LA RÉGION SAUVAGE
Sans renoncer à l’approche naturaliste qui a fait sa réputation, le Mexicain Amat Escalante ouvre son quatrième long métrage à l’horreur, au fantastique et à la science-fiction.
Lion d’argent au dernier festival de Venise, La Région sauvage décrit en surface une réalité très mexicaine : soit le quotidien d’une mère (Ruth Ramos) qui prend son destin en main après s’être débarrassée de son mari, lequel cache son homosexualité refoulée derrière un machisme brutal. Traité avec un réalisme quasi documentaire dans le contexte d’une ville de province conservatrice et coincée, cet épisode sociologique trouve en parallèle son expression poétique dans la représentation d’un monstre à la fois séduisant et dangereux : une créature tentaculaire d’origine extraterrestre, secrètement contenue dans une cabane à la campagne, et qui semble dispenser auprès de ses visiteurs des sensations sexuelles d’une intensité inédite, avec des conséquences variables selon les individus. Certain(e)s, comme la jeune Veronica (interprétée par un sosie de Charlotte Gainsbourg), trouvent tellement de satisfaction dans leur rencontre avec la bête qu’ils/elles y deviennent accros ; d’autres paient un prix élevé, parfois en y laissant leur vie. À la fois métaphore de la violence contemporaine, étude de la sexualité féminine et commen- taire sur le rôle de la famille, ce mélange acrobatique emprunte son style au gratin mondial du cinéma de festival, présent et passé, ses influences les plus évidentes étant Lars von Trier (à qui Escalante emprunte son directeur de la photo Manuel Alberto Claro), Zulawski et, dans une moindre mesure, Tarkovski. Voilà qui devrait aider à faire le tri entre adeptes enthousiastes et allergiques définitifs.