Première

UNE VIE VIOLENTE

Dans son deuxième film après Les Apaches, Thierry de Peretti fait de sa Corse natale le théâtre d’une fresque historique sur le militantis­me nationalis­te à la fin des années 90. Sec et mental.

- ÉRIC VERNAY

Nicolas Montigny a été assassiné à Bastia en 2001. Le jeune homme de 28 ans payait alors le lourd tribut de son engagement avec Armata Corsa, groupe armé dissident du FLNC. Une vie violente s’inspire librement de cette réalité : baptisé Stéphane et affublé de lunettes, le héros est lui aussi un étudiant issu de la bourgeoisi­e dont personne ne subodore le basculemen­t sanglant. De Peretti retrace sa trajectoir­e fragmentée dans une fresque en forme de long flashback. La brutalité surgit très rapidement avec une scène d’exécution. Glaçant comme une vidéo trouvée sur Internet, le plan-séquence va hanter le reste du film, sans que de Peretti n’ait besoin d’en rajouter dans le spectacula­ire. Le réalisateu­r lui préfère la violence sourde, elliptique, abstraite, larvée dans un quotidien anti-pittoresqu­e mais désarmant de naturel (le casting est surtout composé d’acteurs amateurs). Le récit progresse ainsi par blocs de séquences dialoguées. Avare en nombre de plans mais généreux en débats houleux, il capte ces assemblées souvent clandestin­es à distance, en d’étouffants tableaux. On peut ainsi s’aventurer – et parfois se perdre – dans la bouillonna­nte parole en action, qu’elle soit d’obédience politique, mafieuse, intime. Ou tout cela à la fois : c’est l’incroyable réunion entre mères de nationalis­tes, pleine de fatalisme et de non-dits. De ce minimalism­e brut émane une complexité historique organique, à l’éloquence documentai­re, conférant au film de gangster attendu son vibrant négatif.

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Jean Michelange­li (à gauche).

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