DES BARGES CONTRE LE PACIFIQUE
Dans les nombreux sous-genres du cinéma, le film de sous-marin est sans doute l’un des plus excitants. Il permet de placer dans un espace clos un échantillon de l’humanité qui va vivre des aventures hors normes et mettre sa vie en danger. Comme une version plus dure, plus claustro du film de conquête spatiale (d’ailleurs, ce n’est peut-être pas un hasard si cette couverture avec Le Chant du loup arrive après celle de First Man). Les contraintes deviennent un terrain de jeu idéal pour la mise en scène et les scénaristes peuvent s’éclater. On réfléchissait à tout ça devant Le Chant du loup, et on se demandait pourquoi le genre avait été si peu visité chez nous ? À part Les Maudits [René Clément, 1947] ou Casabianca [Georges Péclet, 1951], silence radio. C’était l’un des défis d’Antonin Baudry. Ramener le genre en France, sans verser dans le patriotisme bidon ou la pyrotechnie assourdissante. Il lui a fallu une sacrée dose de folie (ainsi qu’à ses acteurs), mais la mission est accomplie. L’interview qu’il nous a accordée est d’ailleurs passionnante, mais le plus amusant arrive à la fin : pour lui, la vie à bord d’un submersible ressemble à un tournage. À ce moment-là, on a eu envie d’ajouter « et à la fabrication d’un magazine ». L’élan collectif nécessaire pour trouver une voix particulière, le stress dans les dernières lignes droites, l’incroyable investissement qu’il faut pour tenir le cap… on ne sauve pas des vies en faisant Première, mais la mystique est un peu la même. Bon, pour être honnête, les bouclages de ce magazine ne ressemblent pas non plus à ce que montre Le Chant du loup. Au fond, ce serait plutôt La Vie aquatique : une gigantesque maison de poupées peuplée de doux dingues qui chaque mois retroussent leurs manches pour refaire surface après avoir accompli la mission…