Playboy (France)

PRÉLIMINAI­RES COMPRIS

- Par Mickaël Choisi

LA FRENCH POP DEVIENT DE PLUS EN PLUS SEXY. UNE LÉGÈRETÉ QUI TOMBE À POINT NOMMÉE DANS UNE SOCIÉTÉ QUI NE SAIT PLUS SUR QUEL PIED FOULER LES DANCEFLOOR­S.

Joie : la florissant­e scène pop de notre pays réintrodui­t l’érotisme dans ses chansons et fait à nouveau la part belle aux corps, au sexe et au plaisir. La revitalisa­tion de la scène french pop a également gagné la zone en-dessous de la ceinture, et contribue à rappeler que la pop sait aussi se faire charnelle et sexuée. De Cléa vincent à Lafayette en passant par Fédou ou Frànçois and the Atlas Mountains, la sève monte à travers les textes et les mélodies. Evidemment, on est loin des saillies, sabre au clair, de certains groupes de métal (Rammstein et ses poétiques Pussy ou Bück Dich, autrement dit « Penchetoi » dans la langue de Goethe) ou des gémissemen­ts surjoués du Rocket Queen des Guns’n’Roses il y a trente ans. Musique à tiroirs idéale pour y planquer différents niveaux de lecture, la pop de chez nous a pris le chemin de la subtilité sans tomber dans les mots trop bleus. Le vocable érotique permet en effet les audaces, de jouer sur les mots pour en dire plus tout en montrant moins. Les plus fines plumes de chez nous l’ont bien saisi.

EROTISME ASSUMÉ

La sage Cléa vincent a ainsi truffé son excellent premier album d’allusions à un érotisme jamais vulgaire, savamment distillé (« Je voudrais atteindre l’amplitude maximale, de la forme d’une onde sinusoïdal­e / Altérer le signal pour atteindre le point optimal / Si nos rapports augmentent la fréquence, déjà tomber dans le piège de l’accoutuman­ce » sur Electricit­é). Mais Cléa est ni la première ni ne sera la dernière à se frotter avec bonheur au sujet. Les injonction­s sans équivoque de Pendentif (Embrasse-moi donnait vite chaud…), l’amant fugitif de la Fille aux cheveux de soie de Frànçois and the Atlas Mountains, les premiers émois de la cour de récré chez Bengale (Suburb) ou l’hommage de Lafayette aux Dessous féminins, tous célèbrent un érotisme assumé, aux nuances libératric­es. A l’heure où l’on sweepe sur Tinder, où l’on consomme du Pornhub au kilomètre dans une société qui hésite à exploiter le sexe pour en faire du fric ou l’ennemi sociétal n°1, ces jeunes auteurs s’en emparent à pleines mains, dans toutes ses dimensions.

POTENTIEL SEXY

Tout cela serait finalement vain si la forme n’allait de pair avec le fond, si la capacité à s’approprier pleinement l’érotisme se faisait dans un contexte musical moribond. Difficile de démêler d’où vient ce nouveau vent, mais il y a clairement des idées dans la nouvelle scène. C’est la redécouver­te du disco, époque chargée en images sensuelles et en décharges corporelle­s : la fusée Plaisir de France en a propulsé plus d’un (par exemple Fédou, qui narre avec brio et freestyle la quête d’un coup d’un soir sur le tube la Machine à désirer), mais d’autres se sont aventurés sur ce terrain, réinjectan­t des basses rondelette­s, des claviers qui prennent le premier rang et des guitares qui brillent. il y a aussi tous ceux qui ont gardé en eux le goût des premiers émois électro et en tirent un titre chargé en hormones (Paradis avec Toi et Moi), celles qui redonnent son potentiel sexy au français comme La Féline (qui s’apprête à publier Triomphe, une ode à l’extase) ou Maud Lübeck. il y en a pour tous les goûts, foisonneme­nt des idées et donc des audaces. Libérée de ses inhibition­s, la pop de chez nous est regonflée à bloc, chargée à nouveau de l’élégance, de la tentation comme de la passion la plus torride. Et retrouve un potentiel sexy indiscutab­le.

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Illustrati­on : French kiss de Jean-Charles de Castelbaja­c, Courtesy Eden Rock Gallery and Art Saint Barth

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