LA NUIT DU CHASSEUR
CHARLES LAUGHTON, 1956
Pas de surprise. C’est l’un des seuls cinéastes à faire l’unanimité autour de son seul film. Deux enfants beaux comme la nuit et sages comme le jour. Lilian Gish en icône Griffith. Robert Mitchum en incarnation doucereuse du mal absolu. Unique film (à cause de son échec commercial) du grand comédien anglais Charles Laughton (avec James Agee au scénario et Stanley Cortez à la photo), cette histoire de deux enfants qui tentent d’échapper au monde perverti des adultes épouse tous les styles (baroque, calligarisme et surréalisme), mélange tous les univers du film noir (du southern gothic au thriller pur), de la chronique sociale et du conte pour trouver le point d’équilibre parfait entre poésie et suspense. Parti d’un roman policier, Laughton fait basculer son film dans ce qui l’intéresse, c’est-à-dire les visions cauchemardesques des gamins réfugiés sur une barque abandonnée et sa critique folle de la névrose sexuelle, de la frustration et de la mégalomanie. Pourquoi Charles Laughton n’a-t-il pas réalisé un second film ? « Parce qu’il est mort », avait un jour répondu Robert Mitchum rigolard. Peut-être aussi parce que son film ressemble à un testament, à un adieu poétique.