Première

LE MYTHE VIDOCQ

En deux séries, Vidocq (1967) et Les Nouvelles Aventures de Vidocq (1971-1973), Marcel Bluwal a fait du flic bagnard un mythe populaire. Pour Première, il se souvient.

- u PAR DAVID FAKRIKIAN

Eugène-François Vidocq [1775-1857] est une figure historique qui, de manière quasiment invisible, a nourri toute la littératur­e populaire française du XIXe siècle. J’ai grandi en lisant Les Misérables de Victor Hugo, où Vidocq est littéralem­ent divisé en deux, Javert et Valjean, le flic et l’ancien bagnard. Ces personnage­s, tout comme le Vautrin de Balzac dans La Comédie humaine, s’inspiraien­t de lui. Le vrai Vidocq était un invité de marque, dans la dernière partie de sa vie, à la table des plus grands auteurs. Il était une malle à anecdotes, et Eugène Sue, par exemple, a puisé dans ses histoires pour écrire Les Mystères de Paris qui fut un immense succès. Vidocq était furieux, au point qu’il a publié en représaill­es Les Vrais Mystères de Paris ! Passionné par la période de l‘Empire, le scénariste Georges Neveux est à l’origine de mes deux séries TV. C’était un héritier des surréalist­es et un très grand scénariste dialoguist­e de cinéma qui s’était mis à la télévision. J’avais déjà caressé l’idée de traiter le personnage. J’avais lu ses mémoires, que je n’avais pas aimées pour plusieurs raisons : d’abord Vidocq, le vrai, ment tout le temps, c’est un hâbleur qui se met excessivem­ent en avant, et qui se défend sans arrêt ; d’autre part, tout ce qu’il racontait était plein de stupre et de sang, éléments incompatib­les avec la télévision de cette époque-là... Quand Georges Neveux m’a envoyé les scénarios des premiers épisodes, je me suis rendu compte qu’il avait complèteme­nt modifié l’approche du personnage. Ce n’était plus du tout le Vidocq historique, mais Scaramouch­e. Il avait néanmoins conservé la dualité du héros, puisque dans la première série d’épisodes, il est encore un bagnard en fuite. Dès la diffusion de la première série en 1967, avec Bernard Noël, Vidocq a été un énorme succès. Cet intérêt a engendré une suite avec Claude Brasseur, qui à son tour a fait les beaux soirs de ce qu’on appelait encore l’ORTF. On ne s’y attendait pas du tout, on avait fait ça pour s’amuser. C’est dû à la force du personnage, tel que Neveux l’avait réinventé. »

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