VERÓNICA
Paco Plaza, le coréalisateur de la saga [REC], a tourné en solo cette histoire d’adolescente possédée dans l’Espagne du début des années 90. La sortie DVD est l’occasion d’exorciser avec lui quelques démons. PREMIÈRE : Le film est « inspiré d’une histoire vraie ». Pouvez-vous nous en dire plus ? PACO PLAZA :
Verónica adapte de manière très libre l’affaire Vallecas, qui s’est déroulée à Madrid en 1992. C’est un cas unique en Espagne d’activité paranormale dans la mesure où il existe un procès-verbal : un inspecteur de police a témoigné avoir assisté à des phénomènes qu’il ne pouvait pas expliquer. Mais notre film s’éloigne le plus possible de cette histoire. Beaucoup d’informations contradictoires concernant ces événements circulent sur le Net. On a choisi de n’en conserver que certains aspects et on a fait notre propre lecture.
Verónica se situe au début des années 90. Que pensez-vous de la vague « rétro » initiée par Stranger
et ? N’est-ce pas trop nostalgique ?
Things Ça
Mon film parle de ma jeunesse, mais je l’ai conçu en plongeant dans ma mémoire émotionnelle. Je suis un peu contre toute cette nostalgie qui nous empêche à la fois de profiter du bonheur du temps présent et d’envisager sereinement l’avenir. Mais dans le cas de Verónica, c’est justifié de se situer en 1991. Car après, en 1992, il y a eu les Jeux olympiques à Barcelone et l’Exposition universelle. Ce qui marque le début d’une période de grande autosatisfaction en Espagne, de modernité, de véritable transition de la dictature à la démocratie. 1992, c’est l’adolescence de l’Espagne qui s’ouvre à l’Europe, à la monnaie unique, etc. 1991, c’est la dernière année d’enfance de mon pays. C’est le sujet de mon film.
La musique du groupe de rock gothique espagnol Héroes del Silencio joue un rôle important dans votre film. Pourquoi ?
Le groupe a véritablement explosé en 1991. Ils ont vendu des centaines de milliers de disques, on les entendait vraiment partout, tout le temps ! Si tu es espagnol et que tu écoutes Maldito Duende, ça te fait voyager dans le temps... En 1991, j’étais plus âgé que mon héroïne, mais ma vie était assez semblable à la sienne. J’écoutais Héroes del Silencio, je jouais au Ouija avec mes potes, j’ai été dans une école catholique...
Justement, à votre avis, peut- on faire un film d’horreur espagnol sans imagerie catholique ? Et sans la comédienne Ana Torrent ?
La religion catholique imprègne toute la culture espagnole. Encore aujourd’hui, on peut voir le ministre de la Culture chanter l’hymne de la légion espagnole au passage des images du Christ pendant la Semaine sainte. L’imagerie catholique est partout dans la vie quotidienne, dans notre éducation dès la petite enfance, dans nos fêtes et traditions. Difficile d’échapper à son ombre. Esthétiquement, c’est aussi une imagerie surpuissante. Concernant Ana Torrent, c’est une actrice que j’ai toujours adorée. Au fond, Verónica est aussi mon hommage à Cría Cuervos de Carlos Saura dont Ana est l’héroïne. Je ne pouvais pas me passer d’elle.
Vous tournez en ce moment Quien a hierro mata. Ce n’est pas un film d’horreur. Allez-vous vers un cinéma plus mainstream ?
C’est un thriller de vengeance qui parle de rancoeur, de colère... Non, plutôt de haine mais alors de haine vraiment pure, de tous ces sentiments qui nous empoisonnent. Le mainstream, je ne sais pas vraiment ce que c’est. Si on pense en termes de succès, alors le film le plus mainstream que j’ai fait, c’est [REC], et c’est quasiment un film expérimental. Alors je crois que non, personne ne sait ce qu’est le mainstream.
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