Montage et animation
Le leurre souple est essentiellement un slug fin comme un lançon ou ventru comme un poisson rond, de 16 à 23 cm. Avec une tête plombée de 50 à 120 g, le leurre descend à la verticale sur l’épave. Dès qu’il arrive au fond, sur l’épave ou sur une détection de lieus jaunes repérée au sondeur, on commence à remonter la ligne doucement, à la vitesse d’un tour de manivelle toutes les 3 secondes. Une fois la ligne remontée jusqu’aux 2/3 de la hauteur d’eau, soit 15 ou 20 m sous le bateau dans 50 m de profondeur, on laisse à nouveau le leurre repartir au fond, puis on renouvelle l’animation. Lorsque l’épave est passée (elle n’est plus visible sur l’extrémité droite du sondeur), inutile de laisser filer au fond, on continue la récupération jusqu’en surface. À la touche, on continue à mouliner tout doucement et on laisse le lieu prendre la ligne et tirer sur le leurre. Lorsque la pression sur le leurre est plus forte, on ferre amplement pour piquer notre carnassier, qui peut être très gros !
être extrêmement mauvaise à la marée descendante. Question nourriture, les gros lieus se délectent de tacauds et de merlans au large. Ces poissons ronds peuvent être imités avec des leurres souples. Morphologiquement, on préfèrera un poisson avec un peu de ventre tel qu’un shad ou un slug ventru. Quant à la couleur, un blanc dos noir est parfait. C’est un bon début, mais il ne faudra pas se limiter à ce choix de leurre, ce que nous allons voir plus loin.
Où ?
À cette période de l’année, nous nous intéressons aux lieus jaunes « king size » présents sur les épaves profondes et, généralement, de très grande taille. Sur les postes éloignés rarement fréquentés, les poissons sont peu méfiants. Ainsi, les épaves situées à plus de 15 milles nautiques de la côte sont susceptibles d’abriter de gros poissons peu habitués à nos lignes. S’il arrive que les gros lieus s’installent sur une toute petite carcasse du large, les bancs de lieus jaunes sédentaires se trouvent bien dans de grosses structures. Il m’est arrivé de rencontrer de gros lieus sur de petites épaves isolées très au large, mais les poissons ne restent généralement pas longtemps, ils quittent facilement leur habitat s’ils sont dérangés. Alors que dans une grande structure immergée, ils posent leurs valises ! Une belle faille dans l’épave permet aux lieus de s’abriter facilement dans le navire et de sortir pour s’alimenter. Une épave de plus de 30 m de longueur commence à offrir un volume intéressant pour loger quelques poissons trophées ! Sur le listing des milliers d’épaves répertoriées par le SHOM (Service Hydrographique et Océanographique de la Marine), les termes cargo, pétrolier, paquebot, sous-marin ou encore vapeur doivent vous mettre la puce à l’oreille. L’épave pouvant être abîmée voire disloquée avec le temps, sa hauteur actuelle est un élément important pour garantir un biotope propice à la tenue des gros lieus jaunes toute l’année. Une hauteur de 4 mètres est un minimum pour optimiser les chances de trouver notre trésor. Une telle épave située dans une profondeur supé-
rieure à 30 mètres est alors des plus propices !
De telles épaves perdues au grand large se transmettent bien souvent de bouche à oreille sur les pontons, de bateau à bateau. Le tri dans les 6000 épaves et obstructions du SHOM est des plus décourageants. C’est pourquoi nous vous facilitons le travail en fournissant 76 points GPS précieux de grosses épaves potentiellement bonnes pour le lieu sur toute la façade Atlantique. Lecteurs récents ou occasionnels de Pêche en Mer, notez précieusement ces coordonnées en réglant votre GPS sur le système géodésique WGS 84. Les fidèles lecteurs ont peut-être déjà eu l’occasion d’enregistrer ce listing de points dans les numéros précédents. Quoi qu’il en soit, les dernières avancées des chercheurs du domaine maritime aboutissent à un répertoire de plus de 9500 points GPS d’épaves, obstructions et roches en France et dans les DOM-TOM. Je vais prendre le temps d’analyser ce catalogue passionnant pour vous en livrer la quintessence cette année pour trouver les bars, lieus jaunes, morues, pagres sabres et autres carnassiers. Nous y reviendrons ! Nous arrivons à la fin des périodes de perturbation et il n’est pas évident de trouver un créneau en mars en conciliant les rares fenêtres météo et les week-ends. Entre deux coups de vent, il faut chercher les accalmies. Mais une accalmie d’une journée ou deux ne suffit parfois pas à lisser la mer. Pour aller au grand large, mieux vaut une mer calme.
