PATRICK MELROSE
Cumberbatch en lutte avec ses démons. Au-delà de la performance, une saga familiale qui dévoile toute la mesure de sa partition dans le temps.
Quand on demande à Benedict Cumberbatch, circa 2013, quel est le personnage qu’il rêve par-dessus tout d’interpréter à l’écran, l’acteur britannique répond : « Patrick Melrose ». Ça tombe bien, une minisérie adaptée des écrits semi-autobiographiques d’Edward St Aubyn est dans les tuyaux et les producteurs lui font de l’oeil pour incarner cet aristocrate malgré lui, qui carbure aux stupéfiants pour se dépêtrer de souvenirs douloureux. À l’écran, on comprend vite les desiderata du comédien, Cocotte-Minute prête à exploser. Si le premier épisode est un formidable écrin pour Cumberbatch, il frise l’exercice de style, un peu trop dans l’épate. Il ne fait pourtant, jusque-là, qu’effleurer la surface du personnage en plein bad trip. Brillante par sa construction, l’intrigue navigue alors à travers les époques, sur un total de cinq épisodes, pour prendre la mesure de ses angoisses et des marques indélébiles laissées par ses traumatismes de jeunesse, racontés en flash-back. Le réalisateur ( Edward Berger, passé par Deutschland 83) ausculte Melrose dans le détail, use allègrement des raccords, trace des correspondances entre les plans d’un épisode à l’autre... y compris dans ce qu’épinglait déjà le roman : l’entre-soi et le vide du mode de vie d’une aristocratie bien trop occupée par les apparences pour voir le monde se dérober sous ses pieds. Adroite de par son dispositif, Patrick Melrose s’avère riche et terrifiante dans sa peinture d’un héritage écrasant.