Pedale!

Antoine de Caunes

- PROPOS RECUEILLIS PAR JOACHIM BARBIER / PHOTO: DR

Ce n’est pas parce que Didier l’embrouille est mort et enterré depuis des années qu’Antoine de Caunes a arrêté de se déguiser. Sa tenue préférée? Un maillot, des cuissards, un dossard, et une belle machine. Allez hop, en

selle.

Qui vous a fait aimer le vélo? Laurent Fignon. Il m’avait ébloui dans une étape de montagne du Tour. Une révélation d’ordre esthétique. J’étais en vacances dans le Pays basque, je suis allé directemen­t chez le premier vendeur m’acheter un cuissard et une machine. Je ne vous raconte pas comment j’ai dégusté ma race...

Pourquoi Fignon? Je n’aime pas les champions humbles. Et Fignon était un mec de panache, un mauvais esprit. Comme Armstrong dont j’ai aimé l’intelligen­ce, la méthode, l’arrogance. Je me rappelle lui avoir serré la pogne au départ et à l’arrivée d’une étape dans son sixième Tour. Il avait gagné, et malgré cela, Lance avait toujours ce regard de tueur, le même que celui des boxeurs au premier coup de gong. J’aime aussi le vélo pour sa culture, son langage. C’est un sport agricole, le plus épique et exigeant, avec la boxe. C’est pas pour rien que les mecs sont, dans ces deux sports, issus du lumpenprol­étariat: ce sont des paysans, des mecs durs au mal. Et il faut être d’une absolue mauvaise foi pour ne pas voir cette souffrance épique et héroïque.

Est-ce que vous avez un rapport fétichiste avec votre vélo? Oui, c’est l’un des seuls sports où tu peux parler mécanique et esthétique pendant des heures. On est toujours en recherche du vélo ultime, indépassab­le. J’en ai encore acheté un troisième, il y a deux jours, je sais pas pourquoi... Pourtant, je n’ai que deux jambes.

Avec qui aimez-vous parler vélo? Avec les coureurs, les directeurs sportifs, les anciens, et puis mon ami, l’écrivain Christian Laborde, qui pourrait faire aimer le cyclisme à un cul-de-jatte. Quand je suis en face d’un gars comme Hinault, je suis comme un gamin de cinq ans. Tu retrouves cet orgueil, cette hargne qu’il possédait, autant dans la gagne que dans le plaisir de voir les autres perdre. Il n’y a rien de mieux que de suivre une étape dans la même voiture qu’Hinault et d’écouter ses commentair­es sur Radio Tour. “Le peloton aujourd’hui, il n’y a plus de patron, que des tapettes .... ”

En tatanes à Manhattan, documentai­re d’Antoine de Caunes, diffusion sur Canal+ le 5 novembre prochain

“Il n’y a rien de mieux que de suivre une étape dans la voiture d’Hinault: ‘Le peloton aujourd’hui, il n’y a plus de patron, que des tapettes’…”

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