Première

CYRILLE, AGRICULTEU­R, 30 ANS, 20 VACHES, DU LAIT, DU BEURRE, DES DETTES

Portrait sensible et émouvant d’un agriculteu­r qui essaie de garder la tête hors de l’eau mais s’enfonce un peu plus dans les abîmes de sa condition.

- THOMAS BAUREZ

Le titre renvoie à Michel Foucault et René Allio, mais Cyrille n’est pas Pierre Rivière et n’a pas assassiné sa famille. C’est même tout l’inverse. Son combat à lui, c’est de maintenir debout la ferme familiale, une petite exploitati­on trop fragile donc peu compatible avec un monde agricole où seuls les plus forts survivent. Rodolphe Marconi (Lagerfeld confidenti­el) a rencontré Cyrille par hasard sur une plage. Le jeune homme hésitait alors à se mettre à l’eau. Ils ont fait connaissan­ce, de là est née l’idée d’un portrait. On le sait depuis – au moins – le succès de Petit Paysan, le monde agricole et ses souffrance­s peuvent « faire cinéma ». Pas de westerns façon US, non, plutôt des drames sociaux en forme de chronique d’une mort annoncée (Au nom de la terre). Là où ce documentai­re est passionnan­t, c’est dans sa façon de filmer avant tout un personnage, de ne s’intéresser qu’à lui, d’accompagne­r ses gestes, ses désirs (que l’on devine à la fausse dérobée sur son écran de portable le soir avant de s’endormir), ses combats personnels... Se dessine un jeune homme, engagé volontaire dans une sorte de fuite en avant. La vie accable et broie. Cyrille semble avoir oublié qu’un choix était possible. Quand Marconi l’a rencontré hésitant à se mouiller complèteme­nt, c’est peut-être ça qu’il a senti, cette fragilité intérieure qui empêche de s’accomplir. Cyrille se lève à l’aube, s’occupe de ses vaches. Il sait, au fond, que tout ça est éphémère mais il s’accroche. C’est beau, touchant. Cyrille est agriculteu­r, ça fait de lui un homme solitaire.

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