en ce début de saison tous les points importants qu’il ne faut jamais perdre de vue. Si l’hameçon qui a notre préférence peut convenir pour une technique de pêche donnée, en un lieu donné, et avec des appâts bien définis, il peut très rapidement s’avouer critique dans d’autres circonstances. Nous verrons que pour celui qui pratique une pêche ouverte, ne pas jouer sur les hameçons est une erreur.
L’hameçon à la loupe
Un hameçon est un objet connu, mais sa conception d’apparence simpliste ne doit pas faire oublier les nombreuses avancées techniques qu’il a connu au fil des décennies. On relève quatre segments importants sur un hameçon, et chacun de ces segments doit être compris.
1. L’accroche : techniquement, on connaît trois types d’accroche. Le premier est l’oeillet, le plus connu.
L’hameçon, d ’apparence simpliste, regorge de nombreuses avancées techniques qui sont cruciales de saisir pour affiner sa technique.
En forme de petit anneau, on y fixe la ligne par un noeud direct. L’anneau est idéal pour des raisons de rapidité, on peut le nouer facilement, même avec les doigts mouillés ou engourdis. Il peut être un inconvénient pour les appâts fragiles, car son volume et surtout le noeud utilisé peuvent déchirer les chairs, et plus particulièrement pour les vers qui sont d’ordinaire très fragiles. La largeur de l’anneau ne doit pas excéder 25% de l’épaisseur de l’appât, et les noeuds doivent être arasés au maximum. Le second type d’accroche est la palette. La palette est plus fine et plus discrète. Elle appelle à la réalisation de noeuds de connexion plus discrets. Je conseille vraiment cette accroche pour tout ce qui est vers ou fines lamelles de poisson ou de céphalopode. Elle est certes plus méticuleuse à réaliser, mais elle est aussi plus efficace selon moi. Enfin, le dernier type d’accroche est le fer brut. Aucune palette ni aucun anneau n’est aménagé. Ce type d’hameçon est cité pour la connaissance, mais il exige des noeuds collés qui ne peuvent être objectivement réalisés au bord de l’eau.
2. La hampe : la hampe est la partie verticale de l’hameçon qui fait jonction entre l’accroche et la courbure. On considère souvent (à tord selon moi) que plus la hampe est longue, plus elle maintient les vers, ce qui nous amène à considérer que les hameçons à hampe longue sont remarquables pour ces appâts. Bien que cela ne soit pas totalement faux, ce n’est pas non plus totalement juste. Certes la longueur de la hampe est utile, mais surtout pour enfiler le ver. Une fois en place, je n’ai jamais vu la moindre différence au niveau du maintien de l’appât. De plus, les hampes longues ne
sont intéressantes de mon point de vue qu’en utilisation suspendue, c’est-à-dire avec l’appât qui circule entre deux eaux, et pour les poissons qui aspirent, comme le bar. Leur efficacité est bien moins évidente pour les Sparidés. Pour ces derniers, et plus généralement pour les poissons qui mordent et mâchent avant d’avaler, les hampes courtes sont préférables.
3. La courbure : la courbure est la partie basse de l’hameçon. Sa fonction est double : accueillir et soutenir l’appât, et assurer une bonne résistance dans la gueule du poisson. Il faut être lucide avec la courbure, notamment au niveau de son ouverture (la distance entre la pointe et la hampe). En surfcasting, et plus généralement lorsque l’appât est pris sur le fond, il est assez courant de piquer les poissons dans le coin de la gueule. S’il s’agit d’un gros poisson et que la courbure est trop étroite, ce qui arrive avec un hameçon trop petit, la pointe se décroche en raison du point d’appui qui est créé. Idéalement, la courbure doit être bien large pour des gros appâts, quitte à dépasser largement des chairs de l’appât. Sur ce détail précis, je veux ajouter que dissimuler l’hameçon dans l’appât n’est pas une obligation. Les effets positifs de cette précaution sont inexistants, et je vais même plus loin, ils sont terriblement négatifs. En raison de la présence des chairs, la pointe a bien du mal à se piquer dans la chair de la gueule du poisson. Il faut vraiment faire attention à ce point et veiller à ce que la pointe soit bien, et largement dégagée de l’appât. J’ajoute que la courbure peut être légèrement vrillée pour créer ce que l’on appelle
La dorade grise dont la gueule est petite exige des hameçons de petite taille, fins de fer.
des hameçon renversés. Ces derniers ont une pointe décentrée qui part légèrement sur le côté. J’aime particulièrement ces hameçons et les considère indispensables pour les Sparidés. En effet, ces derniers écrasant souvent l’hameçon dans leur mâchoire, une pointe renversée a plus de chances de piquer la lèvre. Un hameçon droit n’aura quasiment aucune chance dans ce cas de figure précis. Ces derniers doivent être réservés à une utilisation en pleine eau, sur des montages dont les appâts naviguent dans le courant à destination de poissons qui aspirent.