Gérer sa dérive
Nous voilà donc au large sur une mer lisse, reste à localiser l’épave tant convoitée. Il faut s’approcher du point GPS et déterminer les contours de l’épave afin de bien l’appréhender ensuite. Chaque extrémité de l’épave est enregistrée sur le GPS. Les détections de poissons éventuellement repérées au sondeur sont également enregistrées sur le GPS. Les dérives pourront alors se faire au ras de l’épave, voire
sur l’épave, pourquoi pas sur la détection de poissons repérée quelques minutes plus tôt ! Une dérive précise est un des points clés de la réussite de cette pêche. Après tant de navigation, il serait dommage d’effectuer des dérives hasardeuses.
La première chose à faire est l’analyse du courant. La première dérive, moteur éteint, dessine sur le GPS une ligne droite. La dérive suivante devrait, en toute logique, prendre la même direction. Il faut donc se positionner en amont de manière à dériver précisément sur le point souhaité de l’épave, parallèlement à la première trace. N’hésitez pas à effectuer les premières dérives très en amont de l’épave de manière à avoir une belle ligne droite qui indique précisément le courant. Attention à bien positionner la proue du bateau dans le même sens à chaque dérive, en gardant le même cap. En effet, un petit vent qui s’engouffre dans la cabine peut changer la trajectoire de la dérive. L’idéal est de positionner le bateau à 90° du vent, il devrait alors conserver cette position. Il faut penser à stopper l’erre du bateau, c’est-à-dire sa vitesse résiduelle lorsque le moteur est au point mort. C’est en quelque sorte l’élan qu’a conservé le bateau lorsque vous avez mis le point mort. Lorsque le bateau est bien placé au GPS et que l’erre du bateau est positive (plus de 0,1 ou 0,2 noeud), il ne faut pas hésiter à effectuer une marche arrière brève mais bien marquée pour stopper le bateau dans son élan, avant de couper le contact. La prospection des épaves est un véritable jeu de patience qui peut rapporter gros. Il faut bien garder en tête qu’à 10 mètres près, la dérive peut devenir mauvaise !
Le matériel
En cette période, les lançons et maquereaux sont difficiles à trouver. Et le tacaud, bon vif lui aussi, supportent mal les variations de profondeurs. Ceci expliquant le choix du leurre. Mais pas n’importe quel leurre, un shad par exemple a ten-
dance à ralentir la descente du leurre avec les vibrations de leur queue. Il faut donc un leurre dont la queue ne vibre pas trop pour une taille comprise entre 15 et 18 cm.
À l’étale de marée, démarrez avec la règle « 1 gramme par mètre ». Pour utiliser un slug ou autre imitation de lançon, on fixe le poids de la tête plombée par rapport à la profondeur : 50 g dans 50 mètres de fond, 60 g dans 60 mètres... Si cette base ne vous permet pas de sentir un contact avec l’épave au moins une fois à la descente du leurre, il faut ajouter 20 g. Avec un shad de 15 cm, il faut d’office démarrer avec une tête plombée de 70 ou 90 g. Dès qu’il y a un petit vent ou que le courant forcit à plus de 1,5 noeud, on peut pousser à 2 grammes par mètre de fond. Le point clé est d’amener le leurre – slug ou shad – directe-
ment sur l’épave dès la première descente.
