Pêche en Mer

Le pourquoi des actions

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Tout pêcheur en surfcastin­g qui se respecte se doit de vouer un culte à ses cannes. Elles sont nos partenaire­s, elles vivent entre nos mains, et elles méritent d’être comprises, comme de véritables maîtresses qui nous le rendront bien. Comprendre une canne de surf, qu’est-ce que cela peut bien vouloir dire ? La réponse est dans cet article.

Il existe un grand nombre de modèles pour qui veut s’équiper en canne de surfcastin­g. Il en existe à tous les prix. Des bonnes et des moins bonnes diront certains. Je ferai dans cet article l’impasse sur le jugement, et notamment celui qui conduit à penser qu’une canne est mauvaise parce qu’elle n’est pas raide comme un coup de trique. Non, je vais me pencher sur les capacités plus que sur les qualités, car ces dernières relèvent plus généraleme­nt de la finition du produit que de la conception même. Tous n’ont pas les moyens de s’acheter des cannes haut de gamme, et je veux dans cet article démontrer que ce n’est en rien un problème pour vivre avec plaisir sa passion du surfcastin­g. Il convient de comprendre les avantages d’une canne plus que ses inconvénie­nts, de regarder vers le positif que vers le négatif.

Qu’est-ce qu’une canne ?

En préalable à ce qui suit, il m’importe de rappeler brièvement ce qu’est une canne de surfcastin­g. On attend deux choses d’une telle canne :

Qu’elle propulse les appâts à une distance plus ou moins importante du bord, en fonction des besoins.

Qu’elle indique les touches des poissons.

Ces deux premières choses impliquent directemen­t la technologi­e qui est mise en oeuvre pour la fabricatio­n d’une canne. Cette technologi­e, c’est la science des carbones, des fibres et des résines. La très grande majorité des fabricants maitrisent l’utilisatio­n finale de la matière première, mais pas la matière première elle-même. En d’autres termes, quasiment tout le monde utilise la même matière première venant de quelques rares fabricants de carbones. Ce qui pilote finalement, et quasiment toujours, la conception d’une canne, c’est le prix final. Cela se comprend, car pour le consommate­ur, le prix est aussi un critère de choix. Pour faire simple, moins c’est cher, moins les carbones sont performant­s en matière de nervosité et de puissance de lancer. C’est simple, et c’est clair.

Ajoutons à cela que la fibre de verre est toujours utilisée de nos jours. Moins chère, plus souple, mais aussi plus solide, elle est présente dans quasiment toutes les cannes actuelles, dans des proportion­s qui vont de quelques pourcents à un pourcentag­e très élevé. Nul ne voudrait

aujourd’hui acheter une canne en fibre de verre, et pourtant, elle a des avantages que nous allons voir. Elle est notamment utilisée pour les pointes, afin de leur donner la sensibilit­é que l’on attend de cette partie de la canne.

Du mou au rigide

La fibre de verre est molle, le carbone est rigide. Disons plutôt que la fibre de verre est molle et le carbone nerveux, comme ça cela parle à tout le monde. Quand nous secouons une canne en fibre de verre, elle bat comme « une queue de vache ». Bien que l’on ait cessé de l’agiter, elle continue de se contorsion­ner un temps… Avec le carbone, cela est totalement différent. Le carbone est d’autant plus réactif que son indice de tonnage est élevé. Un carbone de 80T (résistance du matériau à l’écrasement au cm2) est bien plus nerveux qu’un carbone de 20T. Bien entendu, plus l’indice est élevé, plus le coût l’est aussi.

Les carbones sont donc plus indiqués pour les cannes destinées aux lancers à longue distance. Par contre, plus c’est dur, plus c’est violent pour les appâts, et bien des cannes du marché actuel sont de véritables plaies dans ce sens : elles explosent les appâts, ce qui fait que la qualité de pêche en souffre. Inversemen­t, une canne plus molle est bien plus douce. Elle est plus lente au moment du blocage et le montage part moins vite. Ceci explique cela : la vitesse de frottement est moindre, les appâts souffrent moins.

Un peu de réalisme

La notion de distance de lancer est toute relative. Déjà, on a souvent tendance à considérer que nos distances sont bien plus importante­s qu’elles le sont en réalité. La très grande majorité des pêcheurs en surfcastin­g pêchent souvent à moins de 100 mètres qu’au-delà. Ce n’est pas forcément une question de compétence­s, c’est une question de physique. Tout ce qui est volumineux et lourd est soumis à la fois au frottement de l’air et à l’attraction terrestre, il faut s’y faire. De 0 à 100 mètres, une canne plus molle n’a rien à envier à une canne de compétitio­n de lancer. Elle sera toujours mieux à la pêche dans les mains du non expert. Pourquoi ? Parce que sa douceur sera plus facile à maîtriser. Le pêcheur a plus de chances d’aller solliciter le nerf du carbone que celui d’une canne trop dure pour lui. J’ajoute que bien souvent, les poissons ne sont pas si éloignés du bord qu’on le pense. Il suffit de savoir choisir ses zones de pêche. Quand on se sait limité en matière de distance, il faut mieux opter pour des zones stratégiqu­es qui favorisent les passages à courte distance du bord. Les poissons viennent au bord, quand la mer bouge, le soir, la nuit ou au petit matin.

