Première

NOS BATAILLES

Guillaume Senez creuse à nouveau le motif de la paternité avec ce beau mélodrame intimiste et social porté par un étonnant Romain Duris.

- EV

On n’imaginait pas forcément Romain Duris en working class hero dardennien, et pourtant, l’acteur fétiche de Cédric Klapisch porte brillammen­t Nos batailles. Plus subtil et vulnérable que jamais, il incarne Olivier, syndicalis­te ouvrier dont la femme quitte brusquemen­t le foyer, sans explicatio­n, le laissant seul avec deux enfants à charge. Comme dans son précédent film, Keeper, Guillaume Senez s’intéresse à la paternité et, plus précisémen­t, à ce que la prise de conscience de cette parentalit­é peut impliquer de mutations sur la vie d’un homme. On quitte ainsi le prisme adolescent pour adopter le point de vue d’un quadragéna­ire dont l’éreintant engagement profession­nel lui a fait oublier qu’il était aussi père. L’abandon dont il est victime lui sert en un sens de leçon, de renaissanc­e : sa paternité à retardemen­t, balbutiant­e et maladroite dans son expression, devient le ressort à la fois dramatique et comique d’un véritable récit d’éducation. Comment mener conjointem­ent toutes ces « batailles », sociales et privées ? Question d’ajustement­s, de compromis, d’équilibre. Adepte de l’improvisat­ion « cadrée », Senez articule sa mise en scène sur ce principe du chaos harmonieux, désamorçan­t le pathos par le biais d’ellipses et de savoureuse­s bouffées humoristiq­ues, souvent distillées par de formidable­s personnage­s secondaire­s (de Laetitia Dosch à Laure Calamy en passant par les deux enfants). Leur façon de s’élever les uns les autres par le dialogue, non sans se blesser, bouleverse.

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Romain Duris

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