Ensuite commence l’animation. Le lieu jaune est un carnassier au comportement particulier. Ce poisson puissant manque d’endurance et cherche à approcher lentement sa proie pour l’attaquer brusquement au dernier moment. Bien souvent, le leurre animé en dents de scie passe à côté des lieus jaunes sans éveiller leur attention, tandis que ces chasseurs ne résistent pas à un poissonnet qui remonte doucement vers la surface. Une remontée rapide éveille leur curiosité, mais ils ne sont pas capables de rattraper le leurre. Il faut une remontée à vitesse lente ou modérée. Ainsi, le lieu peut se positionner de plus en plus près de la proie en espérant qu’elle ne s’enfuie pas trop vite. Lorsqu’il atteint une distance correcte, il approche furtivement, ouvre sa grande gueule et aspire la malheureuse victime. Dans ces conditions, vous comprendrez que le lieu, handicapé par son manque d’endurance, ne restera pas indifférent devant une proie blessée ou épuisée. L’idée est de toucher le fond et, au moment où le leurre passe dans le banc de lieus, remonter doucement le leurre vers le bateau en s’arrêtant à 1/3 de la surface. Par exemple dans 60 mètres de profondeur, on s’arrête 20 mètres sous le bateau. La bonne vitesse de récupération est de 1 tour de manivelle toutes les 3 secondes, autant dire qu’il ne faut pas être pressé ! C’est une pêche pour les tempéraments calmes : à la touche, attentez bien que la canne plie avant de ferrer amplement. Arrivé au tiers de la hauteur d’eau, s’il n’y a pas de touche, il faut répéter cette manoeuvre en laissant le leurre repartir au fond. Lorsque le leurre se détache du fond, le lieu commence à suivre dans le but d’attaquer pendant la montée. Il s’agit du comportement typique que le lieu jaune acquiert dès sa taille d’alevin et conserve durant toute sa croissance. J’ai pu tester cela avec des micros leurres souples en rockfishing, même technique, mêmes résultats, toute proportion gardée ! Ce maniement est un peu déroutant au début, surtout pour les adeptes des pêches actives. Mais garder son sang-froid est important. La technique est imparable pour détecter la présence de lieu. Les touches sont très impressionnantes : le lieu repart à la verticale vers le fond. Son instinct de survie lui donne au démarrage une puissance bien supérieure à celle d’un bar de poids égal. Mais une fois passé ce premier rush, le combat se ramollit et l’on comprend le
« À cette époque de l ’année, l ’eau est à une température relativement homogène autour de la thermocline et le lieu jaune reste combatif jusqu’en surface. Les poissons trophées du grand large donnent du fil à retordre ! »
manque d’endurance de la bête qui vient de faire son sprint. Lors du choix du leurre, il ne faut pas hésiter à utiliser des couleurs « exotiques ». Le rose, l’orange, le rouge sont d’excellents coloris. Le dos vert, blanc, dos noir sont des coloris imitatifs très efficaces également. Pour ce point précis, il n’y a pas de règle absolue, il faut tester l’humeur du jour. Mais un jaune orangé et un blanc - dos noir sont les deux grands incontournables. De plus, par grand fond, un coloris contrasté est mieux visible par le lieu. Le rouge et jaune, noir et jaune, rouge et blanc, blanc ou jaune parsemé de rayures noires sont autant de contrastes repérés facilement. J’utilise un bas de ligne en fluorocarbone de 4 à 5 mètres en 0.40 à 0.50 mm en fluoro. C’est un élément déterminant pour résister aux rushs puissants des lieus qui tentent de rejoindre leur refuge abrasif lorsqu’ils se sentent en danger. Je préconise de fixer la tête plombée directement sur le fluorocarbone, sans agrafe. L’agrafe n’est pas une erreur, elle convient bien pour changer rapidement de leurre. Cependant le noeud de pendu en direct force à vérifier le bon état du bas de ligne régulièrement.
La tresse est comprise entre 0.16 et 0.20 mm, voire 0.22 mm. Les multifilaments en 8 ou 12 brins sont plus lisses et offrent une meilleure glisse dans les anneaux. La canne mesure 2,20 à 2,50 mètres et affiche un grammage de 20 à 85 g. Elle est accompagnée d’un moulinet spinning en taille 4000 à 6000 ou un moulinet baitcasting taille 300. Les cannes slow-jigging avec leurs actions douces en pointe correspondent très bien à cet usage. ■
« À l’étale de marée, démarrez avec la règle : 1 gramme par mètre. »