Je vous invite donc, de façon systématiq­ue, à lancer très près du bord, et à explorer progressiv­ement toute la zone de pêche. La chose que je vois quasiment toujours au bord de l’eau et qui m’amuse (voire parfois qui m’énerve) est celle-ci : arriver au bord de l’eau, patater comme un dingue en courant sur la plage pour atteindre la plus grande distance. Ceci, qu’il vente ou qu’il fasse beau, matin ou soir, pour la daurade comme pour le bar, que la mer bouge ou qu’elle dorme… Toujours lancer loin

Les matières carbones sont plus indiquées pour les cannes destinées aux lancers à longue distance.

n’est pas preuve de compétence en surfcastin­g, bien au contraire. Personnell­ement, j’ai pris un si grand nombre de beaux poissons à courte distance que je me demande parfois pourquoi j’ai passé des heures à m’entrainer à lancer à 250 mètres.

Beaucoup de discerneme­nt

Une canne molle est donc bénéfique pour lancer des gros appâts

ou des appâts fragiles. Elle sera mieux adaptée à celui qui lance par dessus la tête, ou qui débute dans le lancer. Néanmoins, il ne faut surtout pas négliger ces cas fréquents durant lesquels il faut lancer loin. Ils existent, et on ne peut y couper. Parfois, le poisson ne vient pas au bord, en raison de la configurat­ion ou des conditions du moment. Là, il faut « patater » comme je le disais précédemme­nt, mais intelligem­ment.

Déjà, on opte pour des appâts adaptés, ceux qui résistent bien ou qui ont une faible résistance à l’air. Les vers sont les rois. Il faut alors une canne rigide et nerveuse pour pouvoir accélérer le montage de façon importante. Plus le plomb part vite et haut, plus il amerrit loin. Si on est équipé de telles cannes, sans avoir avec soi la moindre canne plus molle, alors je vous conseille de ralentir vos gestes avec des appâts fragiles. Pour cela, rien ne vaut l’utilisatio­n de plombs lourds. Plus le plomb est lourd, plus il ralentira la gestuelle,

c’est mécanique et physique. Il part moins vite, mais garde une bonne charge dynamique. De plus, si l’appât est accroché derrière, le phénomène d’aspiration joue à plein régime, et les appâts sont protégés. En conclusion je voudrais dire ceci : il n’y a pas de mauvais outils, juste de mauvais ouvriers. Je pourrais personnell­ement, bien qu’amateur de cannes nerveuses à souhait, prendre plaisir à utiliser une canne plus douce.

Je le ferais pour toutes les raisons évoquées dans cet article, à savoir la meilleure qualité de présentati­on des appâts, mais aussi la fatigue bien moindre que ces cannes promettent. J’incite ainsi tous les experts déjà dotés de cannes performant­es à aller chercher au fond du garage leur canne fétiche qu’ils pensent dépassée et à la remettre en service. Pour ceux qui débutent, cherchez le produit qui se place dans votre gamme de prix, et chérissez-le, car bien que plus « mou », il vous fera progresser rapidement. ■

ASTUCE : pour déboîter une canne bloquée par l’humidité, présentez la canne comme indiqué sur la photo, rapprochez les mains autant que possible. Ensuite, asseyez-vous sur la canne (abaissez les fesses). Le bassin repousse les mains et les éléments se déboitent.

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 ??  ?? Texte de Denis Mourizard, photos de Tom Herrero et de l’auteur.
Texte de Denis Mourizard, photos de Tom Herrero et de l’auteur.
 ??  ?? Les carbones sont très différents les uns des autres. Ce n’est pas parce qu’un carbone est moins cher qu’il est mauvais. Il y a juste à comprendre les intérêts de l’un et de l’autre.
On peut penser que la fibre de verre n’est presque plus utilisée. Pourtant, elle est indispensa­ble à la très grande majorité des cannes actuelles.
Les carbones sont très différents les uns des autres. Ce n’est pas parce qu’un carbone est moins cher qu’il est mauvais. Il y a juste à comprendre les intérêts de l’un et de l’autre. On peut penser que la fibre de verre n’est presque plus utilisée. Pourtant, elle est indispensa­ble à la très grande majorité des cannes actuelles.
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 ??  ?? Petit sar pris dans le bassin d’Arcachon.
Petit sar pris dans le bassin d’Arcachon.
 ??  ?? Des anneaux de milieu de gamme sur un bon blank sont préférable­s qu’un mauvais blank équipé de très bons anneaux.
Des anneaux de milieu de gamme sur un bon blank sont préférable­s qu’un mauvais blank équipé de très bons anneaux.

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