4. La pointe : la pointe est un élément essentiel, on s’en doute. On distingue les pointes rentrantes des pointes droites. Les pointes droites sont, tout comme les hampes droites, parfaites pour les pêches en pleine eau. Lorsque le poisson aspire l’esche, la pointe droite fait parfaitement son travail. Pour un appât pris au fond, nous retrouvons la problématique précédente : l’appât peut se retrouver écrasé entre les dents. Une pointe droite resterait efficace, surtout avec une hampe renversée, mais elle le sera moins qu’une pointe rentrante (qui fléchit vers la hampe). Les pointes rentrantes sont redoutables pour les Sparidés, et bien souvent l’hameçon se retrouve piqué dans l’encoignure des lèvres ou sur le rebord. Les hameçons que l’on appelle Circle Hook sont un cas à part, avec une pointe arrondie qui pointe vers le bas. Ces hameçons initialement destinés au tarpon on été créé pour favoriser la glisse de l’hameçon sur les plaques osseuses de la gueule. Cela peut paraître étrange, mais
c’est aussi la seule solution pour que la pointe puisse s’ancrer au moment même où elle rencontre de la chair. Il ne faut pas, selon mon humble avis, faire priorité sur ces hameçons, car aucun poisson de nos côtes ne présente les caractéristiques d’un tarpon. J’ai manqué personnellement beaucoup de poissons avec ces hameçons et je ne les utilise plus.
Les savoirs indispensables
À présent que nous avons défini et détaillé chaque partie de l’hameçon, je vais aborder avec vous les autres choses qu’il est bon de connaître. Trois choses sont à savoir, et elles sont intimement imbriquées. Je commencerais par le poids de l’hameçon. Bien que l’on puisse penser qu’un hameçon soit extrêmement léger, il ne faut pas se tromper. Sous l’eau, nos amis poissons ont le regard affûté, et les lèvres extrêmement sensibles. Aussi infime que soit le poids pour nous, pêcheurs, il n’est pas anodin pour le poisson. Tout est question de relation entre le poids de l’appât et le poids de l’hameçon. Prenons un exemple pour que vous compreniez bien : partons d’un hameçon d’un gramme (pour l’exemple). Cet hameçon piqué dans un gros coquillage de 25 grammes ne représente qu’un 26ème du poids total, c’est facile à comprendre. De ce fait, lorsque l’esche circule sous l’eau, l’influence du poids de l’hameçon est nulle. Prenons le même hameçon sur lequel on enfile un ver de 2 grammes, et les données changent totalement. L’hameçon représente tout à coup 1/3 du poids de l’ensemble... Croyez-moi, une daurade ou un marbré savent faire la différence, et cela se traduira par des touches fines, méfiantes, et bien souvent impossibles à conclure. Ajoutons le poids du bas de ligne au poids de ce frêle hameçon, et on prend peut-être conscience de l’importance de ce problème. Malgré tout, cela n’est effectif qu’en cas de courant, aussi léger soit-il. Dans une eau morte, ce sera plutôt le fer qui sera à prendre en considération. Chacun de vous, fort de cette conscience, prendra désormais soin de ne pas jouer dans les extrêmes qui frôlent la sanction immédiate. Un gros hameçon se voit tout de suite quand on le compare à son appât. Toutes les pêches qui impliquent des vers nécessitent des hameçons aussi légers que possible, et donc en carbone. Les appâts carnés, comme les céphalopodes, les crustacés ou les morceaux de poisson acceptent plus facilement des gros hameçons.
Le fer : on entend par « fer » le diamètre de l’hameçon, et donc le poids qui en résulte. Bien évidemment, le fer a son importance, car en pêchant la daurade, et surtout les grosses, on pleure assez facilement si on a préjugé de la puissance des mâchoires. Un hameçon trop fin de fer aura de fortes chances d’être plié comme un morceau de papier.
Je n’irais pas jusqu’à dire que c’est fréquent, mais cela arrive plus souvent qu’on ne le pense. Un hameçon fort de fer est plus lourd, certes, mais quand on pense à gros poissons, ou à mâchoires pavées de dents plates, et bien ce fer fort s’impose. On préfèrera donc des appâts adaptés à ce fer, et on évite les petits appâts.
Le rapport appât/hameçon : le rapport entre l’appât et l’hameçon s’estime donc sur trois tableaux. En premier lieu, la pointe doit dépasser largement des chairs. C’est obligatoire. Comptez au minimum deux millimètres d’espace entre la pointe et la chair de l’appât, et ce pour un petit appât. Pour une seiche ou un casseron, comptez un centimètre... Dans un second temps, on tient compte de la mâchoire du poisson que l’on est censé pêcher. Plus la mâchoire est puissante, plus on augmente le fer. Enfin, en dernier lieu, on sélectionne l’hameçon le plus léger possible, pour le fer déterminé. C’est ainsi que l’on fait une bonne sélection et un bon calibrage.
Je terminerais sur quelques conseils usuels, dont je suis certain que vous avez déjà entendu parler. Tout d’abord, bien que l’on affûte plus les hameçons dits « carbone » (qui n’en sont pas vraiment d’ailleurs), il faut tout de même veiller au piquant. Sachez qu’après une partie de pêche, la pointe s’émousse forcément. Peu au début, mais au fil des parties de pêche cette usure devient de plus en plus importante. N’estimez pas le piquant de vos hameçons sur la peau, mais sur l’ongle ! Si la pointe ne pique pas facilement dans l’ongle, jetez-le. Je termine avec la rouille, eh bien que vous soyez tous conscients de cela, vous savez comme moi que parfois... La rouille est traître, car on ne la voit pas toujours comme on le devrait. Il suffit d’un point de rouille sur la base d’une palette ou d’une courbure pour que l’hameçon soit fragilisé. Vous pouvez en être certain, si vous avez un jour à en expérimenter le résultat, ce sera sur le poisson de votre vie… Ainsi nous terminons avec ces rappels essentiels sur les hameçons. ■