La pêche vent debout contre l’énergie offshore
Lorsque l’on me demande ce que j’aime en mer, je me réfère régulièrement à cette phrase qu’avait écrit Olivier De Kersauson : « Tôt ou tard, la mer efface les traces, tout est neuf à la surface de l’océan, tout ce qu’on peut y voir vient de maintenant, parfois d’hier, et ne survivra pas demain. Le passé est très proche, le présent a sa densité, le futur n’existe pas, il est indéterminé. J’ai toujours eu la sensation que la surface de l’océan était neuve, éternelle. Cette étendue d’eau qui bouge ou pas recèle toutes les quiétudes du monde. Tous les silences. La terre n’apporte pas çà. Elle a une mémoire. La mer, non. »
Mais ce refuge intemporel et loin de l’empreinte humaine semble peu à peu perdre de son authenticité. Car, si l’on peut aujourd’hui débattre des avantages et inconvénients de l’aménagement du littoral français pour les énergies offshore, il est des limites à ne pas franchir. En premier lieu celle de la massification d’éoliennes et d’hydroliennes le long des côtes. Or, il n’y a qu’à voir le nombre de projets annoncés en pleine mer, et ce aussi bien en Manche qu’en Atlantique ou Méditerranée, pour comprendre qu’on se dirige tout droit vers la création d’un gigantesque archipel de forêts de pales métalliques sur notre espace marin.
L’autre limite est celle de l’installation des éoliennes et autres hydroliennes dans nos patrimoines maritimes. Et là encore l’Etat semble faire fi du faible recul que nous avons sur les risques que représentent ces technologies pour ces écosystèmes. Dernier en date, le projet TIGER qui pourrait aboutir, à titre expérimental, à l’installation d’hydroliennes dans les courants de la
Jument du golfe du Morbihan, une baie régulièrement classée parmi les dix plus belles au monde. En outre, cette zone peut se targuer d’être l’un des plus grands spots de pêche français. Ainsi, comme d’autres auparavant et pour d’autres chantiers similaires, des pêcheurs se sont levés pour déposer un recours à ce projet à travers la création de l’Association des Pêcheurs du
Golfe du Morbihan (APGM). Ces derniers, avis scientifique en main, mettent notamment en avant le manque d’études complémentaires sur l’impact d’une telle implantation, tout en dénonçant la création d’une nouvelle zone interdite à la pêche. Pour le moment, les actions menées dans le passé contre ces puissants groupes de la transition énergétique s’apparentent plus à un combat de David contre Goliath avec pour seul résultat un retard dans le début des travaux. Cependant, la grande population de pêcheurs dans le golfe pourrait créer une mobilisation suffisamment forte pour faire entendre la voix des usagers de tous les jours et amener à une vraie concertation…
Nous reviendrons plus en détails sur ces projets très sensibles dans nos prochains numéros, en attendant profitez bien des premières belles journées en mer !