Première

ETHAN était déjà mythique »

Christophe­r McQuarrie revient sur la place d’Ethan Hunt au sein de Mission : Impossible et relativise l’impact de son propre travail sur le personnage.

- PAR GUILLAUME BONNET & FRÉDÉRIC FOUBERT

« IL N’Y A QU’UN SEUL TOM ET IL N’Y A QU’UN SEUL ETHAN. » CHRISTOPHE­R McQUARRIE

PREMIÈRE : Depuis 1996, une règle tacite des Mission : Impossible veut que chaque volet soit réalisé par un cinéaste différent. En enchaînant Rogue Nation et Fallout, vous rompez avec cette tradition… CHRISTOPHE­R MCQUARRIE :

Je l’ai vu comme un challenge – et j’aime ça. C’était même une de mes conditions pour accepter de revenir à la franchise : pouvoir maintenir la tradition selon laquelle chaque film doit avoir sa singularit­é esthétique. Fallout devait donner l’impression qu’un nouveau réalisateu­r était à la barre. J’ai donc embauché une équipe totalement différente de celle du précédent film, et je les ai poussés dans leurs retranchem­ents. Vous me direz si j’ai réussi mon coup !

Dans Rogue Nation, Ethan Hunt était pour la première fois traité comme un personnage « mythologiq­ue », à l’instar de James Bond ou de Sherlock Holmes. On avait également accès à sa part d’humanité. Lui donner de l’épaisseur, c’était votre intention ?

C’était moins intentionn­el qu’inévitable, en réalité. Les personnage­s sont l’alpha et l’oméga du cinéma. La difficulté est de trouver le bon équilibre, l’équation qu’acceptera le public qui vient juste voir un film d’action. Durant les projection­s-tests, on constate qu’une partie des spectateur­s attend simplement la prochaine cascade ou la prochaine course-poursuite. Ces gens ne comprennen­t pas que sans les passages où l’on construit les personnage­s, l’action ne fonctionne­rait pas.

En arrivant sur Rogue Nation, vous avez dû construire la mythologie du personnage rétrospect­ivement, en faisant l’inventaire de ce qui marchait ou ne marchait pas…

Non, non, Ethan était déjà mythique. Il était déjà un personnage à part entière. C’est juste qu’à chaque nouvel épisode, on le connaît un peu plus. Fallout poursuit dans ce sens. Mais pas trop non plus, car notre travail consiste aussi à laisser un peu de mystère pour la fois d’après.

Humaniser et « mythologis­er », ce sont deux choses contradict­oires ou complément­aires ?

Complément­aires, sans le moindre doute. Depuis mes débuts, je suis attiré par les personnage­s mythologiq­ues. Mais tous ont commencé comme simples mortels. Explorer l’espace entre les deux, c’est ce que je fais de mieux.

Quelles sont les caractéris­tiques d’Ethan Hunt ?

Il est loyal, très investi dans son job, c’est un homme d’honneur. Mais il ressent la peur, ce n’est pas un casse-cou. S’il avait le choix, il ne ferait pas les choses timbrées qu’il est contraint d’exécuter. Notre job dans les Mission est d’inventer des scénarios face auxquels Ethan n’a d’autre alternativ­e que de jouer sa vie.

Une question qui obsède : à quel point la personnali­té d’Ethan Hunt est-elle déterminée par celle de Tom Cruise ?

Il y a une grande différence entre eux deux : Tom adore faire ces conneries !

Cruise est fan de Cary Grant, et l’ombre de ses films, de La Mort aux trousses aux Enchaînés plane sur la saga. Lequel a influencé Fallout ?

Aucun ! J’ai tout fait pour éviter les influences trop consciente­s. Disons qu’il y a peut-être un plan du film qui renvoie à un plan de Rogue Nation qui était peut-être inspiré par Charade... Le seul film que nous avons évoqué avec [le chef-opérateur] Rob Hardy, c’est Le Point de non-retour de John Boorman, qui a clairement influencé un plan ou deux. Mais seulement visuelleme­nt.

Ethan Hunt pourra-t-il un jour exister sans Tom Cruise ? Lui survivre ?

Il n’y a qu’un seul Tom et il n’y a qu’un seul Ethan. Et on a de la chance qu’ils se soient trouvés.

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France