Première

BANC D’ESSAI

13 Reasons Why créée par Brian Yorkey

- showrunner PAR CHARLES MARTIN Brian Yorkey,

C’était d’abord une voix qui venait d’outretombe, pleine d’ironie et de doutes, de faiblesses et de désespoir. La jeune Hannah Baker venait de se suicider, et enregistré­e sur sept cassettes, sa voix racontait pourquoi à ses auditeurs : le spectateur et, à chaque épisode, un membre de son entourage censé porter une part de responsabi­lité dans sa mort. En treize épisodes, 13 Reasons Why, série originale Netflix inspirée du premier roman de Jay Asher [ Treize Raisons], avait habilement réussi à traduire l’incommunic­abilité entre adultes et enfants, l’aveuglemen­t des parents, et le spleen adolescent. Comme un Angela, 15 ans des années 2010. Un an plus tard, la plateforme remet le couvert avec une deuxième saison. Le créateur du show, Brian Yorkey, revient pour Première sur la manière dont la série a été construite et sur l’impact social qu’elle a eu. Comment peut-on imaginer une suite à ce qui, entre-temps, est devenu un phénomène planétaire ? Il faut...

… Connaître Selena Gomez

« C’est elle qui a découvert le livre de Jay Asher. Elle voulait l’adapter au cinéma et finalement le projet est devenu une série. C’est là que je suis entré en scène. Selena est un peu notre phare depuis le départ. Elle nous donne des conseils et elle fait le lien avec les jeunes, ses millions de fans. Elle s’occupe du show sur l’espace public. Elle sait très bien parler de l’importance que revêt cette série à ses yeux et aux yeux du public ado. »

… Être honnête et sans retenue

« On savait dès le début qu’on allait s’attaquer à un sujet délicat. Des thèmes pas faciles comme les agressions sexuelles, le harcèlemen­t, le suicide. Ce sont des choses qui touchent les adolescent­s partout dans le monde. Il était de notre responsabi­lité d’en parler de manière honnête. Sans faire de l’enrobage, sans adoucir certains aspects et rendre ça gentil et mignon. On a donc essayé d’être sincères, en espérant que ça déclencher­ait quelques conversati­ons. On n’imaginait simplement pas à quel point cela allait être le cas... Les réactions ont été très intenses des deux côtés de la discussion. Mais il valait mieux ça que de ne pas en parler du tout ! »

… Montrer la douleur du suicide

« On s’attendait à de la controvers­e, mais peut-être pas autant. En même temps, c’est comme toute forme d’art : ce qui est beau, c’est que chacun peut se faire un avis. Chacun peut recevoir l’oeuvre comme il la sent. Nous n’avons pas du tout eu le sentiment de “glamourise­r” le suicide. Bien au contraire. On a montré de façon claire et nette à quel point c’est quelque chose de douloureux. Surtout pour ceux qui restent. Il n’y a rien de glorieux ou de glamour là-dedans. Certaineme­nt pas. Pour moi, 13 Reasons Why raconte avec précaution l’histoire d’une jeune fille qui fait un choix terrible et tragique. Non seulement on dit bien qu’on ne soutient pas ce geste, mais on dit même que ce n’est pas la solution à choisir. »

… Devenir une oeuvre éducative

« Il y a des écoles aux États-Unis et au Canada qui montrent 13 Reasons Why, qui encouragen­t les parents à la regarder avec leurs enfants pour en discuter par la suite. Dès le départ, on a construit le show ainsi. En pensant au fait que parents et enfants pourraient le découvrir ensemble. Ainsi, les adultes peuvent apercevoir quelques aspects de la vie de leurs gamins à l’école

« 13 REASONS WHY RACONTE AVEC PRÉCAUTION L’HISTOIRE D’UNE JEUNE FILLE QUI FAIT UN CHOIX TERRIBLE ET TRAGIQUE. »

qu’ils ignoraient et ça ouvre la discussion. Je crois que c’est ce qui peut arriver de mieux à cette série : que parents et enfants la regardent ensemble. »

… Faire évoluer les mentalités

« Le studio Paramount, Netflix, nous à la production ou encore les acteurs, nous avons des retours permanents des téléspecta­teurs, qui nous disent merci, que la série leur a sauvé la vie. Une dame, dans le sud des États-Unis, m’a même expliqué un jour que 13 Reasons Why avait convaincu sa fille de lui parler d’une agression sexuelle qu’elle avait subie, un an auparavant. Nous avons tous reçu plein de preuves, d’exemples concrets, montrant que la série ne fait pas qu’ouvrir le débat. Elle aide vraiment les gens. »

… Entraîner une prise de conscience

« La saison 2 montre qu’il y a plusieurs facettes à une même histoire. On sait que le suicide est déclenché par plusieurs facteurs. Mais en même temps, on espère que la série fera bien comprendre que le harcèlemen­t, et surtout le cyber-harcèlemen­t, sont un facteur crucial du passage à l’acte. Donc on a tous une part de responsabi­lité dans la façon dont on traite les autres et la manière dont on prend conscience du problème. Le conseiller d’éducation, Mr Porter, est un bon exemple. Il a fait de son mieux et il s’est planté. Il n’a pas su aider Hannah. Dans la saison 2, on le voit essayer de corriger ça. »

BRIAN YORKEY

 ??  ??
 ??  ??
 ??  ?? Justin Prentice
Justin Prentice
 ??  ?? Alisha Boe
Alisha Boe

Newspapers in French

Newspapers from France