VINCENT ELBAZ L’antistar qui fédère
Dans la cartographie des acteurs populaires français, Vincent Elbaz est un cas à part dont la présence ce mois-ci au générique du Jeu et d’En liberté ! est symptomatique. Décryptage avec l’intéressé.
On l’a appelé et on lui a demandé : « C’est quoi, pour vous, un acteur populaire ? » Il a dit : « Belmondo. Quelqu’un que les gens adorent, pour qui on a une sympathie immédiate et qui incarne quelque chose de la culture française, d’une époque. Un acteur qui a l’amplitude pour jouer des héros qui sortent de l’ordinaire mais accessibles. James Bond ou Ethan Hunt n’en sont pas, ils ne sont pas connectés à la réalité. Le héros populaire est physique, certes, mais il n’a pas leur dimension bigger than life. » Sans s’en rendre compte, Vincent Elbaz venait de se décrire, lui la vedette éminemment populaire, chérie depuis ses premières fanfaronnades dans Le Péril jeune, comédie générationnelle culte, il y a vingt-cinq ans. Faites le test autour de vous : tout le monde l’aime. Connu de tous, jouissant d’un capital sympathie jamais démenti, à la fois drôle, athlétique et doté d’une immense intelligence de jeu, il coche toutes les cases. Et pourtant, sur la photo de famille, il n’est pas au centre, pas le fils préféré, mais l’éternel cousin rigolard, toujours là mais un peu de côté. Ce mois-ci, il est à l’affiche du Jeu (Fred Cavayé) et d’En liberté ! (Pierre Salvadori). Dans Le Jeu, film choral mordant sur un dîner entre amis qui vire au jeu de massacre, il est l’un des sept convives. Pas moins mais pas plus non plus. Dans le formidable En liberté !, qu’il ouvre dans une scène de cascade à la fois époustouflante et guillerette, il reste un troisième rôle, majeur narrativement mais au temps d’écran en pointillé. Plus Bebel que jamais (tiens, tiens), il y brille en ripou burlesque, mais par touches. Loin des récents Daddy Cool (Maxime Govare) ou Je ne suis pas un homme facile (premier film français Netflix signé Éléonore Pourriat) où il tenait le premier rôle mais dont la résonance est restée mitigée. La particularité d’Elbaz est là.
Patrimoine comique
À la fois unanimement adoré et inégalement couronné, il surfe, à 47 ans, entre premiers rôles et apparitions géniales, sans jamais se départir de son aura populaire. « C’est vous qui m’apprenez que je le suis, moi je n’en ai aucune conscience ! On ne décide pas de l’être : ça advient ou pas. Je sais juste que j’ai participé à trois films entrés dans notre patrimoine comique : Les Randonneurs, Le Péril jeune, et La Vérité si je mens. On m’arrête dans la rue pour eux. Ce rapport au public est au coeur de la définition de l’acteur populaire : une rencontre spontanée, chaleureuse. Mais j’attends encore LE rôle, un vrai héros, la fusion entre populaire et qualitatif. Je l’espère à chaque fois. » À bon entendeur...
LE JEU
De Fred Cavayé • Avec Vincent Elbaz, Bérénice Bejo, Suzanne Clément... • Durée 1 h 30
• Sortie 17 octobre • Critique page 100